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si elle me dit : Je donnerai aussi à boire à vos chameaux, elle me montrera suffisamment, en leur donnant cette eau, la bonté de ses mœurs.
4. Remarquez, je vous en prie, mon bien-aimé, l’importance de cette action : Une jeune fille, partie pour aller à la fontaine, non seulement lui accorde sa demande, abaisse le vase qu’elle portait sur l’épaule, donne à boire à satiété à celui qui le lui demande, et cet homme est un étranger, absolument inconnu ; non seulement elle lui donné à boire à lui-même, mais elle désaltère tous ses chameaux ; elle lui montre, par des faits réels, par sa conduite, ce qu’elle a de générosité dans l’âme. Ignorez-vous qu’un grand nombre de personnes répondent souvent par des refus à de pareilles demandes ? Et à quoi bon parler ici de l’eau qui se donne ? Parfois des personnes tiennent des flambeaux ; on s’approche d’elles ; on leur demande d’attendre un instant ; de permettre qu’on allume son flambeau à leur lumière ; et elles refusent, quoiqu’il n’y ait là aucune diminution de flamme, quand vous multiplieriez à l’infini le nombre de ceux qui veulent allumer leur flambeau. Maintenant, au contraire, nous voyons une femme, une jeune fille, son vase sur l’épaule, qui, non seulement ne s’indigne pas de ce qu’on lui demande, mais accorde plus qu’on ne lui avait demandé. Elle donne à boire selon la demande qui lui est faite, et, en outre, d’elle-même, elle se hâte d’abreuver les chameaux. C’est que le Dieu plein de bonté avait entendu les prières du patriarche, et il avait envoyé son ange, et tout disposé selon la prière du serviteur. Ensuite, quand ce serviteur eut vu, par la réalité des faits, l’efficacité des prières du patriarche, eut rencontré la jeune fille qu’il désirait, reconnu la distinction de son zèle à l’égard des étrangers, voyez ce qui arrive. En effet, l’Écriture dit : Aussitôt, ayant versé dans les canaux Peau de son vase, elle courut au puits pour en tirer d’autre, qu’elle donna ensuite à tous les chameaux. (Id. 20) Voyez l’excès d’empressement. En effet, ces paroles : Aussitôt, ayant versé l’eau de son vase, elle courut au puits, marquent le zèle ardent de la jeune fille ; elle ne prend pas la fuite comme une étrangère ; elle ne se fait pas, de la modestie, un prétexte pour refuser, mais elle lui répond avec une grande douceur : Buvez, mon seigneur. (Id. 18) Réfléchissez, je vous en prie, sur le soin qu’on apportait, dans ces temps antiques, à pratiquer la modestie, jusqu’où allait l’humilité, la grande place que l’hospitalité tenait dans les mœurs d’alors. Dites-moi, quelle fortune n’est pas au-dessous de telles mœurs ? Quels sont les trésors que de telles mœurs ne surpassent pas ? Voilà la dot par excellence ; voilà les richesses infinies ; voilà le trésor inépuisable ! Donc, le sage serviteur reconnaissant la providence divine, manifeste ici : l’étudiait, dit le texte, sans rien dire, pour savoir si le Seigneur avait rendu son voyage heureux ou non. (Id. 21) Qu’est-ce à dire, l’étudiait ? Il considérait avec soin le langage même de la jeune fille, son aspect, sa démarche et tout le reste, et il attendait, pour savoir si le Seigneur avait rendu son voyage heureux ou non. Tout jusque-là, voilà ce que le texte veut dire, montrait la parfaite vertu de la jeune fille. Aussi, pour répondre à sa complaisance, au service qu’elle lui avait rendu en lui donnant de l’eau, il lui met, dit le texte : Des pendants d’oreilles et deux bracelets. (Id. 22) Et il s’informait avec soin de ce qui la concernait, et il lui demandait : De qui êtes-vous fille ? Et, Y a-t-il dans la maison de votre père un lieu pour me loger ? (Id. 23) Considérez, encore ici, la réponse de la jeune fille : Quand il lui demanda de l’eau, non seulement elle lui en donna, mais elle abreuva aussi ses chameaux ; de même ici, quand le serviteur lui demande s’il y a un lieu pour le loger, et de qui elle est fille, elle dit : Je suis fille de Bathuel ; fils de Melcha et de Nachor. (Id. 24:) Elle lui dit et le nom de son père, et le nom de son grand-père, afin que ces renseignements lui donnent plus de confiance. Voyez la candeur de la jeune fille : on lui demande le nom de son père, et elle ne se contente pas de le dire, mais elle fait connaître aussi le père de son père. – Et le serviteur lui demandait seulement s’il y avait un endroit pour le loger, elle dit, non seulement qu’il y a un endroit, mais, de plus, beaucoup de paille et de foin se trouve chez nous. (Id. 25) A ces paroles, le serviteur admira la générosité de l’accueil fait par la jeune fille aux étrangers. Et, quand il apprit qu’il ne s’était pas adressé à des inconnus, mais qu’il venait dans la maison de Nachor frère du patriarche : Le serviteur satisfait, dit le texte, s’inclina profondément et adora le Seigneur. (ibid. 26) C’est parce qu’il était content des renseignements qu’il venait d’entendre, des paroles que lui avait dites la jeune fille, qu’il adora le Seigneur, lui rendant grâces de ce qu’il avait si bien montré sa providence à l’égard du patriarche ; de ce qu’il lui avait rendu tout aisé et facile. Et il dit : Béni soit le Seigneur, le Dieu de mon seigneur Abraham, qui, n’a pas manqué de lui faire miséricorde, selon la vérité de ses promesses. (Id. 27) Après avoir vu les bonnes dispositions de la jeune fille, et avoir tout appris d’elle, de manière à ne plus avoir d’incertitude, il se fait connaître à son tour, et, tout en rendant à Dieu ses actions de grâces, il montre qu’il ne vient pas d’une maison étrangère, que c’est le frère de Nachor qui l’a envoyé dans ce pays. A ces paroles,