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aux promesses du Seigneur ; confiance aussi solide, que si ses promesses étaient déjà accomplies. Voilà en effet la foi véritable ; elle ne s’arrête pas aux choses visibles, alors même que tout semble contredire les promesses, elle te fie uniquement au pouvoir de celui qui a promis. Mais, voyons maintenant la reconnaissance de ce juste. Jacob s’éveilla, dit le texte, de son sommeil, et dit : Le Seigneur est vraiment en ce lien-ci, et je ne le savais pas, et il fut saisi de frayeur, et il dit : Combien ce lieu est terrible ! c’est bien ici la maison de Dieu, et ceci est la porte du ciel. (Id. 16-17) Le juste est frappé de stupeur, dit le texte, ce qui est un effet de l’extrême miséricorde de Dieu, et il dit : C’est bien ici la maison de Dieu, et ceci est la porte du ciel. Ce lieu-ci s’appelle désormais pour moi, la maison de Dieu. Eh bien ! puisque j’ai été jugé digne d’une telle vision, : puisque j’ai vu pour ainsi dire, la porte du ciel, il est juste que j’offre au Seigneur l’action de grâces qui lui est due. Et Jacob se leva, et prit la pierre qu’il avait mise sous sa tête, et l’érigea comme un monument, et répandit de l’huile dessus, et Jacob appela ce lieu la maison de Dieu. Ce lieu avait un autre nom auparavant. (Id. 18-19) Après avoir été honoré d’une vision si magnifique, il en consacre le souvenir dans le nom donné au lieu ; il veut que la postérité regarde cet endroit comme un endroit fameux ; il y dresse une pierre, en manière de colonne ; sur la pierre il verse de l’huile (vraisemblablement c’était la seule chose que ce voyageur eût emportée avec lui), et il adresse au Dieu plein de bonté, une prière inspirée par la vraie sagesse.
5. Et si vous voulez, écoutons maintenant les paroles mêmes de cette prière : Et il fit ce vœu, dit le texte, en disant : Si le Seigneur, mon Dieu, demeure avec moi, s’il me protège dans le chemin par lequel je marche. Vous vous rappelez que Dieu avait dit : Je suis avec toi, et je te garderai dans le chemin par lequel tu marches. Voilà pourquoi Jacob à son tour dit : S’il m’arrive ce que tu m’as promis de me donner. Il ajoute maintenant sa prière en disant : Si Dieu me donne du pain pour manger, et un vêtement pour me couvrir ; il ne demande pas des richesses, l’abondance, le luxe, ruais du pain et un vêtement. Ce vêtement, pour se couvrir le corps ; ce pain, comme un aliment nécessaire. Considérez le caractère apostolique que sa prière révèle ; tel était l’amour de la sagesse qui remplissait l’âme de l’homme juste. Ce que le Christ disait : Ne possédez ni or ni argent, ni deux tuniques (Mt. 10,9), ce patriarche, sans aucun maître, de lui-même, l’avait appris, du maître que nous portons naturellement en nous ; et il demandait à Dieu du pain pour manger, et un vêtement pour se couvrir. Si j’ai cela, dit-il, sur la terre étrangère : Et si Dieu me ramène sain et sauf dans la maison de mon père, comme il me l’a promis, le Seigneur sera mon Dieu, et cette pierre que j’ai dressée comme un monument, sera pour moi la maison de Dieu, et je vous offrirai, Seigneur, la dîme de tout ce que vous m’aurez donné. (Id. 21-22) Voyez la sagesse du juste ; il demandait sans doute, mais rien de précieux, rien que du pain et un vêtement, et il promettait, au Seigneur, de lui donner de ses propres biens ; c’est qu’il n’ignorait pas que Dieu rivalise avec nous de munificence, que ses rétributions dépassent nos pensées ; et il dit : Cette colonne sera pour moi la maison de Dieu, et, de toutes les choses que vous me donnerez, Seigneur, je vous donnerai la dîme. Avez-vous bien compris cette sagesse d’une âme qui aime Dieu ? Il n’a encore rien reçu, et il promet de rendre, au Seigneur, la dîme des biens qui lui seront accordés.
Gardons-nous, mes bien-aimés, de passer outre, sang nous arrêter sur ces paroles ; rivalisons tous avec ce juste ; nous qui vivons sous la loi de grâce, imitons celui qui vécut avant la loi ; et ne demandons rien de ce qui est temporel au Seigneur. En effet, il n’attend pas de nous que nous l’avertissions ; il prévient même nos demandes, pour nous donner ce dont nous avons besoin. Il fait lever sors soleil sur les méchants et sur les bois ; il fait tomber sa pluie sur les justes et sur les injustes. (Mt. 5, 45) Et croyons en ses avertissements et ses paroles : Cherchez premièrement le royaume de Dieu, et toutes ces choses vous seront données par surcroît. (Mt. 6,33) Comprenez-vous qu’il nous a préparé lui-même, en don, jusqu’à ces autres biens, qu’il nous promet de nous les donner à titre de profit, et par surcroît ? N’allez donc pas demander, à titre de nécessaire, ce que vous recevrez par surcroît ; procédons avec ordre ; cherchons ce qu’il nous a commandé de chercher, afin qu’il nous soit permis de jouir et des biens nécessaires, et des autres. Voilà pourquoi le Seigneur nous a fixé, dans la prière qu’il nous a prescrite, la mesure dans laquelle nous devons demander les biens présents. Voilà les paroles qu’il nous dit de prononcer, paroles qui renferment toute la sagesse : Donnez-nous aujourd’hui notre pain quotidien (Mt. 6,41) ; l’aliment de la journée, dit-il, et telle est la prière de ce juste, quoiqu’il n’eût rien entendu de cet enseignement : Si le Seigneur me donne du pain pour manger, et un vêtement pour me couvrir. Ne lui demandons rien autre chose pour le présent, c’est une indignité de demander, à tant de générosité, à tant de pouvoir, des choses qui se dissipent avec la vie présente. Voilà ce que sont les choses humaines, les richesses, la puissance, la gloire qui vient de l’homme. Demandons ce qui subsiste toujours, les biens qui suffisent, les biens immuables. Instruits de la bonté de Notre-Seigneur, méprisons les choses présentes, attachons tout notre amour aux biens du ciel ; car s’il fait lever son soleil sur les bons et sur les méchants, s’il fait tomber la pluie sur les justes et sur les injustes, à plus forte raison aura-t-il des regards pour ceux qui s’abstiennent de la malignité, qui fuient l’injustice. Il les entourera de tous les soins de sa providence ; en toute circonstance il leur prouvera sa sollicitude. Instruits de cette vérité, mes bien-aimés, ne refusons pas notre foi aux divines promesses ; ne faisons rien de contraire à ses ordres. En vérité, à considérer notre conduite d’aujourd’hui, entre nous et les infidèles quelle différence ? Lorsque c’est Dieu lui-même qui nous garantit l’avenir, et que nous refusons de nous fier en ses paroles ; quand nous rivons nos pensées au présent, je vous le demande, quelle autre marque faut-il