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cultivât et qui, pour la couvrir de sillons, pliât le bœuf au joug de la charrue ; mais elle entendit le commandement du Seigneur et soudain produisit les plantes et les arbres. D’où nous apprenons qu’aujourd’hui encore, ce sont bien moins les soins, les travaux et les fatigues du laboureur qui fertilisent la terre, que les ordres que le Seigneur lui intima dès le commencement.
Au reste, l’Écriture, pour rendre d’avance l’ingratitude des hommes vraiment inexcusable, nous révèle avec soin l’ordre et la suite des œuvres de la création. Elle veut ainsi réprimer la témérité et l’extravagance de ceux qui nous donnent leurs rêveries pour des réalités, et qui soutiennent que la coopération du soleil était nécessaire à la production des plantes et des fruits. D’autres attribuent ces effets à l’influence des astres ; mais l’Esprit-Saint nous enseigne que, bien avant la création du soleil et des astres, la terre, obéissant à la parole divine, avait, sans nul concours étranger, produit d’elle-même les plantes et les arbres ; il lui avait suffi d’entendre cette parole : Que la terre produise les plantes verdoyantes. Suivons donc les traces de la sainte Écriture, et condamnons hautement ceux qui s’élèvent contre ses divins enseignements. Quoique les hommes cultivent la terre, et, à l’aide d’animaux domestiques, s’appliquent à l’agriculture ; quoique les saisons leur soient favorables et que tout concoure à satisfaire leurs désirs, si Dieu ne répand sa bénédiction, ils s’épuiseront en d’inutiles travaux. Oui, ni les sueurs, ni les fatigues du laboureur ne deviennent fécondes si le Seigneur, du haut du ciel, n’étend sa main et ne leur donne un heureux accroissement. Mais, qui ne serait ravi d’étonnement et d’admiration en voyant comment cette parole : Que la terre produise des plantes verdoyantes, pénétra jusque dans les profondeurs de la terre et l’émailla comme d’un riche tapis parla variété des fleurs qui en couvrit la surface. Ainsi la terre qui naguère était brute et inculte, se revêtit soudain d’une brillante parure, et rivalisa de beauté avec le firmament. Et en effet, de même que celui-ci devait bientôt resplendir du feu des astres, la terre s’embellissait par la variété des fleurs ; en sorte que le Créateur lui-même loua son propre ouvrage. Et Dieu, dit l’Écriture, vit que cela était bon.
5. Moïse a soin, comme vous pouvez le remarquer, de nous rappeler, après chacune des œuvres de la création, que Dieu loue son propre ouvrage, afin d’apprendre aux hommes à remonter de la créature au Créateur. Car si les créatures sont au-dessus de toutes nos louanges, que dire de l’Ouvrier divin qui les a produites ? Et Dieu vit que cela était bon ; et du soir et du matin se fit le troisième jour. C’est pour mieux nous inculquer ces choses, que l’écrivain sacré nous les répète ici. Il lui suffisait en effet d’énoncer que le troisième jour fut fait ; mais il reprend les mêmes termes qu’il a déjà employés, et il nous dit que du soir et du matin se fit le troisième jour. Certes, ce n’est point de sa part oubli ou inadvertance ; il veut que nous ne confondions pas l’ordre des choses et que nous ne regardions pas l’approche de la nuit comme la fin du jour ; car le soir n’est que la fin de la lumière et le commencement de la nuit, tout comme le matin est la fin de la nuit et le complément du jour. C’est ce que veut nous enseigner le saint prophète Moïse, quand il nous dit : Et du soir et du matin se fit le troisième jour. Et ne vous étonnez pas, mon cher frère, que la sainte Écriture nous redise si souvent les mêmes choses ; car, malgré ses soins et ses précautions, quelques Juifs persistent dans leur erreur et soutiennent, avec l’entêtement d’un esprit aveuglé, que le soir est le commencement du jour suivant. Ils se trompent eux-mêmes, et sont encore assis dans les ténèbres, quoique la vérité se soit manifestée à tous les regards. Ils cherchent encore la lumière, quand le Soleil de justice s’est levé sur le monde. Mais, après que Moïse nous a instruits de tous ces détails avec une telle exactitude, qui pourrait supporter l’opiniâtreté de ces esprits indociles !
Leur malice recevra son juste châtiment ; mais nous, qui avons été éclairés des rayons du Soleil de justice, soyons soumis et dociles aux enseignements de la sainte Écriture. En suivant cette règle, nous renfermerons dans le secret de notre cœur une foi pure et orthodoxe, et nous mettrons tous nos soins à la conserver. Nous travaillerons également avec zèle à l’œuvre de notre salut, et nous fuirons comme un poison mortel tout ce qui pourrait blesser la sainteté de notre âme ; car la perte de la grâce sanctifiante est d’autant plus grande que l’âme l’emporte sur le corps. Le poison ne peut tuer que le corps, tandis que l’erreur entraîne pour l’âme la mort éternelle. Et quels sont donc ces poisons si dangereux ? Le nombre en est grand