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en vous disant tout, nous vous laissons à sonder l’Écriture et à chercher dans quelles circonstances elle emploie des locutions semblables. Il s’agit maintenant de vous dire pourquoi cet oiseau n’est pas revenu. Peut-être cet oiseau immonde, après la retraite des eaux, avait trouvé des cadavres d’hommes et de bêtes, et, rencontrant une nourriture qui lui convenait, s’y était arrêté, ce qui même donnait au juste une bonne raison pour espérer, car si le corbeau n’avait rien trouvé pour se soutenir, il fût revenu. Pour savoir s’il en était ainsi, le juste, dont la confiance s’augmentait, envoya une colombe, oiseau privé et familier, d’une grande douceur et qui ne se nourrit que de graines ; aussi il est compté parmi les oiseaux purs. Et il envoya la colombe pour voir si l’eau avait cessé de couvrir la face de la terre. Mais la colombe n’ayant pas trouvé où poser ses pieds, retourna vers lui dans l’arche, parce que l’eau était sur toute la face de la terre. Ici il faut chercher comment l’Écriture sainte, après avoir dit plus haut que l’on voyait les sommets des montagnes, dit maintenant que la colombe est revenue à l’arche parce qu’elle n’avait pas trouvé où se poser : et que l’eau couvrait toute la face de la terre. Lisons ce passage avec attention et nous en saurons la cause : il n’est pas dit simplement où se poser, mais où poser ses pieds, ce qui nous montre que malgré la retraite des eaux et la réapparition des sommets des montagnes, l’abondance de l’inondation avait laissé sur ces sommets une grande masse de limon. Aussi la colombe ne pouvant s’arrêter nulle part, ni trouver la nourriture qui lui convenait, revint à l’arche, montrant au juste par son retour qu’il y avait encore une grande quantité d’eau. Ayant étendu la main, il la prit avec sa main et la ramena à lui dans l’arche. Voyez quelle douceur dans cet oiseau, comment son retour montra au juste qu’il fallait prendre encore un peu de patience. Et ayant attendu encore sept jours, il fit partir la colombe de l’arche. Et la colombe revint vers lui le soir, portant dans son bec une feuille cueillie à un olivier. Ce n’est pas au hasard ni sans raison qu’il est écrit le soir : nous voyons par là, qu’après s’être nourrie tout le jour de la nourriture qui lui convenait, elle revenait le soir portant dans son bec ce qu’elle avait cueilli sur un olivier. Cet animal est doux et très-familier. Aussi revint-il, et par cette feuille d’olivier, il apporta au juste une grande consolation. Mais l’on dira peut-être : où a-t-il trouvé cette feuille ? Tout cela est arrivé conformément aux desseins de Dieu, d’après lesquels la colombe a trouvé l’arbre, a cueilli là feuille et l’a rapportée au juste. Du reste, l’olivier est toujours vert, et il est probable qu’après la retraite des eaux, cet arbre avait encore ses feuilles. Ayant attendu encore sept autres jours ; il fit partir la colombe et 'elle ne revint plus à lui. Voyez que le juste reçoit toujours la consolation dont il a besoin. Quand la colombe rentre avec la feuille d’olivier dans son bec, il conçoit déjà de grandes espérances : maintenant quand elle fut sortie pour ne plus rentrer, c’était la meilleure preuve qu’elle avait trouvée ce qu’il lui fallait et que les eaux avaient complètement disparu. Et pour voir qu’il en était ainsi, écoutez la suite : Il arriva, dans la six-cent et unième année de la vie de Noé, le premier mois, que l’eau se retira de la face de la terre. Et Noé enleva la couverture de l’arche qu’il avait construite et vit que l’eau avait quitté la surface de la terre.
5. Ici encore je ne puis m’empêcher d’admirer avec stupéfaction là vertu du juste et la bonté de Dieu. Comment, en effet, respirant l’air après si longtemps et ouvrant les yeux à la vue du ciel, n’a-t-il pas été ébloui et aveuglé ? Car vous savez que c’est ce qui arrive d’ordinaire à ceux qui ont passé, même peu de temps, dans l’obscurité et les ténèbres, lorsqu’ils revoient l’éclat du jour. Mais ce juste, pendant une année entière et des mois si pénibles passés dans l’arche presque sans, lumière, en revoyant tout-à-coup les splendeurs du soleil, n’éprouva aucun accident semblable. C’était la grâce de Dieu et la patience qu’il lui avait accordée, qui avaient donné plus de vigueur même à ses facultés corporelles, et les avaient élevées au-dessus de leur nature. Au second mois la terre fut séchée, le vingt-septième jour, de ce mois. Ce n’est pas sans raison que l’Écriture sainte raconte tout avec tant d’exactitude : c’est – pour rions montrer que tout fut terminé à cet anniversaire, pour faire briller, la patience du juste et compléter la purification de la terre. Ensuite, après que toute la création eut été comme lavée de tout ce qui la souillait, eut effacé les taches qu’y avait laissées la perversité humaine, et que sa figure fut devenue radieuse, c’est alors que le juste put enfin sortir de l’arche, et se délivrer de sa cruelle prison. Le Seigneur dit à Noé : Sors de l’arche, toi et tes fils, et ta femme, et les