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TRENTE-QUATRIÈME HOMÉLIE.


« Le Seigneur dit à Abram après qu’il se fut séparé de Loth : Lève les yeux à partir de la place où tu es maintenant, au nord et au midi, à l’orient et vers la mer, car toute cette terre que tu vois, je te la donnerai. » (Gen. 13,14-15).

ANALYSE.

  • 1. Eloge de la douceur. – 2. Explication du passage de l’Écriture qu’on vient de lire. Dieu est si satisfait de la conduite qu’Abram a tenue à l’égard de Loth, qu’à peine Loth s’est-il éloigné que Dieu vient donner à Abram sa récompense. – 3. Imitons Abraham ; voici un pauvre, ne perdons pas une si belle occasion, donnons-lui l’aumône et Dieu nous rendra un « royaume dans le ciel. Dieu diffère l’accomplissement de sa promesse pour exercer la vertu du juste ; avant de donner un enfant à Sara ; il attend qu’elle ait humainement perdu l’espoir d’en avoir, pour mieux faire éclater sa puissance. – 4. Grandeur de la promesse que Dieu vient de faire à Abram. Abram va planter sa tente au pied du chêne de Membré. – 5-6. Exhortation à la constance dans la foi.


1. Vous avez appris hier, mes bien-aimés, combien le patriarche avait d’humilité et de douceur. En effet, il était extraordinaire de voir ce vieillard, auquel Loth devait tant de bienfaits, si favorisé du Maître de l’univers, traiter d’égal à égal avec un jeune homme, avec son neveu, au point de lui céder l’avantage, de prendre ce qu’il laissait, afin de tout faire pour éviter la guerre et supprimer toute cause de dispute. Cherchons tous à l’imiter, ne publions jamais nos louanges, ne tombons jamais dans l’orgueil. Ne nous distinguons que par notre modestie, efforçons-nous de passer pour inférieurs aux autres, en œuvres et en paroles, ne combattons jamais ceux qui nous ont fait tort quand même nous les aurions comblés de nos bienfaits (c’est là le comble de la sagesse) : ne nous fâchons d’aucune injure, même si elle vient de la part des inférieurs, mais apaisons toute colère par notre calme et notre douceur. Il n’y a rien qui montre plus de puissance et de force. C’est ainsi que notre âme parvient à être parfaitement tranquille, c’est là ce qui la maintient au port, pour ainsi dire, et facilite notre bonheur et notre repos. Voilà pourquoi le Christ nous donne ce divin précepte : Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez du repos pour vos âmes. (Mt. 2,29) Car rien ne rend mieux à l’âme le repos et la tranquillité que la douceur et la modestie. Un diadème honore moins celui qui le porte ; l’illustration et la gloire n’ont rien qui vaille autant. Est-il, en effet, un plus grand avantage que d’être délivré d’une guerre civile ? L’extérieur a beau être en paix avec nous, ou même nous être soumis, si le trouble dé nos pensées cause à l’intérieur des tumultes et des séditions, à quoi nous servira la paix extérieure ? de même, que peut-il arriver de plus déplorable pour une ville, malgré tous ses murs et ses retranchements, que d’avoir des traîtres dans son sein ? Je vous conjure donc, de songer avant tout à calmer le trouble de votre âme, à la mettre en repos et à la délivrer de tous ses dégoûts, afin que vous-mêmes puissiez être tranquilles et doux pour ceux qui vous approchent. En effet, on reconnaît surtout un homme raisonnable à ce qu’il est calme, facile à vivre, doux, modeste et tranquille ; s’il ne se laisse pas entraîner comme un esclave par la