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ne nous contentons pas devenir simplement pour voir ce qu’il y a dans l’Écriture sainte ; soyons attentifs ; lisons-la pour qu’elle nous soit utile, pour en retirer aussi tard que vous voudrez, pour en extraire, un jour, quelque vertu chère à Dieu, et dont nous ferons notre conquête. Car, s’il faut que tous les jours nous vous annoncions à grands cris cette doctrine spirituelle, tandis que vous resterez dans la même inertie, à quoi vous servira ce continuel enseignement ? Quelle sera pour nous la consolation, a voir que tant d’efforts que nous prenons sont inutiles, et que nous ne gagnons rien avec tout notre zèle ? Voyons, parlez-moi ; est-ce que nous ne sommes pas composés de deux substances, je dis d’une âme et d’un corps ? Eh bien ! donc, pourquoi ne dépensons-nous pas également nos soins pour tous les deux ? Comment se fait-il que nous soignons notre corps de toutes les manières, que nous faisons venir les médecins, que personnellement nous le soignons avec la plus grande diligence, nous le couvrons d’étoffes précieuses, nous prenons de la nourriture plus qu’il n’en faut, nous voulons qu’il soit dans un état de prospérité continuelle, qu’aucun mal ne vienne jamais le tourmenter ? Si, parfois, quelque trouble le dérange, nous mettons tout en mouvement pour écarter ce qui l’importune. Et ce que je dis, je le dis de ce corps qui n’est que la seconde de nos substances ; car enfin, voyons : quelle est la plus noble ? Est-ce l’âme ou le corps ? S’il faut en faire voir à vos yeux la différence, remarquez donc que votre corps n’est plus rien, du moment que l’âme s’en est séparée. Eh bien ! vous, qui prenez pour ce corps un si grand souci, par quel motif, en vue de quoi, méprisez-vous tant votre âme, au point de ne pas lui donner sa part de nourriture ? J’entends par là les avertissements de l’Écriture Sainte. Aux blessures, aux ulcères qui énervent ses forces, qui détruisent sa confiance, vous n’apportez pas les remèdes convenables ; vous la laissez, cette âme méprisée, se dessécher par la faim, pourrir dans ses ulcères ; passez-moi le mot, vous la jetez aux chiens, aux pensées mauvaises, aux pensées criminelles, qui la déchirent, qui décomposent, qui ruinent tout ce qu’elle avait d’énergie.
Nous prenons soin du corps que nous avons sous les yeux : pourquoi ne soignons-nous pas également l’âme, incorporelle, invisible, et cela, quand les soins qu’elle réclame, non seulement sont chose aimable et facile, niais encore ne réclament ni dépenses, ni fatigues ? Quand le corps est malade, il faut de l’argent et de l’argent, soit pour les médecins, soit pour d’autres nécessités, nécessités de vêtements, d’aliments. Je ne veux pas mentionner ici les dépenses au-delà du nécessaire, les dépenses du luxe. L’âme, au contraire, n’a nul besoin pareil. Si vous voulez, puisque chaque jour vous fournissez au corps de la nourriture, puisque vous dépensez pour le corps, de l’argent, si vous voulez, de même, que votre âme ne meure pas de faim, si vous consentez à lui donner la nourriture convenable, vous connaissez bien le texte de l’Écriture, l’avertissement spirituel : L’homme ne vit pas seulement de pain, dit le Seigneur, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu (Mt. 4,4), prenez donc le parti le plus sage, occupez-vous de la substance qui est proprement la nôtre. Eh bien donc ! comme vous fournissez au corps des vêtements variés, vous tenez compte de la diversité des saisons dans la diversité de vos vêtements, faites de même pour l’âme, ne la négligez pas, ne la laissez pas aller et venir nue, dépourvue de bonnes œuvres ; revêtez-la des vêtements qui lui vont, et aussitôt vous la réconforterez, vous lui rendrez la santé qui convient à sa nature. Quels sont les vêtements de l’âme ? L’aumône, l’argent prodigué aux pauvres ; c’est là le plus beau vêtement de l’âme ; voilà ce qui lui fait un splendide manteau. Et maintenant, si vous voulez non seulement lui donner des vêtements, mais, de plus, la parer, l’embellir, comme vous faites du corps, ajoutez-y le secours qui vient des prières, la confession des péchés ; ne cessez pas de laver la face de votre âme dans les larmes de la pénitence. Tous les jours vous vous lavez le visage avec une entière sollicitude, de peur que quelque tache n’enlaidisse votre figure, appliquez à votre âme un soin du même genre ; purifiez-la chaque jour par vos larmes brûlantes. Voilà qui enlève les taches de l’âme, et lui rend sa pureté et sa gloire.
Et puisque l’indolente vanité d’un grand nombre de femmes méprise ce précepte de l’Apôtre : Qu’elles se parent non avec des cheveux frisés, ni des ornements d’or, ni des perles, ni des habits somptueux (1Tim. 2,9), puisqu’elles déploient un grand luxe dans la violation de ce précepte ; et puisque non seulement