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ce glorieux rejeton, et, imiter ces cultivateurs laborieux qui déposent d’abord au sein de la terre des graines de cyprès ou d’autres plantes pareilles, puis, lorsqu’ils voient que la graine se fait arbre, au lieu de laisser la plante au lieu de sa naissance, l’en retirent pour la replacer dans un autre endroit, afin que la terre nouvelle qui l’accueille dans son sein déploie toute sa force, une force intacte pour alimenter la jeune racine. L’enfant dort elle a reçu, contre toute espérance, le germe dans son sein, elle l’arrache de sa maison, pour le planter dans le temple ; qu’arrosent d’inépuisables sources spirituelles. Et l’on put voir se réaliser en leur personne cette prédiction du prophète David : Bienheureux l’homme qui n’a pas marché dans le conseil des impies, qui ne s’est pas tenu debout dans la voie des pécheurs ; qui ne s’est pas assis dans la chaire de pestilence, mais sa volonté est dans la loi du Seigneur, et dans sa loi il méditera jour et nuit ; et il sera comme le bois planté sur le passage des eaux, lequel donnera son fruit en son temps. (Ps. 1,1 – 3) En effet Samuel n’avait pas fait l’expérience du vice, avant d’en venir trouver le remède : c’est en sortant des langes qu’il s’attacha à la vertu : il ne participa point aux réunions où règne l’iniquité, il ne fréquenta point les conversations pleines d’impiété ; dès le premier âge, en quittant le sein de sa mère, il accourut à cette autre mamelle spirituelle. Et de même qu’un arbre continuellement arrosé, s’élève à une grande hauteur ; de même il monta promptement au sommet de la vertu, grâce à la divine parole dont son oreille était incessamment abreuvée. Mais voyons comment cette plantation s’opéra. Suivons Anne, entrons dans le temple avec elle. Elle monta avec lui, dit le texte, à Sélom, conduisant un veau de trois ans. Alors un double sacrifice se célèbre : une des victimes est douée de raison, l’autre en est dénuée ; l’une est immolée par le prêtre, l’autre consacrée par Anne. Mais non, l’hostie offerte par Anne avait bien plus de prix que celle qui fut immolée par le prêtre. Car Anne était sacrificatrice de ses propres entrailles ; c’est le patriarche Abraham qu’elle imitait, c’est contre lui qu’elle prétendit lutter. Mais Abraham recouvra son fils et l’emmena Anne, au contraire, laissa le sien dans le temple pour qu’il y restât toujours. Je me trompe : Abraham lui-même consomma son sacrifice. Ne vous arrêtez point, en effet, à ce qu’il n’égorgea point son fils : songez seulement que dans sa pensée il alla jusqu’au bout. Voyez-vous cette femme en lutte avec un homme ? Voyez-vous comment son sexe ne l’empêche point de rivaliser avec le patriarche ? Mais regardez la consécration : S’étant approchée du prêtre, elle lui dit : A moi, seigneur. (Ibid v, 26) Que signifie cette expression, A moi ? Cela veut dire : Prête une exacte attention à mes paroles. Comme un long temps s’était écoulé, elle veut lui remettre en mémoire ce qui a été raconté précédemment. De là ce qui suit : À moi, seigneur : ton âme se souvient. Je suis la femme qui s’est arrêtée devant toi en priant le Seigneur au sujet de ce jeune enfant. J’ai prié le Seigneur, et il m’a donné la chose que je lui avais demandée. Ft moi je prête cet enfant au Seigneur, afin qu’il serve le Seigneur tous les jours de sa vie. (1Sa. 1,27-28) Elle ne dit pas : je suis la femme que tu as injuriée, que tu as insultée, raillée comme étant dans l’ivresse, comme n’ayant plus l’usage de sa raison ; à cause de cela Dieu t’a fait voir que je ne suis point ivre : c’est inconsidérément que tu m’adressais ce reproche. Elle ne profère aucune de ces dures paroles, elle répond au contraire avec une douceur parfaite quoique le tour qu’avaient pris les événements témoignât assez en sa faveur, quoiqu’elle pût reprocher au prêtre de l’avoir accusée à tort et mal à propos, elle n’en fait rien, elle ne parle que de la bonté de Dieu. Voyez que de reconnaissance chez cette servante ! Lorsqu’elle était dans la peine, elle n’avait dévoilé son infortune à personne, elle n’avait pas dit au prêtre : J’ai une rivale, et cette femme qui m’accable d’injures et d’invectives aune troupe d’enfants, tandis que moi qui vis dans la sagesse, je n’ai pu devenir mère jusqu’à ce jour : Dieu a fermé mon sein, et me voyant dans les tribulations, il n’a pas eu pitié de moi. Rien de cela : elle se tait sur la nature de son infortune, et montre seulement qu’elle est dans la peine en disant : Je suis une femme dans l’affliction : et elle n’aurait pas même proféré cette parole si le prêtre ne l’y avait forcée, en soupçonnant qu’elle était ivre. Mais lorsqu’elle est hors de cette épreuve, et que Dieu a exaucé sa prière, alors elle révèle au prêtre ce bienfait, voulant lui faire partager sa reconnaissance, comme autrefois il s’était associé à sa prière : J’ai prié, dit-elle, au sujet de ce petit