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des saisons, la stérilité, dont parfois la terre est frappée, un grand nombre d’autres accidents ; les sauterelles infestant les campagnes ; la nielle, tous les fléaux qui, souvent, trompent son attente ; si l’espérance qui le soutient, lui fait braver tout et confier hardiment à la terre ce qu’il a mis en réserve : à bien plus forte raison, nous, qui avons des réserves inutiles, dépensons-les utilement, pour les pauvres, pour nourrir les malheureux ; et cela, puisqu’il n’est pas à craindre que l’espérance nous trompe, ni que la terre, ici, soit stérile. Ne savez-vous pas ce que dit le texte : Il a dispersé, il a donné aux pauvres, (Ps. 111,9) Écoutez encore la suite : Sa justice demeure éternellement. O l’admirable semeur ! il a fait, en quelques instants, sa distribution, et c’est dans l’éternité des siècles que sa justice demeure. Qui a jamais vu opération plus heureuse ? Aussi, je vous en conjure, acquérons, nous aussi, la justice qui vient de l’aumône, afin que, de nous aussi, on puisse dire : ils ont dispersé, ils ont donné aux pauvres ; leur justice demeure, éternellement. Quand le texte dit : Il a dispersé, il a donné, vous pourriez croire que ce qui a été dispersé, est perdu ; voilà pourquoi le texte aussitôt ajoute, Sa justice demeure éternellement, c’est-à-dire, par suite de cette, dispersion, il faut qu’une justice demeure, dont rien ne triomphe ; une justice qui s’étende dans toute la durée des siècles, sans jamais rencontrer de fin. Et, avec l’aumône, pratiquons aussi, ardemment, les autres vertus ; réprimons les passions de la chair : bannissons de notre âme toute illégitime concupiscence, toute pensée mauvaise : la colère, la haine, l’envie ; parons, de tous.les ornements, la beauté de notre âme ; par l’éclat de cette beauté, concilions-nous ; l’amour du Dieu du ciel, et puisse-t-il habiter avec nous ! Aussitôt qu’il verra les grâces aimables de notre âme, vite il viendra vers nous ; c’est lui qui fait entendre ces paroles. Sur qui jetterai-je les yeux, sinon sur l’homme, doux et paisible, et humble, qui écouté mes paroles avec tremblement. (Is. 66,2) Voyez-vous comme le prophète nous apprend les couleurs spirituelles qui peuvent rendre éclatante la beauté de l’âme ? Sur l’homme doux, dit-il, et paisible et humble. Ensuite, il ajoute la cause qui produit cet étai : Et qui écoute mes paroles avec tremblement. Que signifie : qui écoute mes paroles avec tremblement ? C’est, l’obéissance, qui réalise dans sa conduite les commandements de Dieu, comme le dit l’Écriture, en un autre endroit : Heureux l’homme qui est toujours dans la crainte, à cause de la piété (Prov. 28,14) Nous-mêmes, quand nous voyons un serviteur accomplir nos ordres, avec un soin qu’anime la crainte de nous déplaire, un serviteur tremblant devant nous, nous lui marquons une affection, une sympathie plus grande ; c’est ce qui est bien plus vrai, de la bonté du Seigneur, à notre égard. De là, ces paroles : Je jetterai les yeux sur l’homme doux et paisible et qui écoute mes commandements avec tremblement. Tremblons donc, je vous en conjure, nous aussi ; et, pénétrés d’une grande crainte, accomplissons ses paroles ; car ses paroles ce sont les préceptes qu’il nous a transmis. Instruits de ce qui lui plaît, de ce qu’il approuve, mettons-nous à l’ouvrage, et appliquons-nous à lui être agréables ; montrons un grand amour de la paix, une grande mansuétude, une grande humilité ; accomplissons tous ses préceptes avec respect et avec crainte, afin qu’il approuve les dispositions de notre âme ; afin que, touché de notre obéissance, il daigne encore jeter les yeux sur nous. Si nous avons ce bonheur, nous jouirons de la parfaite sécurité ; car ces paroles : Je jetterai les yeux, veulent dire, j’entourerai de ma providence, je fendrai la main, je porterai secours, en toutes circonstances, j’épancherai l’abondance de ma libéralité. Pratiquons donc, en toutes choses, cette conduite, je vous en conjure, afin que le Seigneur jette les yeux sur nous ; afin que nous passions sans tristesse la vie présente, et que nous puissions posséder les biens à venir, par la grâce et par la bonté de Notre-Seigneur. Jésus-Christ, à qui appartient, comme au Père, comme au Saint-Esprit, la gloire, l’empire, l’honneur, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.
Traduit par M. PORTELETTE.