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Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre, toutes les hérésies qui, comme un mauvais, grain, devaient pulluler dans l’Église. C’est pourquoi, quand un manichéen vous dit que la matière préexistait, et quand Marcion, Valentin ou un païen vous soutiennent la même, opinion, répondez-leur qu’ au commencement Dieu créa le ciel et la terre ; mais s’ils récusent l’autorité de l’Écriture, traitez-les comme des extravagants et des insensés. Et, en effet, comment excuser celui qui refuse de croire le Créateur de l’univers et qui taxe de mensonge la Vérité suprême ? Il se cache sous de belles apparences et feint les dehors de la douceur ; mais il n’en est pas moins un loup sous une peau de brebis. Ne vous laissez donc point séduire ; et vous devez même d’autant plus le haïr qu’il affecte envers un homme une conduite pleine d’égards, et déclare la guerre au Dieu, souverain Maître de l’univers. Hélas ! il ne s’aperçoit pas qu’il expose le salut de son âme. Pour nous, attachons-nous à la pierre ferme, et revenons à notre sujet : Au commencement Dieu créa le ciel et la terre. Et d’abord, observez comme l’Être divin se manifeste dans le mode même de la création ; car, à l’opposé de l’homme, il commence par le couronnement de l’édifice : il déroule premièrement, les cieux, et place ensuite la terre au-dessous ; il pose le haut du temple avant que d’en avoir établi les fondements. S’est-il jamais vu rien de pareil ? et qui a jamais entendu un semblable récit ? Mais Dieu commande, et tout cède à ses ordres. C’est pourquoi, loin de soumettre les œuvres du Seigneur à la critique de notre raison, laissons-nous conduire, par la vue de ses ouvrages, jusqu’à l’admiration de l’ouvrier ; car les perfections de Dieu sont devenues visibles, depuis la création du monde, par tout ce qui a été fait. (Rom. 1,20)
4. Mais, si les ennemis de la vérité persistent à soutenir que le néant ne peut rien produire, adressons-leur cette question : Le premier homme a-t-il été formé de la terre ou de toute autre matière ? – De la terre, répondront-ils unanimement. Qu’ils nous disent donc comment la chair de l’homme a pu se former de la terre ! Nous la pétrissons pour en façonner des briques,-des tuiles et des vases ; mais est-ce ainsi que l’homme a été formé ? Et comment, d’une seule et même matière, tirer tant de substances diverses : les os, les nerfs et les artères, la chair, la peau, les ongles et les cheveux ? Ici, ils ne sauraient donner aucune réponse raisonnable. Et si, du corps, je passe aux aliments qui le nourrissent, je leur demanderai comment le pain que nous mangeons chaque jour, et qui est une substance homogène, se convertit en sang et en chyle, en bile et en diverses humeurs ; car le pain conserve la blancheur de la farine, et le sang est rouge ou purpurin. Mais, si nos adversaires ne peuvent expliquer ces phénomènes qui chaque jour s’accomplissent sous leurs yeux, combien plus difficilement encore rendraient-ils raison des autres ouvrages du Seigneur ! C’est pourquoi, s’ils continuent à rejeter ces nombreuses démonstrations et s’ils persistent dans leur incrédulité, nous nous contenterons de leur opposer la même réponse et de redire : Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre. Ce seul mot nous suffit pour renverser tous les retranchements de nos adversaires, et pour ruiner dans leur fondement tous leurs vains raisonnements. S’ils voulaient du moins cesser enfin cette opiniâtre résistance, ils pourraient rentrer dans la voie de la vérité.
Or, la terre était invisible et informe. Pourquoi le Seigneur, je vous le demande, a-t-il créé le ciel lumineux et parfait, et la terre informe ? Certes, il n’a point agi sans raison, mais il a voulu nous révéler, par ce chef d’œuvre de la création, qu’il en a produit également les autres parties, et que ce n’est point impuissance de sa part si elles sont moins parfaites. Une autre raison de ce qu’il a créé la terre informe, c’est qu’elle est la mère et la nourrice du genre humain : nous naissons de son sein et nous vivons de ses productions ; elle est la patrie et la sépulture de tous les hommes, le centre qui nous réunit tous et la source qui nous enrichit de mille biens. Mais, de peur que le sentiment du besoin ne portât les hommes à lui rendre un culte idolâtrique, Moïse nous la montre informe et toute nue, afin que nous ne lui attribuions point sa fécondité, et que nous en rapportions la gloire à Celui qui l’a tirée du néant. Voilà pourquoi l’Écriture dit que la terre était invisible et informe: Mais peut-être vous ai-je fatigué, dès le commencement, par des raisonnements trop subtils ; c’est pourquoi je crois utile de terminer ici ce discours, et néanmoins je conjure votre charité de conserver le souvenir de mes paroles et de les méditer souvent. Un repas frugal vous attend au sortir de cette réunion ; eh bien ! associez