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VINGT-DEUXIÈME HOMÉLIE.


« Et Noé était âgé de cinq cents ans, et Noé engendra trois fils, Sem, Cham et Japhet. Et il arriva quand les hommes eurent commencé à se multiplier sur la terre, qu’il leur naquit des filles. » (Gen. 5,31-6,1)

ANALYSE.

  • 1. L’histoire de Noé, sujet de la dernière instruction, le sera encore de celle-ci. Admirable spectacle que celui de Noé, seul juste au milieu de l’iniquité universelle. L’orateur en tire une conclusion en faveur de la liberté de l’homme. – 2. Les fils de Dieu volant que les filles de l’homme étaient belles, en prirent pour épouses parmi toutes celles qu’ils choisirent. Qu’étaient ces fils de Dieu ? des anges ? non. Saint Chrysostome traite cette opinion d’absurde et la réfute vivement. – 3. Ces fils de Dieu ne sont autres que les descendants de Seth. – 4. Tableau de la corruption croissante du monde, et patience de Dieu. – 5. Dieu se repentit d’avoir créé l’homme, manière de parler accommodée à notre faiblesse. Les animaux périssent avec l’homme parce qu’ils sont faits pour lui. – 6. Exhortation.


1. Je veux vous offrir les restes du repas d’hier, mais ne vous offensez pas, mes bien-aimés, si je sers de restes. Les aliments matériels, après un jour ou deux, se corrompent et ne peuvent plus servir, mais dans un festin spirituel on n’a rien de pareil à craindre. Plus il s’est écoulé de temps, plus ce festin est agréable, plus il semble frais et fortifiant. Remplissons donc la promesse que nous avons faite hier, et puisque nous sommes encore redevables d’une partie de l’instruction, acquittons-nous-en avec joie. Cela sera profitable, non seulement, comme pour les autres dettes, à ceux qui seront payés, mais à moi qui payerai. Et comment en profiterai-je, moi qui payerai ? Telle est la nature d’une dette spirituelle ; plus on paye, plus on s’enrichit, les biens se multiplient et celui qui donne recueille d’immenses richesses aussi bien que ceux qui reçoivent. Voyez quelle nouvelle espèce de dette, et quelle étrange espèce de payement ! Voilà ce qu’il y a de particulier dans les choses spirituelles, c’est qu’elles augmentent à mesure qu’on les distribue, et plus il y a de personnes qui y participent, plus elles sont abondantes. Celui qui a payé ne s’aperçoit pas qu’il ait rien payé, puisqu’il s’est enrichi, et ceux qui ont reçu n’en ont pas moins gagné. Aussi la nature de ces dettes spirituelles est telle que nous les acquittons avec joie ; vous, de votre côté, préparez votre attention pour recevoir mes paroles au fond de votre âme et les remporter avec vous. Je veux encore vous parler de Noé et de sa justice, afin que vous puissiez voir sa vertu, l’ineffable bonté de Dieu et sa patience qui dépasse tout ce que l’on peut dire. Vous avez appris hier comment ce juste, depuis le jour de sa naissance, où il reçut de son père le nom qu’il devait porter, n’avait cessé de prévenir les hommes des malheurs qui les attendaient, puisqu’il leur disait et leur criait par son nom lui-même : cessez de faire le mal, pratiquez la vertu, craignez le châtiment qui vous menace, il y aura un déluge sur tout l’univers. La colère de Dieu est au comble, ainsi que votre méchanceté. Et cet avertissement ne dura pas seulement deux ou trois ans, mais cinq cents ans. Voyez la tolérance de Dieu, son excessive bonté, et sa patience ineffable ! Voyez l’accroissement du mal et l’étendue de la perversité ! C’est là, comme