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COMMENTAIRE SUR LES PSAUMES.

EXPLICATION SUR LE PSAUME III.


PSAUME POUR DAVID LORSQU’IL FUYAIT DEVANT SON FILS ABSALON : « SEIGNEUR, POURQUOI MES PERSÉCUTEURS SE SONT-ILS MULTIPLIÉS ?

ANALYSE


Que les querelles domestiques, les révoltes de ceux qui nous doivent obéissance sont fréquemment la punition de nos péchés. Révolte et mort d’Absalon.

1. Les rois honorent par des statues commémoratives les généraux victorieux, les magistrats érigent des effigies et des colonnes en l’honneur des cochers, des athlètes couronnés, avec une inscription qui proclame leur triomphe comme pourrait le faire la voix d’un héraut. D’autres célèbrent dans des livres et des écrits les louanges des vainqueurs, et s’efforcent de déployer dans ces éloges un talent qui les élève au-dessus de leurs héros. Historiens, peintres, ciseleurs, sculpteurs, peuples, magistrats, villes, contrées, s’entendent pour vanter les triomphateurs. Mais celui qui prend la fuite sans avoir combattu, celui-là n’a jamais trouvé personne pour reproduire ses traits comme le fait aujourd’hui David : Écoutez plutôt : « Psaume pour David, lorsqu’il fuyait devant son fils Absalon. » Et quel fugitif a jamais mérité des éloges ? Quel nom de fuyard a jamais figuré sur des inscriptions ? Si l’on affiche les noms des fugitifs, c’est afin de les retrouver[1], et non pour leur faire honneur. Apprends donc, mon frère, la raison de ce titre, et que ton âme soit en repos. Que cette histoire devienne une leçon pour toi-même. Que la persécution du juste soit un sujet de raffermissement pour ton propre cœur. Apprends pour quel motif David était persécuté par Absalon, afin que, sur ce fondement, tu sois édifié dans la crainte de Dieu. En effet si, à défaut de base, il n’y a pas de construction solide, de même l’Écriture est de nul secours à qui n’en sait point découvrir le sens.
L’intention du bienheureux David, en composant ce psaume, était de réformer la vie humaine, et de lui enseigner à ne se permettre aucune infraction, aucun outrage aux lois de Dieu, afin que le pécheur évitât les écueils où il s’était heurté lui-même. David fuyait devant son fils, parce qu’il avait fui la pureté ; il fuyait devant son fils, parce qu’il avait attenté aux droits d’une union légitime ; il fuyait devant son fils, parce qu’il s’était dérobé à la loi de Dieu, qui dit : « Tu ne tueras pas, tu ne commettras

  1. La traduction latine est inexacte ou tout au moins obscure. C’était un usage, dans l’antiquité, d’afficher les noms des esclaves fugitifs, comme on fait aujourd’hui pour les objets perdus, afin de les retrouver. On peut consulter à ce sujet une dissertation de Letronne, insérée à la fin de l’édition d’Aristophane, publiée par M. Didot, (III page 14) : Papyrus du Musée Royal, contenant l’annonce d’une récompense promise à qui découvrira et ramènera deux esclaves échappés.