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un discernement incorruptible qui lui fait distinguer le mal d’avec le bien. Aussi sommes-nous absolument inexcusables, puisque nous ne péchons point par ignorance, mais par paresse, et mépris de la vertu.
3. Si ces vérités nous sont présentes à chaque heure du jour, nous opérerons notre salut avec une grande sollicitude, et nous craindrons, comme un réel dommage pour nos âmes, de laisser le temps s’écouler inutilement. Mais terminons ce long exorde, et écoutons, s’il vous plaît, ce qu’aujourd’hui l’Esprit-Saint veut nous enseigner par la bouche du saint prophète Moïse. Et Dieu dit : que les eaux qui sont sous le ciel se rassemblent en, un seul lieu, et que l’aride paraisse. Et il fut fait ainsi. Considérez ici, mes chers frères, l’ordre et la suite des œuvres divines. Moïse nous avait dit dès le commencement que la terre était invisible et informe, parce qu’elle était couverte par les ténèbres et les eaux. C’est pourquoi au second jour Dieu sépara les eaux par le firmament qu’il appela ciel, et au troisième il ordonna que les eaux qui étaient sous le ciel, c’est-à-dire le firmament, se rassemblassent en un seul lieu, afin que leur retraite laissât la terre à découvert. Et cela se fit ainsi. C’est parce que les eaux couvraient toute la surface de la terre que le Seigneur leur commanda de se réunir en un seul lieu ; et alors l’aride put se montrer. Voyez comme l’historien sacré nous découvre graduellement la beauté de l’univers ! Et il fut fait ainsi, dit-il. Comment ? Selon les ordres du Seigneur. Il dit, et la nature obéit soudain. Car il appartient à Dieu de régler toutes les créatures selon sa volonté.
Et les eaux qui étaient sous le ciel se réunirent en leur bassin, et l’aride parut. Déjà Moïse avait dit en parlant de la lumière que Dieu la créa lorsque les ténèbres couvraient toute la nature, et que les séparant de la lumière il avait assigné celle-ci au jour, et les ténèbres à la nuit ; et ici, il dit également que Dieu, après avoir créé le firmament, plaça au-dessus de lui une partie des eaux, et établit les autres au-dessous. Il ajoute ensuite qu’à (ordre du Seigneur celles-ci se rassemblèrent dans un même lieu, en sorte que l’élément aride parut. C’est alors que Dieu donna un nom à l’élément aride, ainsi qu’il l’avait fait pour la lumière et les ténèbres. Les eaux qui étaient sous le ciel, dit l’Écriture, se rassemblèrent en un seul lieu, et l’aride parut ; et Dieu appela l’aride, terre. Voilà donc, mes chers frères, comment Dieu déchira le voile qui rendait la terre invisible et informe ; car elle était couverte par les eaux, comme par d’épaisses ténèbres. Mais dès qu’elle put montrer sa face, il lui donna un nom.
Et Dieu appela la réunion des eaux, mer. Les eaux ont donc leur nom ; et le Seigneur, semblable au potier qui façonne un vase, et ne lui donne un nom qu’après l’avoir achevé, ne voulut imposer un nom aux éléments qu’après les avoir distribués dans les lieux qu’il leur assignait. La terre reçut donc son nom dès qu’elle parut sous la forme qu’elle devait revêtir ; et de même les eaux reçurent alors une dénomination spéciale. Car Dieu, dit l’Écriture, appela la réunion des eaux, mer ; et il vit que cela était bon. C’est parce que l’homme est trop faible pour louer dignement les œuvres divines, que l’Écriture nous prévient, et nous apprend que le Seigneur les a louées lui-même.
4. Ainsi, quand vous apprenez que le Créateur a trouvé bonnes ses créatures, vous devez les admirer souverainement, mais vous ne pouvez rien ajouter aux louanges qu’elles ont déjà reçues ; car telle est la puissance de Dieu et telle est la perfection de ses ouvrages, que nous ne saurions les louer autant qu’ils le méritent. Mais est-il étonnant que l’homme faible et ignorant ne puisse jamais ni louer dignement, ni célébrer les œuvres du Seigneur ? La suite du récit nous montre également l’ineffable sagesse du divin Ouvrier. Il vient de mettre à découvert la surface de la terre et il se hâte de l’embellir ; aussi voyons-nous qu’à sa parole, les plantes et les fleurs l’émaillent dé leurs riches variétés. Et Dieu dit : Que la terre produise les plantes verdoyantes avec leur semence, et les arbres avec des fruits qui, chacun selon son espèce, renferment en eux-mêmes leur semence, pour se reproduire sur la terre. Et il fut fait ainsi. Que signifient ces derniers mots : « Et il fut fait ainsi ? » Ils nous apprennent qu’à l’ordre du Seigneur, la terre se hâta d’épancher ses productions et de faire éclore le germe de toutes les plantes. La terre produisit donc, dit Moïse, des plantes qui portaient leur graine suivant leur espèce, et des arbres fruitiers qui renfermaient leur semence en eux-mêmes, chacun suivant son espèce. Et qui n’admirerait ici, mon cher frère, comment la parole divine a tout opéré sur la terre ? Et en effet, il n’y avait point encore d’homme qui la