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force du Dieu de miséricorde, qui prépare au juste un départ si glorieux, après une arrivée pleine de tant de frayeurs et d’angoisses. Pharaon ordonna à ses gens d’accompagner Abram pour le conduire avec son épouse et tout ce qui leur appartenait, et Loth avec lui. Le juste revint avec beaucoup d’honneurs et de richesses, et tous ces événements servirent de leçons non seulement aux Égyptiens, mais à ceux qui se trouvaient sur la route et aux habitants de la Palestine. Car, voyant cet homme, qui était parti sous la contrainte de la famine, saisi de frayeur et de tremblement, revenir maintenant avec tant d’éclat, d’abondance et d’opulence, ils apprenaient avec quelle force Dieu le protégeait. Qui a jamais vu et entendu de telles choses ? Il est parti pour se soustraire aux rigueurs de la famine, et il revient comblé de richesses et de gloire. Ne vous étonnez pas trop, mes bien-aimés, ne soyez pas si surpris du fait en lui-même, réservez votre stupéfaction, votre admiration, pour notre commun Maître ; c’est lui qu’il faut glorifier. Voyez que les descendants du patriarche, étant encore venus en Égypte pour fuir la famine, y supportèrent aussi la servitude et les persécutions, mais en revinrent glorieux et prospères. Telle est la sagesse de notre Seigneur ! quand il a permis aux malheurs de s’accumuler, il dissipe de nouveau les nuages et ramène un calme subit et inattendu, pour nous montrer la grandeur de sa puissance. Abram partit d’Égypte, lui et sa femme, et tout ce qui lui appartenait, et Loth avec lui pour aller dans le désert. On peut appliquer ici les paroles du bienheureux David à propos de ceux qui revenaient après avoir été captifs à Babylone. Ceux qui sèment dans les larmes, moissonneront dans la joie. Au départ ils marcheront en pleurant tout en jetant leurs semences ; au retour, ils marcheront dans l’allégresse en portant leurs gerbes. (Ps. 125,5-6) Vous avez vu l’arrivée pleine d’anxiétés et de frayeurs qui allaient jusqu’à craindre la mort. Voyez maintenant ce retour plein d’honneur et d’éclat. Tout le monde respectait le juste, en Égypte aussi bien qu’en Palestine. En effet, qui n’aurait pas eu de respect pour celui que Dieu gardait ainsi et qu’il honorait d’une telle protection ? Car personne n’ignorait ce qui était arrivé au roi et à sa maison. Tout avait été disposé, dans l’accroissement des épreuves du juste, pour que sa patience fût mise au grand jour et que personne n’ignorât sa vertu.
9. Vous avez vu, mes bien-aimés, quel avantage on retire des épreuves, quel est le prix de la patience. Cet homme et cette femme, l’un déjà vieux, l’autre déjà âgée, vous avez vu tout ce qu’ils montraient de résignation, de courage, de tendresse mutuelle et d’affection conjugale. Imitons-les tous et ne nous irritons jamais ; ne croyons pas que Dieu nous délaisse et nous dédaigne parce que nous sommes assaillis d’épreuves ; au contraire, regardons-les comme la meilleure preuve de l’intérêt que Dieu nous porte. En effet, si nous sommes chargés d’un lourd fardeau de péchés, nous pourrons l’alléger par notre persévérance et notre bonne volonté ; s’il est moins pesant, nous parviendrons à l’alléger encore avec la grâce d’en haut, pourvu que nous le supportions sans murmurer. En effet, notre Dieu est généreux et s’intéresse à notre salut ; s’il nous exerce comme dans une arène et nous fait lutter avec les tentations, c’est afin qu’après avoir déployé nos propres forces, nous soyons plus dignes de sa protection. Puisque nous savons qu’il en est ainsi, ne nous laissons pas aller au découragement dans les épreuves, ni au chagrin dans les tribulations, mais réjouissons-nous, comme saint Paul. Maintenant, dit-il, je me réjouis dans les tribulations. (Col. 1, 24) Voyez quelle bonne disposition d’esprit ! S’il se réjouissait dans les tribulations, comment pouvait-il jamais se chagriner ? Et si ce qui attriste les autres était pour lui un sujet de joie, voyez, je vous prie, comme son âme était bien préparée à tout. Et pour vous persuader qu’il nous est indispensable, pour jouir des biens qui nous sont promis et pour mériter le royaume des cieux, de marcher dans cette vie au milieu des tribulations, écoutez ce que disent les apôtres aux nouveaux convertis. Et après avoir instruit plusieurs disciples, ils retournèrent à Lystra, à Iconie et à Antioche, fortifiant l’esprit de leurs disciples, les exhortant à persévérer dans la foi et leur représentant qu’il faut passer à travers bien des tribulations pour arriver au royaume des cieux. (Act. 14,21-22)
Quelle sera donc notre excuse si nous refusons de supporter avec courage, constance et reconnaissance, toutes celles qui se présenteront, quand nous voyons que nous ne pouvons parvenir au royaume des cieux sans marcher dans cette voie ? Car, pour reconnaître qu’il n’y a rien de nouveau ni d’extraordinaire dans les