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Dieu adresse au patriarche : Tout mâle sera circoncis chez vous, et ce sera le signe de l’alliance entre moi et vous. Le garçon de huit jours sera circoncis. Et si quelqu’un n’est pas circoncis, son âme périra, parce qu’il aura violé mon alliance. Nous avons terminé là ce que nous avons dit de la circoncision ; et, afin de ne pas vous fatiguer l’esprit par trop de paroles, nous ne sommes pas allé plus loin. En effet, notre seule intention n’est pas de parler beaucoup et puis de partir ; nous voulons mesurer à vos forces l’instruction contenue dans nos discours, afin que vous rapportiez chez vous quelque fruit de nos paroles. Voici donc les restes de ce discours ; nous allons voir, après le précepte de la circoncision, ce que le Dieu de bonté dit au patriarche. Et Dieu dit à Abraham : Sara ta femme ne s’appellera plus Sara, mais Sarra sera son nom. De même qu’en ajoutant une lettre à ton nom, j’ai montré que tu serais père de beaucoup de nations, de même j’ajoute une lettre à celui de Sara, afin de faire voir que le temps approche où les promesses que je t’ai faites autrefois seraient accomplies. Sarra sera son nom. Je la bénirai et je te donnerai un fils d’elle, et je le bénirai, et il sera le chef d’une nation, et les rois des nations sortiront de lui. J’ai ajouté une lettre pour t’apprendre que toutes mes paroles vont se réaliser. Ne te décourage pas en songeant à la faiblesse de la nature, mais considère plutôt jusqu’où va ma puissance et prends confiance à ce que j’ai dit : Je la bénirai et je te donnerai un fils d’elle, et je le bénirai, et il gouvernera les nations, et les rois des nations sortiront de lui.

Une pareille prédiction dépassait la nature humaine ; c’était comme si l’on avait promis de faire des hommes avec des pierres. Car ils ne différaient en rien des pierres au point de vue de la génération. La vieillesse du patriarche le rendait presque impuissant et incapable d’avoir des enfants ; quant à Sara, outre sa stérilité, elle était beaucoup trop avancée en âge. Mais le juste, lorsqu’il entendit ces paroles, était persuadé que Dieu avait déjà réalisé sa promesse à propos d’Ismaël. En effet, dans ces paroles : Je donnerai cette terre à toi et à ta race, Dieu n’indiquait pas d’une manière précise le fils que Sara devait avoir, Abraham croyait donc que la promesse était déjà accomplie. Maintenant, quand le Seigneur lui dit : Je bénirai Sarra et je te donnerai un fils d’elle, et je le bénirai, et il gouvernera les nations ; puis, de plus : les rois des nations sortiront de lui ; ne sachant que dire (car un homme aussi pieux ne pouvait douter des paroles de Dieu), songeant à sa vieillesse et à la stérilité persistante de Sara, anéanti et stupéfait par la promesse de Dieu, il tomba sur sa face et se mit à rire.

2. Devant cette promesse inouïe, devant la puissance de celui qui la faisait, il tomba sur sa face et se mit à rire, c’est-à-dire qu’il fut rempli de joie. Il cherchait dans ses réflexions comment il pouvait s’accorder avec l’ordre des choses humaines qu’un centenaire eût un fils et qu’une femme stérile, et nonagénaire devînt tout à coup féconde. Telles étaient ses pensées, mais sa langue n’osait les énoncer ; seulement il montra sa reconnaissance en priant pour Ismaël, comme s’il disait : Seigneur, vous m’avez assez consolé et vous avez changé en joie par la naissance d’Ismaël la douleur que j’avais d’être sans postérité. Après sa naissance je n’ai jamais cru ni même imaginé que j’aurais un fils de Sara ; elle-même ne s’y attendait pas et en avait abandonné toute espérance, puisqu’elle m’avait donné Agar. Nous avons eu tous deux une grande consolation par la naissance d’Ismaël. Que ce fils, qui m’a été donné par vous, vive devant votre face, et nous aurons assez de bonheur ; et sa présence consolera notre vieillesse. Que répond à cela ce Seigneur si bon ? Comme il avait éprouvé depuis longtemps la piété du juste et la foi de Sara, comme il voyait qu’ils n’attendaient rien d’eux-mêmes, l’un à cause de sa vieillesse, l’autre à cause de son âge et de sa stérilité, il dit, cela vous paraît complètement impossible : c’est pour cela que j’ai attendu si longtemps ; vous saurez ainsi que les faveurs dont je dispose sont bien au-dessus de la nature humaine ; tout le monde saura comme vous par ces prodiges que je suis le Maître de la nature, qu’elle obéit à toutes mes volontés et cède à tous mes ordres. Moi qui ai tiré l’être du néant, je puis, à bien plus forte raison, corriger la nature quand elle est imparfaite. Pour te donner confiance, écoute et rassure-toi, reçois un gage certain de ma parole. Voici ta femme Sara, que tu crois incapable d’enfanter à cause de sa stérilité et de sa vieillesse : elle te donnera un fils, et pour que tu n’en doutes pas, je te dirai même son nom d’avance. Ton fils encore à naître s’appellera Isaac. Je ferai alliance avec