Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 5, 1865.djvu/47

Cette page n’a pas encore été corrigée

en eux la vie de la charité. C’est pourquoi il écrit aux Philippiens : Que chacun ait en vue non ses propres intérêts, mais ceux des autres ; et parlant aux Corinthiens, il dit : Tout m’est permis, mais tout n’édifie pas. (Phil. 2,4 … 1 Cor. 10,23) Admirez la sagesse de l’Apôtre ! Quoiqu’il me soit libre, dit-il, de faire certains actes qui ne sauraient m’être préjudiciables, je m’en abstiendrai, si mon frère doit en être mal édifié. Voyez donc combien le cœur de Paul nous aime, et comme il oublie ses propres intérêts afin de nous prouver de mille manières que la première de toutes les vertus est de nous appliquer à édifier le prochain. Instruits à l’école d’un : tel maître, observons ses préceptes, je vous en conjure, et évitons tout ce qui pourrait être pour nos frères une occasion de perdre leurs richesses spirituelles. Oui, ne faisons jamais rien qui cause à nos frères le moindre dommage. Car le mauvais exemple rend notre péché plus grave, et nous expose à de plus rigoureux supplices. Ne méprisons personne, serait-ce le dernier de nos frères ; et ne disons jamais cette, froide parole : Peu m’importe qu’un tel se scandalise. Comment ! peu m’importe, dites-vous ? Mais Jésus-Christ ne veut-il pas que nos bonnes œuvres luisent au-dehors afin que ceux qui les voient en soient édifiés et qu’ils glorifient le Seigneur ? Et vous, tout au contraire, bien loin de procurer la gloire de Dieu, vous êtes cause qu’on la blasphème, et vous n’en avez aucun souci ! Cette conduite est-elle digne d’un chrétien pieux et instruit de sa religion ?
3. Au reste que ceux qui jusqu’ici se sont abandonnés à cette pernicieuse coutume, se corrigent aujourd’hui sur nos pressantes invitations, et s’abstiennent désormais de toute parole peu édifiante. Que chacun s’étudie donc à ne rien faire dont l’œil du Seigneur, œil toujours ouvert et toujours vigilant, soit blessé, ou que sa propre conscience lui puisse reprocher comme une occasion de scandale et de blasphème pour tous ceux qui en seraient témoins. Si nous agissons en toutes choses avec ces précautions, nous attirerons sur nous les miséricordes du Seigneur, et nous éviterons, les embûches du démon. Car en nous voyant ainsi attentifs et vigilants, il perdra toute espérance de nous vaincre, et se retirera honteusement. Mais cet exorde est assez long, et il est temps de servir à votre charité comme un festin spirituel en vous expliquant, le passage de la Genèse qui vient d’être lu. Voyons donc ce que Moïse veut aujourd’hui nous apprendre, ou plutôt l’Esprit-Saint qui nous parle par sa bouche.
Et Dieu dit : que les eaux produisent des animaux vivants qui nagent dans l’eau, et des oiseaux qui volent sur la terre, sous le firmament du ciel ; et il fut fait ainsi. Admirez ici avec quelle bonté le Seigneur nous fait connaître l’ordre et la suite des œuvres de la création. D’abord il nous a révélé comment, à son ordre, la terre avait épanché de son sein ses diverses productions ; puis il nous a raconté la formation de ces deux grands corps lumineux, auxquels il joignit la variété des étoiles qui ornent le ciel de leur brillant éclat ; et aujourd’hui, passant à l’élément des eaux, il nous apprend qu’à sa parole et son commandement elles produisent elles-mêmes des animaux, vivants : Que les eaux, dit-il, produisent des animaux vivants qui nagent dans l’eau, et des oiseaux qui volent sur la terre, sous le firmament du ciel. Mais quelle parole, je vous le demande, pourrait raconter dignement ce prodige ! et quelle langue suffirait à louer cette œuvre d’un Dieu créateur ! il avait dit seulement : que la terre produise des plantes, et soudain la terre s’était couverte des plus riches productions ; et aujourd’hui il dit : que les eaux produisent. Ces deux commandements furent suivis des mêmes effets ; là il avait dit : que la terre produise des plantes ; et ici il dit : que les eaux produisent des animaux vivants. Mais de même qu’à son premier ordre : que la terre produise, la terre avait enfanté les plantes et les fleurs, les moissons et toutes les autres productions si variées et si nombreuses ; ainsi à ce second ordre : que les eaux produisent des animaux vivants qui nagent dans l’eau, et des oiseaux qui volent sur la terre, sous le firmament du ciel, on vit apparaître les poissons et les oiseaux en si grand nombre qu’on ne saurait les compter. Mais autant la parole du Seigneur est brève et concise, autant les espèces des poissons et des oiseaux sont nombreuses et variées. Et ne vous en étonnez pas, mon cher frère, puisque c’était la parole de Dieu, et que cette parole est toujours efficace et créatrice.
Vous voyez maintenant comment toutes les créatures ont été tirées du néant ; vous voyez aussi avec quelle bonté Dieu nous révèle la suite de ses œuvres, et avec quelle condescendance il se proportionne à notre faiblesse. Et en