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toutes leurs victoires, quand ils s’étaient jetés sur tant de nations, qu’ils avaient défait les Amalécites et tous les autres peuples, qu’enfin ils avaient attaqué les Sodomites, les avaient mis en fuite et avaient pillé tout ce qui leur appartenait. Voilà pourquoi l’Écriture nous a raconté tout cela plus haut en signalant leur courage pour nous apprendre que le patriarche ne le savait pas vaincus parla force corporelle, mais par sa confiance en Dieu, dont le secours céleste avait tout fait. Il n’eut pas besoin d’armes, de flèches, de lances, d’arcs, de boucliers, il ne lui fallut que ses domestiques.
Mais, dira-t-on, pourquoi prendre trois cent dix-huit domestiques ? Pour montrer qu’il n’emmenait pas tous ses serviteurs indistinctement, mais ceux qui étaient nés dans la maison, avaient été nourris avec Loth, afin qu’ils fussent plus portés à le venger, tout en combattant pour leur maître. Voyez, je vous prie, comme l’infinie puissance de Dieu leur donne une victoire rapide. Il tomba sur eux, la nuit, avec ses domestiques, il les battit et les chassa. La main d’en haut agissait et combattait avec eux. Aussi n’eut-il pas besoin d’armes ni de machines : à peine se fut-il montré avec ses gens qu’il battit les uns, chassa les autres, sans crainte et sans obstacle, ramenant les chevaux du roi de Sodome, et son neveu Loth avec tout ce qui lui appartenait et les femmes qui dépendaient de lui. Vous voyez pourquoi Dieu a permis que Loth fût seul fait prisonnier tandis que les autres s’étaient enfuis. C’était pour faire éclater la vertu du patriarche et aussi pour sauver, par lui, bien des personnes. Il revint, remportant un trophée glorieux, ramenant Loth, les chevaux, les femmes, toutes les richesses, disant à haute voix et de manière à se faire mieux entendre qu’une trompette que ce n’était point une puissance humaine ni une force corporelle qui avait défait les ennemis et lui avait donné la victoire, mais que le bras d’en haut avait tout fait. Vous voyez que tous les événements servent à l’illustration du juste, et que toutes les circonstances montrent la Providence dont il est honoré. Voyez encore comme sa piété sert de leçon aux habitants de Sodome. Le roi de Sodome arriva à sa rencontre quand il revenait de battre Chodologomor et les rois qui l’accompagnaient. Voyez quelle importance lui donnent la vertu et l’aide de Dieu ! Le roi vient au-devant de ce vieillard, de cet étranger, et lui rend toute espèce d’honneurs. En effet, il avait déjà appris que le trône ne servait à rien sans le secours céleste, et que rien ne résiste à celui qui est soutenu par Dieu. Et Melchisédech, roi de Salem, lui apporta le pain et le vin : c’était un prêtre du Dieu Très-Haut.
5. Que veut dire cette union de mots : Le roi de Salem et prêtre du Dieu Très-Haut ? C’était le roi de Salem. Saint Paul en parle dans sa lettre aux Hébreux convertis ; en étudiant son nom et celui de sa ville, il les explique au moyen d’une étymologie, en disant : Melchisédech, roi de justice. (Héb. 7,2) Car en hébreu, Melchi veut dire royaume, et Sédec justice. A propos du nom de la ville, il dit : Roi de paix ; car Salem signifie paix. Quant à son sacerdoce, il s’était sans doute consacré lui-même, comme faisaient alors les prêtres. Cet honneur avait pu lui être accordé à cause de son âge, ou bien lui-même avait songé à remplir ces fonctions ; ainsi Abel, Noé et Abraham avaient offert des sacrifices ; Du reste, il devait être la figure du Christ, c’est ainsi que Paul le considère quand il dit : Melchisédech… sans père, sans mère, sans généalogie, n’ayant ni commencement de ses jours, ni fin de sa vie, est ainsi l’image du Fils de Dieu, et demeure prêtre pour toujours. (Héb. 7,3) Et comment, direz-vous, un homme peut-il être sans père ni mère, et n’avoir ni commencement de ses jours, ni fin de sa vie ? Vous avez vu que cet homme était une figure : ne vous étonnez donc pas, et n’exigez pas que tout soit dans la figure, car ce ne serait plus une figure, si elle possédait en effet tout ce qu’elle représente. Quel est donc le sens de ces paroles ? De même que Melchisédech est dit sans père, sans mère, sans généalogie, parce que l’Écriture ne mentionne ni son père, ni sa mère, ni sa généalogie ; ainsi, comme le Christ n’a pas de mère dans le ciel, ni de père sur la terre, on dit qu’il n’a pas de généalogie, et c’est la vérité. Voyez comme les honneurs rendus au patriarche nous préparent à un mystère. Melchisédech lui présente le pain et le vin. En voyant le symbole, songez à la réalité, et admirez comment l’Écriture sainte nous fait prévoir l’avenir dès l’origine. Il bénit Abram et lui dit : Qu’Abram soit béni par le Dieu Très-Haut qui a créé le ciel et la terre. Et le Très-Haut soit béni parce qu’il a livré tes ennemis dans tes mains. non seulement il le bénit mais il glorifie Dieu ; car en disant : Abram est béni du Très-Haut qui a créé le ciel et la