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des Apôtres, nous vous en nourrissions chaque jour en exhortant par des instructions fréquentes et quotidiennes ceux qui avaient reçu récemment la grâce du baptême.
Maintenant, je dois me rappeler ma dette et vous satisfaire. Vous-mêmes pourriez n’y plus songer, distraits que vous êtes par mille soins, à propos de votre femme, de vos enfants, de la nourriture quotidienne et d’une foule d’autres intérêts de la vie ; mais nous, qui n’avons aucun de ces embarras, nous vous rappelons cette dette et nous nous préparons à la payer. Ne vous étonnez pas si nous le faisons avec tant de bonne volonté. Une obligation de cette nature diffère des obligations pécuniaires, que le débiteur n’acquitte jamais de bon cœur, sachant qu’il diminue ses biens et augmente ceux du créancier. Il n’en est pas de même pour une dette spirituelle telle que celle-ci ; plus le débiteur paye, plus il s’enrichit en même temps que les créanciers. Voilà pourquoi d’un côté on ne montre guère de bonne volonté, tandis que de l’autre côté il y a tout profit à payer comme à être payé. C’est ce que saint Paul dit sur la charité : Ne soyez redevables à personne, si ce n’est de vous aimer les uns les autres. (Rom. 13,8) Cela veut dire qu’une pareille dette dure toujours, même après avoir été payée.
Vous devez aussi vous tenir prêts à recevoir ce paiement, car cela enrichira vos débiteurs et leur permettra de vous être plus utiles. Ainsi, puisque la nature de cette dette est telle que plus on dépense plus l’on devient opulent soi-même, achevons de nous acquitter, écoutez avec la même bonne volonté que nous mettrons à parler, pour que votre attention soit notre récompense. En quoi consiste donc cette dette ? Vous savez et vous vous rappelez, quand nous avons parlé du patriarche, que nous vous avons raconté son arrivée en Égypte à la suite d’une famine, l’enlèvement de Sara par Pharaon, l’indignation de Dieu ainsi que l’affliction dont il frappa Pharaon et sa maison pour protéger le juste, et le retour glorieux du patriarche en quittant l’Égypte. En effet, Pharaon ordonna à ses gens de conduire Abram et son épouse avec tout ce qu’il possédait, et Loth avec eux. Abram sortit donc d’Égypte, lui et sa femme et tout ce qu’il possédait, et Loth avec lui, pour aller dans le désert. Après ce discours nous avons interrompu ces instructions pendant quelque temps pour traiter des sujets exigés par les circonstances. Il faut donc maintenant nous rattacher à ce qui précède et le réunir en un seul corps avec ce qui nous reste à dire, afin de conserver à ces instructions le caractère de l’unité. Mais, pour tout éclaircir, il faut exposer à votre charité l’origine et l’enchaînement de la lecture qui vous a été faite. Abram était très-riche en troupeaux, en argent et en or. Il revint d’où il était parti, au désert, jusqu’à Béthel, jusqu’à la place où il avait dressé sa tente autrefois, entre Béthel et Agga, à l’endroit où il avait d’abord élevé un autel : et là Abram invoqua le nom du Seigneur Dieu. Ne passons point légèrement sur cette lecture, mais voyons clairement l’exactitude des saintes Écritures qui ne nous racontent rien de superflu. Abram était très-riche. Voyez d’abord que cette indication ne nous est pas donnée inutilement et sans raison, car c’est la première fois que l’on signale sa richesse et il n’en a pas encore été question. Pourquoi cela ? Pour montrer la prudence et la sagesse de Dieu, et la puissance infinie qu’il déploya en faveur du juste. Celui-ci, forcé de voyager en Égypte à cause de la famine qu’il ne pouvait plus supporter au pays de Chanaan, devint subitement riche et même extrêmement riche, et non seulement en troupeaux, mais en or et en argent.
2. Remarquez-vous quelle est la providence de Dieu ? Le juste est parti pour se soustraire à la famine et il est revenu, non seulement délivré de la famine, mais comblé de richesse et de gloire, et tout le monde put voir qui il était. Par la suite les habitants de Chanaan ont mieux connu ses vertus, en observant un changement si subit et en voyant revenir avec tant de trésors celui qui était parti pour l’Égypte comme un étranger, un fugitif et un vagabond. Considérez encore que l’opulence et la prospérité ne lui inspirèrent ni vanité ni paresse : il retourna à l’endroit même qu’il habitait avant d’aller en Égypte. Il alla au désert jusqu’à l’endroit où il avait dressé sa tente autrefois, à la place où il avait d’abord élevé un autel, et invoqua le nom du Seigneur Dieu. Réfléchissez, je vous prie, combien il aimait la paix et la tranquillité, et quel zèle il avait pour le culte de Dieu. Il se rendit au même endroit où il avait élevé un autel et où il avait invoqué le nom de Dieu, accomplissant ainsi, bien des siècles à l’avance, ce qui a été dit par David : J’ai choisi d’être humilié dans la maison de