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dans la Divinité qui les a créées au commencement. Tel était notre langage : mais quelques-uns nous faisaient des objections : L’homme, disaient-ils, est donc ce qu’il y a de plus bas parmi les choses visibles, puisque le ciel, la terre, le soleil, tous les astres, ont pu garder leur forme intacte pendant un si long temps, tandis qu’au bout de 70 ans l’homme se dissout et périt. A cela nous aurions pu répondre d’abord que ce n’est point l’homme tout entier qui périt, qu’au contraire, la partie souveraine et essentielle de son être, à savoir l’âme, persiste dans l’immortalité, à l’abri de toute dissolution, et que la portion inférieure est seule sujette à la mort. Mais en second lieu cela même est pour nous une prérogative d’honneur. En effet, ce n’est point en vain, ni sans motifs, c’est justement et pour notre bien que nous sommes en butte à la vieillesse et aux maladies : justement parce que nous sommes tombés dans le péché ; pour notre bien, parce que l’orgueil, engendré en nous par le relâchement, trouve un remède dans cette faiblesse et dans ces afflictions. Ce n’est donc point pour nous abaisser que Dieu a permis cela. Car s’il eût voulu nous ravaler, il n’aurait point souffert que notre âme fût immortelle. Ce n’est point non plus par impuissance qu’il a fait notre corps tel qu’il est. Car, s’il était impuissant, il n’aurait pas su faire subsister si longtemps le ciel, les astres et la figure de la terre. Mais il a voulu nous rendre meilleurs, plus sages, plus soumis à sa volonté, ce qui est le fondement de tout salut. Voilà pourquoi, il a exempté jusqu’ici le ciel dé la vieillesse et des autres infirmités de ce genre ; en effet ce qui ne possède ni âme, ni volonté, est incapable de faillir comme de s’amender : le ciel n’avait donc pas besoin d’être ainsi remis dans la bonne voie. Mais nous, qui avons le privilège de l’âme et de la raison, nous avions besoin de la sagesse, de l’humilité que nous inspirent ces afflictions, à telles enseignes qu’à l’origine ; le premier homme, se laissa tout d’abord emporter à l’orgueil. D’ailleurs, si le ciel, aussi bien que nos corps, avait besoin d’entretien et était sujet à vieillir, chacun aurait pu accuser d’une profonde impuissance le Créateur, incapable de faire subsister un corps durant de longues révolutions d’années, mais on ne peut plus alléguer cette raison, en présence d’ouvrages qui existent depuis si longtemps.
3. En outre, le terme de notre carrière n’est point en ce monde ; lorsque nous aurons bien usé des leçons de la vie présente, Dieu ressuscitera nos corps au sein d’une gloire plus grande : il les rendra plus éclatants que le ciel, que le soleil, que toutes les autres créatures, il les appellera au repos d’en haut. Voilà donc une initiation à la connaissance de Dieu, l’étude de la création dans son ensemble. Mais il y en a une autre qui n’a pas moins de valeur, l’initiation de la conscience : ce point encore, nous l’avons exposé complètement et en détail, faisant voir comment nous pouvons nous instruire par nous-mêmes dans la science du bien et de son contraire, et comment la conscience nous révèle intérieurement tout ce qui concerne cet objet. Voilà les deux maîtres qui nous ont été donnés tout d’abord, la création et la conscience : maîtres muets qui dès lors instruisaient les hommes en silence. En effet la création, en frappant la vue de celui qui la contemple, l’amène du spectacle de l’univers à l’admiration de son auteur : et la conscience, par la voix intérieure qu’elle nous fait entendre, nous enseigne tous nos devoirs. D’ailleurs son pouvoir et ses arrêts nous sont manifestés même dans les objets visibles. En effet, lorsqu’elle porte intérieurement témoignage contre une faute, elle bouleverse extérieurement les traits du visage, et les remplit de confusion. C’est elle encore qui nous fait pâlir et trembler, lorsque nous sommes surpris dans quelque action déshonorante : et quand bien même la voix reste muette, l’expression visible des traits rend manifeste l’indignation du juge intérieur. Outre ces deux précepteurs, la raison – nous démontre que la sollicitude de Dieu nous en a donné un troisième, non plus un précepteur muet comme les précédents, mais un conseiller doué de la parole, qui règle nos pensées par ses avis. Quel est ce nouvel instituteur ? Le père assigné à chacun de nous. En effet, si Dieu a voulu que nous fussions aimés par nos parents, c’est pour que nous ayons des maîtres de vertu. Car ce qui fait le père, ce n’est point seulement l’acte d’engendrer, c’est encore une bonne éducation, de même que pour être mère, il ne suffit point d’avoir enfanté, il faut encore savoir nourrir. Que je dis la vérité, que ce n’est point le sang, mais la vertu qui fait les pères, c’est ce dont les parents eux-mêmes conviendraient avec nous. En effet, voient-ils leurs fils se pervertir