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désire ; que je ne paraisse vouloir contrarier mon père, et qu’au lieu de sa bénédiction, je ne m’attire sa malédiction. Que fait donc cette admirable Rébecca, pleine d’amour pour son fils ? Comme ce n’était pas seulement sa volonté qu’elle suivait ; comme elle ne servait qu’à l’accomplissement de la volonté divine, elle fait tous ses efforts pour bannir la crainte du cœur de son enfant, pour le rassurer, pour l’amener à réaliser son dessein. Et elle ne lui dit pas qu’il peut tromper son père, que son père n’y verra rien ; que lui dit-elle ? Que cette malédiction retombe sur moi, mon, fils ; obéissez seulement à ma voix, et apportez-moi ce que je vous demande. (Id. 13) S’il arrive quelque chose de ce que vous craignez, dit-elle, vous n’en souffrirez pas ; donc, soyez sans crainte, rassurez-vous : Obéissez à ma voix, et faites ce que je vous conseille. C’est bien là le propre de l’amour maternel. Pour son enfant, elle s’expose à tout. Elle dissipa ainsi la crainte de son fils. Il sortit, prit et apporta à sa mère ce qu’elle demandait, et elle fit des plats comme Isaac les aimait. Rébecca prit ensuite, dit le texte, le plus beau vêtement de son fils aîné, qu’elle gardait dans la maison, et elle en revêtit le plus jeune de ses, fils, et, avec la peau des chevreaux, elle lui couvrit les bras et les parties du cou, qui étaient nues, et elle mit les plats et les pains, qu’elle avait faits, dans les mains de son fils ; qui le porta à son père. (Id. 14-17) Voyez, je vous, en conjure, ici, le grand amour de Rébecca, et, en même temps, sa rare sagesse. Le texte a dit plus haut que l’aîné est velu et que, le plus jeune n’a pas de poil. Voilà pourquoi, dit le texte, elle le revêtit d’un habit d’Esaü, et l’entoura de peau, et, après l’avoir, de tout point, équipe de manière à tromper son père, elle lui, mit dans les mains les plats et les pains, de sorte qu’il les porta au patriarche. Considérez, encore une fois, ici, comment tout est arrivé par la grâce d’en haut. Aussitôt que nous offrons à Dieu ce qui vient de nous, nous obtenons en abondance là coopération du Seigneur. C’est afin que nous ne tombions pas dans la nonchalance et l’abattement, qu’il veut aussi que, nous fassions quelque chose, ce n’est qu’à cette condition qu’il nous communique ses dons ; il ne veut pas que le secours d’en haut opère seul toute chose, il faut que nous travaillions de notre côté. Maintenant, il n’exige, pas que nous fassions tout ; il connaît notre faiblesse ; le Seigneur dans sa bonté, se réjouit de trouver une occasion d’être généreux envers nous, et il attend que nous fassions ce qui est en notre pouvoir. Vous en avez ici la preuve ; parce due Jacob et Rébecca ont fait ce qu’ils devaient faire ; que l’enfant a obéi aux conseils de sa mère ; que la mère a fait tout ce qui dépendait d’elle, le Seigneur, plein de bonté, se met de lui-même à l’œuvre, et s’occupe de faire réussir, de rendre facile, ce qu’il y avait de plus difficile, à savoir qu’Isaac ne s’aperçût pas de la ruse. Car, lorsque l’enfant eut apporté les mets à son père, Il lui dit : Qui êtes-vous, mon fils ? Et Jacob dit à soya père : Je suis Esaü, votre fils aîné ; j’ai fait ce que vous m’avez dit ; levez-vous, mettez-vous sur votre séant, et mangez de ma chasse, afin que vous me donniez votre bénédiction. (Id. 19) Considérez ici, je vous en conjure, l’anxiété de Jacob, en prononçant ces paroles. Il avait d’abord dit à sa mère : J’ai peur d’attirer sur moi la malédiction, au lieu de la bénédiction. Quelle frayeur ne dut-il pas éprouver, quand il jouait une telle scène ? Mais, comme c’était Dieu qui travaillait avec lui, tout réussit. Eh quoi donc, dira-t-on ? Dieu a coopéré à un pareil mensonge ? Né considérez pas simplement le fait, mon bien-aimé, mais remarquez le but ; remarquez qu’il n’y avait pas ici un intérêt temporel, poursuivi par l’avarice ; c’était la bénédiction de son père, que le jeune fils voulait attirer sur lui. D’ailleurs, si vous ne voulez jamais voir que les faits, sans considérer le but, prenez garde que l’ancien patriarche ne vous paraisse le meurtrier de son fils, et Phinée un homicide. Mais Abraham ne fut pas le meurtrier de son fils ; il l’aimait autant qu’un père peut aimer ; et Phinée ne fut pas un homicide, mais un homme plein de zèle, L’un et l’autre firent ce qui était agréable à Dieu. Aussi, l’un pour avoir obéi, a mérité, du Seigneur, une grande récompense : l’autre est célébré pour son zèle. En effet, dit le psalmiste : Phinée se leva, et il apaisa. (Ps. 105,30) Donc, si un meurtre, des fils massacrés sont des faits approuvés dans leur histoire, parce qu’ils étaient conformes à la volonté de Dieu ; si nous ne nous arrêtons pas à la réalité des faits, mais au but qu’on s’était proposé, à l’intention, à bien plus forte raison, ici, celte intention est-elle, ce qui mérite d’être considéré.