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nous donne le nombre des années d’Esaü, ce qui nous permet de déterminer avec certitude l’âge d’Isaac. Voilà pourquoi le texte dit : Or, Esaü ayant quarante ans. Ensuite l’Écriture tient à nous faire connaître l’esprit inconsidéré de ce fils, prenant des épouses chez des peuples qu’il ne devait pas, fréquenter ; donc, l’une était de la race des Chettéens, et l’autre de la race des Evéens. Ce n’est pourtant pas ainsi qu’aurait dû se conduire celui qui savait quel soin le patriarche avait montré quand il prescrivait à son serviteur d’aller lui chercher une femme de sa parenté, pour être l’épouse de son fils Isaac. La mère des deux enfants d’Isaac, Rébecca était venue du pays de Charran ; Esaü n’agit pas de même, il fait voir tout de suite le dérèglement de ses mœurs ; sans consulter ses parents, il épouse ces deux femmes. Et pour nous apprendre combien leurs mœurs laissaient à désirer, l’Écriture nous dit : Et elles querellaient Isaac et Rébecca. Et qu’y a-t-il de plus détestable que cette malignité ? celles qui auraient dû montrer tant d’égards, non seulement n’en faisaient rien, mais elles étaient promptes à la dispute. Ce n’est pas sans dessein que l’Écriture nous donne tous ces détails ; comprenez bien, c’est afin que, dans la suite, quand vous verrez la préférence de Rébecca pour vous n’en soyez pas choqués. Mais n’anticipons pas, suivons l’ordre même de l’Écriture : Isaac étant devenu vieux, ses yeux s’obscurcirent de telle sorte qu’il ne pouvait plus voir. (Chap. XXVII, 1) Ses yeux, affaiblis par le grand âge, dit le texte, ne distinguaient plus les objets. Il appela donc Esaü, son fils aîné et lui dit : Mon fils, vous voyez que je suis bien vieux, et que j’ignore le jour de ma fin ; prenez donc vos armes, votre carquois et votre arc, et sortez dans la plaine, et chassez, et faites-moi de votre chasse un de ces plats que j’aime, et apportez-le-moi, afin que j’en mange, et que je vous bénisse, avant que je meure. (Id. 2, 3, 4) Ici, mon bien-aimé, je vous en conjure, remarquez l’ineffable sagesse de Dieu ; voyez comme le père ne suit que son affection naturelle en donnant cet ordre à Esaü, et comme le Tout-Puissant, le Seigneur plein de sagesse, dispose Rébecca à remplir sa prédiction, nous montrant par là ce que valent et la vertu et la douceur. Esaü avait pour lui son droit d’aînesse et l’affection de son père, et il se croyait le premier ; il a tout perdu, parce qu’il n’a pas voulu ajouter à ce qui était hors de lui, le bien qui devait venir de lui. au contraire, avec sa vertu propre, et aussi le secours de la grâce d’en haut, même malgré son père, surprend, saisit sa bénédiction. C’est qu’il n’y a rien de plus fort que l’homme soutenu par la main de Dieu, Soyez donc appliqués, attentifs ; remarquez l’excellence de cette conduite, remarquez comme celui qui s’appuie sur la divine grâce, trouve à chaque instant un grand coopérateur qui travaille dans ses intérêts, au point de lui transférer la bénédiction paternelle ; au contraire, l’autre perd tout, il se perd lui-même, parce que ses mœurs sont mauvaises. Or, dit le texte, Rébecca entendit Isaac parlant à Esaü, son fils ; et Esaü étant allé dans les champs, pour faire la chasse que son père lui avait demandée, Rébecca dit à son plus jeune fils. (Id. 6, 6) Pourquoi l’Écriture dit-elle : A son plus jeune fils? c’est parce qu’il y a plus haut : Isaac appela son fils aîné. L’Écriture veut nous faire savoir maintenant à qui s’adresse Rébecca, et le texte dit : Son plus jeune fils, c’est-à-dire Jacob. J’ai entendu, dit-elle, votre père parlant à Esaü, votre frère, et lui disant : Apportez-moi de votre chasse, et faites-m’en un plat, afin que j’en mange, et que je vous bénisse devant le Seigneur, avant de mourir. (Id. 7) Voilà ce que j’ai entendu que votre père disait à votre frère Esaü. Suivez donc maintenant, mon fils, le conseil que je vous donne ; allez-vous-en au troupeau, et apportez-moi deux chevreaux, tendres et bons, afin que je fasse à votre père, un de ces plats qu’il aime, et qu’après que vous le lui aurez présenté, et qu’il en aura mangé, votre père vous bénisse avant de mourir. (Id. 8, 9, 10)
2. Voyez le grand amour de la mère, ou plutôt la dispensation de Dieu, car c’était lui qui lui donnait ce conseil, et qui prenait soin de tout faire réussir. Avez-vous bien compris l’excellent conseil de la mère ? Voyez maintenant la circonspection de Jacob ; voyez comme sa réponse indique la douceur de ses mœurs. En effet, dit le texte : Jacob dit à sa mère : Mon frère Esaü est velu, et moi je n’ai pas de poil ; si mon père vient à me toucher, et qu’il s’en aperçoive, j’ai peur qu’il ne croie que j’ai voulu le tromper, et qu’ainsi je n’attire sur moi sa malédiction, au lieu de sa bénédiction. (Id. 11-12) Grande est l’honnêteté de l’enfant, et grand est son respect pour son père. J’ai peur, dit-il, qu’il n’arrive le contraire de ce que je