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de pourpre, le diadème au front, allait partout, cherchant le prophète, et à ce roi son royal pouvoir ne servait Ae rien. Et maintenant, considérez la bonté du Seigneur. Comme il vit le zèle ardent de son prophète, et le rigoureux châtiment qui frappait toute la terre, pour le soustraire à ces douleurs, pour qu’il ne partageât pas la punition due à la malignité, il lui dit : Allez à Sarepta, chez les Sidoniens, là je commanderai à une femme veuve de vous nourrir. Élie aussitôt s’en alla à Sarepta. (1R. 17,9-10) Voyez, mon bien-aimé, la grâce de l’Esprit : hier, tout notre entretien a été consacré à l’hospitalité ; aujourd’hui cette veuve hospitalière sera le complément de notre discours. Et il alla, dit le texte, auprès de cette veuve, et il l’aperçut ramassant du bois, et il dit : donnez-moi un peu d’eau et je boirai ; cette femme obéit. Et il lui dit encore : Faites-moi des pains sous la cendre, et je mangerai. (Id. 11) Cette femme lui découvre son extrême indigence, disons mieux, son ineffable opulence. Car la grandeur de sa pauvreté révèle la grandeur de ses richesses. Et elle lui dit : Votre servante n’a plus qu’une poignée de farine et un peu d’huile, dans un vase ; et nous mangerons, mes enfants et moi ; et nous mourrons. (Id. 12) Paroles d’une tristesse touchante, qui attendriraient une pierre. Nous n’avons plus, dit-elle, aucun espoir de salut ; à nos portes, la mort ; nous n’avons plus, pour nous soutenir, que ce qui suffira, à peine, à mes enfants et à moi ; j’ai fait ce que je pouvais ; je vous ai donné de l’eau. Mais maintenant, voulez-vous comprendre tout ce qu’il y a, dans cette femme, de vertu hospitalière, et tout ce qu’il y a de sainte confiance, dans l’homme juste, voyez ce qui arrive. Quand le prophète eut bien tout reconnu (or rien ne se faisait, qu’afin de nous révéler la vertu de cette femme, car Dieu qui avait dit : Je commanderai à une femme de vous nourrir, c’était lui, qui, en ce moment opérait par l’entremise de son prophète), l’homme de Dieu dit : Faites pour moi d’abord, et je mangerai ; et ensuite, pour vos fils.
Écoutez toutes, ô femmes, vous chez qui les richesses abondent, et qui dépensez votre opulence à tant de choses inutiles, et qui, après avoir bien joui de vos frivolités, ne pouvez pas vous décider à donner deux oboles à l’indigent, ou à l’homme vertueux et pauvre, qui sous implore au nom de Dieu. Cette veuve ne possède rien de votre luxe ; elle n’a qu’une poignée de farine, et déjà elle croit assister à la mort de ses enfants. À ces mots du prophète : Faites pour moi d’abord, et ensuite pour vous et pour vos enfants, elle ne s’indigne pas, elle n’hésite pas, elle fait ce qui lui est commandé ; elle nous montre à tous, que nous devons préférer, à notre bien-être, le soin des serviteurs de Dieu ; que nous devons nous appliquer à mériter le salaire considérable dont nous serons récompensés quand nous aurons accompli ce devoir. Contemplez cette veuve ; pour une poignée de farine, pour un peu d’huile, quel grenier inépuisable elle s’est construit ! (1R. 17,14) Après qu’elle eut nourri le prophète, elle vit que rien ne manquait, ni à sa poignée de farine, ni à l’huile qu’elle avait dans son vase ; et cependant la famine dévorait toute la terre. Or, voilà qui est un sujet d’admiration, d’étonnement, c’est que, dès cet instant elle n’avait plus que faire de se fatiguer ; elle trouvait toujours sous sa main, et la farine et l’huile ; elle n’avait pas besoin de cultiver les champs, d’associer les bœufs à ses travaux : pas besoin d’aucun autre labeur ; il lui était donné de jouir de cette merveilleuse abondance qui démentait la nature. Et il y avait un roi, couronne en tête, qui s’inquiétait, qui soutirait de la faim, tandis que cette veuve, privée de toutes ressources, mérita, pour avoir accueilli le prophète, et obtint un inépuisable trésor. Voilà pourquoi le Christ disait : Celui qui reçoit un prophète en qualité de prophète, recevra la récompense du prophète. (Mt. 10,41) Vous avez vu hier ce qu’a valu au patriarche l’hospitalité généreusement pratiquée par lui, et l’empressement et l’ardeur de son zèle ; voyez maintenant cette femme de Sidon, possédant tout à coup de grandes richesses ; c’est que la langue du prophète, qui commandait au ciel, fit en sorte que cette poignée de farine et ce vase d’huile devinssent des sources d’une intarissable richesse.
7. Hommes et femmes, imitons donc cette veuve ; je voudrais, oui, je voudrais vous conduire, vous élever jusqu’à ce prophète, vous enflammer de son zèle, vous inspirer le désir d’égaler sa vertu. Mais cette vertu vous paraît lourde à portes ; ce n’était pourtant qu’un homme, revêtu de chair comme nous, de la même nature que nous ; mais il contribua largement des ressources de son âme ; il sut ce que c’est que d’embrasser la vertu ; par là il obtint la grâce d’en haut. Tournons ailleurs