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Dieu m’est apparu à Luva, et il m’a promis de me donner toute cette terre à moi et à ma race, et de faire devenir ma race une assemblée de peuples. Quoiqu’il ait des preuves aussi évidentes de la bienveillance de Dieu envers lui, il conserve néanmoins un cœur humble, et dit : Dieu, devant la face duquel mes pères, Abraham et Isaac, ont trouvé grâce. Puis il reprend : Dieu gui me nourrit depuis mon enfance. Considérez ici encore la grandeur de sa reconnaissance. Il ne parle pas de son mérite personnel, mais il raconte les bienfaits qu’il a reçus de Dieu, et il dit : Dieu qui m’a nourri depuis mon enfance jusqu’à ce jour. Car c’est lui-même qui a dirigé mes affaires depuis le commencement jusqu’à l’époque présente. C’est ainsi que tout récemment encore il disait : J’ai traversé le Jourdain avec mon bâton ; et maintenant je retourne avec ces deux bandes. (Gen. 32,10) il dit encore la même chose en d’autres termes : Celui qui m’a nourri depuis mon enfance jusqu’à ce jour, l’ange qui m’a délivré de tous les maux. Ce sont les paroles d’une âme reconnaissante, d’une âme qui aime Dieu et qui conserve dans sa mémoire le souvenir des faveurs divines. Celui, dit-il, à qui mes ancêtres ont plu, celui qui m’a nourri depuis mon enfance jusqu’au moment présent, qui dès le principe m’a délivré de tous les maux, qui a montré pour moi une si grande sollicitude, Celui-là bénira ces enfants ; et ils porteront mon nom et le nom de mes pères, Abraham et Isaac, et ils se multiplieront très-abondamment sur la face de la terre. (Id. 16) Voyez-vous quelle est sa sagesse, et en même temps quelle est son humilité ? Sa sagesse, parce que prévoyant l’avenir par les yeux de la foi, il a préféré Ephraïm à Manassé ; son humilité parce qu’il n’a fait aucune mention de son mérite personnel, mais qu’il s’est appuyé sur la sainteté de ses ancêtres, et sur les bienfaits que lui-même avait reçus, pour demander et implorer la bénédiction du ciel sur ses fils. C’est ainsi que qui prévoyait les événements futurs, leur donna sa bénédiction. Mais Joseph voyant le plus jeune préféré a l’aîné, en eut du déplaisir et dit : Voici le premier-né : mets ta main droite sur sa tête. Jacob refusa et dit : Je le sais, mon fils, je le sais. Le premier-né deviendra aussi un peuple, et même il sera grand ; mais une plus grande gloire est réservée à son jeune frère, et sa postérité sera une multitude de nations. (Id. 17-19) Ne crois pas, dit-il, que j’aie agi ainsi sans motif, au hasard, ou par ignorance. Je le sais, et c’est parce que je prévois les événements futurs, que j’ai donné ma bénédiction au plus.jeune. La nature, il est vrai, a donné la prééminence à Manassé, mais son frère sera plus illustre que lui, et sa postérité sera une multitude de nations. Jacob agit ainsi parce que de lui devait naître un roi. Il prédisait déjà l’avenir, c’est pourquoi il lui donna ainsi sa bénédiction. Et il les bénit, et dit : Israël sera béni en vous, et l’on dira : Que Dieu te fasse semblable à Éphraïm et à Manassé ! Et il préféra Ephraïm à Manassé. Tous deux, dit-il, seront si illustres que tous souhaiteront d’arriver à une telle gloire ; cependant Ephraïm surpassera Manassé. Voyez-vous comment la grâce divine lui révélait d’avance l’avenir, comment, animé par un souffle prophétique, il bénit les enfants de Joseph ? Car les événements qui ne devaient s’accomplir qu’après un si long temps, il les voyait comme déjà présents et placés sous ses yeux. Tel est l’esprit prophétique.

De même que les yeux du corps ne peuvent rien apercevoir de plus que les choses visibles, de même les yeux de la foi ne regardent pas les événements visibles, mais ils se représentent ceux qui doivent s’accomplir dans la suite après plusieurs générations. Et cela, vous le verrez plus exactement par les bénédictions qu’il donne à ses propres fils. Mais pour ne pas étendre notre discours, et ne pas vous imposer une trop lourde tâche, contentons-nous de ce qui a été dit, et réservons pour le discours suivant la bénédiction qu’il donna à ses enfants. Toutefois j’invoquerai votre charité pour vous exhorter à imiter ce juste, et à laisser à vos enfants des héritages, qui ne puissent recevoir de personne aucun dommage. Car souvent les richesses ont causé la ruine de ceux qui les avaient reçues, et leur ont suscité des embûches et de nombreux périls ; mais ici il n’y a jamais rien de tel à redouter. En effet c’est un trésor qui ne peut ni s’épuiser, ni se consumer c’est un trésor qui ne peut être amoindri ni par les embûches des hommes, ni par une attaque de brigands, ni par la perfidie des serviteurs, ni par aucun moyen que ce soit ; mais il nous reste continuellement, car il est spirituel, et n’est pas exposé aux embûches des hommes. Si ceux qui l’ont reçu veulent demeurer sages, il les accompagnera dans la vie future et leur préparera d’avance des tabernacles éternels.