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s’arrêtent pas à la surface, ils descendent à une grande profondeur. S’ils ont pu trouver des parcelles d’or, que d’activité, que de soin pour séparer l’or de la terre ! et, après tant de fatigues, ils trouvent une mince consolation de leurs labeurs ; ils savent bien pourtant que l’avantage qu’ils recueilleront ne répond pas à leurs peines ; que, souvent, même, après tant de veilles et de travaux, ils ont été frustrés dans leur attente. Qu’importe. Ils persistent dans leurs efforts ; l’espoir qui les nourrit les rend insensibles à la souffrance. Eh bien ! si ces hommes montrent tant d’ardeur pour des richesses corruptibles, incertaines, d’une possession si douteuse, à plus forte raison nous, qui poursuivons des richesses que rien ne peut enlever, un trésor que rien ne peut dissiper, nous, que n’égare pas une vaine espérance, devons-nous montrer autant de zèle, plus de zèle, pour obtenir le bien désiré, pour en recueillir le fruit précieux, pour nous pénétrer de la bonté ineffable du Seigneur, lui prouver notre reconnaissance ; et, forts de l’affection pleine de tendresse que nous aurons arrachée au Dieu Notre-Seigneur, nous rendre invincibles, inexpugnables, supérieurs à tous les pièges du démon. Eh bien donc ! puisque vous avez entendu la lecture de tout à l’heure, examinons avec soin, en détail, chacune des expressions, et puissiez-vous, après avoir reçu l’instruction habituelle en rapporter le bienfait dans vos demeurés ! Voici le dénombrement de la postérité d’Adam, dit le texte. Au jour que Dieu créa l’homme, Dieu le fit à sa ressemblance ; il les créa mâle et femelle, et il leur donna le nom d’Adam au jour qu’il les créa. Faites attention, je vous en conjure ; voyez la sagesse de ce prophète admirable, ou plutôt, l’enseignement du Saint-Esprit ; car, comme nous l’avons souvent dit, c’est par l’inspiration du Saint-Esprit qu’il nous parle ; il n’a fait que lui prêter sa langue, c’est la grâce du Saint-Esprit qui instruit, en se servant de lui, toute l’espèce humaine. Voyez donc comme il ramène le discours à l’origine des choses, comme il reprend les choses qui ont précédé. Pourquoi, et dans quel but ? C’est qu’il a vu les hommes de ce temps manifester une grande ingratitude ; le malheur de notre premier père ne les avait nullement corrigés ; ils étaient plongés dans l’abîme d’une malignité aussi profonde. Celui qui était né du premier homme, excité bientôt par l’envie, s’était jeté dans le fratricide ; il avait, après un tel crime, subi le plus terrible châtiment ; cet enseignement, mes frères, nous nous sommes empressés de vous l’exposer. Ses descendants ne s’étaient en rien amendés par ce châtiment ; ils s’enveloppèrent d’un tissu de crimes encore pires. Vous avez entendu hier Lamech racontant son péché à ses épouses, et décrétant contre lui-même le châtiment. Le Prophète vit donc la perversité de ces hommes croître peu à peu, comme une humeur malsaine qui se répand par tout le corps ; c’est pourquoi il supprime, dans son histoire ce débordement de la corruption ; ces générations depuis Caïn jusqu’à Lamech, il ne daigne pas les rappeler ; mais, comme s’il voulait raconter le commencement des choses, consoler le deuil où la main fratricide armée contre Abel avait jeté Adam et Eve, il commence son récit de cette manière : Voici le dénombrement de la postérité d’Adam. Au jour que Dieu créa l’homme, Dieu le fit à sa ressemblance ; il les créa mâle et femelle, et il leur donna le nom d’Adam, c’est-à-dire terrestres, au jour qu’il les créa.
2. Voyez comme il se sert des mêmes paroles qu’au commencement, pour nous apprendre que ces générations infâmes, il ne les juge plus désormais dignes de mémoire ; il commence à l’enfant qui vit le jour alors, je veux dire à Seth, la généalogie, pour nous apprendre combien la vie des hommes est considérable devant Dieu, et comment Dieu déteste les âmes sanguinaires. Il les passe sous silence, comme si elles n’avaient pas vécu, nous montrant par là tout ce qu’il y a de funeste dans le péché, nous enseignant que les pervers s’attirent les plus grands maux. Voyez ; les voici dorénavant rayés du catalogue ; on ne rappelle leur souvenir que pour montrer l’infamie de leur perversité, que pour l’exemple et la correction des générations qui les suivent. Mais celui que l’injustice a mis à mort, que la main d’un frère a privé de la vie, depuis ces temps jusqu’à nos jours, est loué par toutes les bouches. Aucun temps n’a éteint la mémoire de l’un, ni diminué le crime de l’autre ; celui-ci, tous les jours, est célébré par tous les hommes ; l’autre demeure, pour jamais, comme attaché à un infâme poteau.
Comprenez-vous tout ce qu’a de funeste la corruption, tout ce que la vertu a de force ? Comprenez-vous comment la malice même,