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elle était assise vis-à-vis de l’enfant ; et l’enfant se mit à pleurer. (Id. 16) Mais maintenant le Dieu de miséricorde et de bonté, plus tendre pour nous qu’un père, qu’une mère : Entendit la voix de l’enfant, du lieu où il était. (Id. 17) Il eut pitié de l’enfant, il eut compassion du malheur d’Agar, il lui permit de faire seulement l’épreuve de la solitude, et aussitôt il lui accorda son secours. Et un ange de Dieu, du haut du ciel, appela Agar et lui dit : Que faites-vous, Agar ? Ne craignez point, car Dieu a entendu la voix de l’enfant du lieu où il est. Levez-vous, prenez l’enfant, et tenez l’enfant, parce que je le rendrai chef d’un grand peuple. (Id. 17, 18) O miséricorde du Seigneur ! Quoiqu’elle ne fût qu’une servante, il ne l’a pas méprisée ; mais, parce qu’il avait fait une promesse au patriarche, et parce qu’Ismaël était sorti de lui, il a montré, à cette mère aussi, sa grande sollicitude. Il lui dit Agar, que faites-vous-là ? Ne craignez point, car Dieu a entendu la voix de l’enfant. Levez-vous, prenez l’enfant, et tenez-le par la main, parce que je le rendrai chef d’un grand peuple. Cessez de vous affliger, dit-il, de ce qu’on vous â chassée ; l’intérêt que je porte à l’enfant est si grand, qu’il sera, lui aussi, le chef d’un grand peuple. Et, en même temps, dit le texte : Dieu lui ouvrit les yeux. (Id. 19) Ce n’est pas qu’elle fût aveugle auparavant, mais c’est qu’il ne lui servait de rien d’ouvrir, les yeux, avant la visitation d’en haut. Voilà pourquoi, voulant manifester la providence du Seigneur, le texte dit : Dieu lui ouvrit les yeux, c’est-à-dire, éclaira son ignorance, réveilla sa pensée, lui montra là direction à prendre, lui fit voir un lieu où se trouvaient des sources d’eau vive. Et, dit le texte, ayant aperçu un puits plein d’eau vive, elle y alla, y remplit son vase, et en donna à boire à l’enfant. Dans les endroits sans chemin frayé, il lui montra le chemin ; à cette âme inquiète, qui n’avait plus d’espoir de salut, Dieu montra sa généreuse clémence : il la consolait, et il prenait soin de l’enfant. Ainsi, toutes les fois que c’est la volonté de Dieu, fussions-nous dans la solitude, réduits aux plus cruelles afflictions, sans aucune espérance de salut, nous n’avons pas besoin d’autre aide ; le divin secours nous fournit tout. Si nous avons conquis l’affection du Seigneur, rien ne prévaudra contre nous ; nous serons supérieurs à tout. Et Dieu était avec l’enfant, dit le texte, et l’enfant grandit, et demeura dans la solitude. (Id. 20) Ainsi, quand nous avons pour nous la bienveillance du Seigneur, fussions-nous dans un désert, nous vivons dans une sécurité bien plus grande que les habitants des cités ; c’est que la plus grande des sûretés, le mur inexpugnable ; c’est le secours de Dieu. Et voulez-vous la preuve, que l’habitant des solitudes est plus en sûreté, est plus puissant que ceux qui vivent au milieu des cités, forts de l’appui qu’ils attendent d’un grand nombre d’hommes ? Voyons, d’une part, David, passant d’un lieu dans un autre, errant, vagabond, mais fort parce qu’il s’appuie sur le bras d’en haut ; Saül, au contraire, au milieu des cités, à la tête d’une armée si nombreuse, avec tant ale satellites et de gardes autour de lui, tremblait, redoutait chaque jour les pièges de ses ennemis. (1Sa. 17) Et celui qui était seul, sans personne à ses côtés, n’avait pas besoin de l’appui que prêtent les hommes ; et cet autre, avec son diadème, avec sa pourpre, avait besoin du secours du vagabond ; il fallait, au roi, le bras du berger ; au front portant diadème, l’aide de l’homme obscur.
3. Mais, si vous voulez, reprenons d’un peu plus haut la suite de cette histoire. Voyons-la tout entière, afin d’apprendre qu’il n’y a rien de plus fort que l’homme qui s’est fait un rempart de la grâce d’en haut ; rien de plus faible que celui qui en est privé, fût-il entouré d’armées sans nombre. Eh bien ! donc, ce David encore tout jeune, que son âge retenait dans la maison de son père, le moment étant arrivé de révéler son courage,- fut envoyé par son père auprès de ses frères ; il obéit, et alla les trouver. Arrivé auprès d’eux pour les visiter, il vit la guerre qui se faisait contre l’étranger Goliath ; tout le peuple frappé de terreur avec Saül, le roi lui-même dans le plus grand danger. Il voulut alors, comme simple spectateur, voir, et il s’en alla voir, étrange et incroyable spectacle, un seul homme tenant tête à tant de milliers d’hommes. Pour ses frères, ils ne supportèrent pas les élans de son courage, ils conçurent de l’envie : N’es-tu pas venu pour un autre motif que pour voir la guerre ? (1Sa. 17,28) Il paraît que tu n’es pas venu pour nous voir ? Attention, ici, remarquez sa sagesse et sa douceur. Aucune parole irréfléchie, nulle amertume dans la réponse qu’il leur fait ; pour apaiser leur colère et calmer leur envie, il leur dit : Est-ce qu’il n’est pas permis de parler? (Id. 29) M’avez-vous vu, leur dit-il, prendre les armes ? Est-ce que