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ne se produira pas dans un temps convenable.
Lorsqu’elle précède la peine, la pénitence vient en son temps, et sa vertu est immense. C’est pourquoi, je vous en conjure, tandis que cet admirable remède conserve encore son efficacité, hâtez-vous d’en profiter ; appliquons-nous le traitement de la pénitence pendant que nous sommes en cette vie, et persuadons-nous bien qu’il ne nous servira de rien de nous repentir après que la tragédie de ce monde sera jouée et lorsque le temps des luttes sera passé.
4. Revenons à notre sujet. C’est lorsque le Seigneur lui demandait : Où est ton frère Abel ? que Caïn devait confesser son péché, se prosterner, prier, implorer miséricorde. Mais alors il a refusé le remède, et maintenant, après la sentence prononcée, quand tout est fini, quand la voix du sang versé a fait entendre hautement une accablante accusation, il se confesse, mais confession tardive et inutile, contre laquelle s’élève la parole du Prophète : Le juste est lui-même son accusateur en premier lieu. (Prov. 18,77) Caïn lui-même, s’il avait prévenu la réprimande, eût été jugé digne de quelque pitié, tant est grande la divine miséricorde. Il n’y a pas de péché, si énorme qu’il soit, qui surpasse la charité de Dieu pour les hommes, pourvu que nous fassions pénitence au temps qu’il faut et que nous implorions notre pardon.
Et Caïn dit : Mon crime est trop grand pour que j’en obtienne la rémission. Confession suffisante, mais intempestive. Caïn dit encore : Si vous me chassez aujourd’hui de dessus la terre, j’irai me cacher de devant votre face, et je serai gémissant et tremblant sur la terre ; et il arrivera que quiconque me trouvera me tuera. Paroles qui excitent la pitié ! malheureusement elles viennent trop tard, et le défaut d’opportunité leur ôte toute valeur : Si vous me chassez, dit-il, de dessus la terre, j’irai me cacher de devant votre face, et je serai gémissant et tremblant sur la terre ; et il arrivera que quiconque me rencontrera me tuera. Puisque vous m’avez rendu exécrable à la terre, puisque vous me repoussez vous-même, que vous me livrez à un châtiment si sévère, qu’il doit me faire gémir et trembler, rien n’empêchera désormais, qu’étant en cet état, et dénué de tout secours de votre part, je ne sois tué par le premier qui me rencontrera. Je serai facile à vaincre pour le premier venu qui voudra m’ôter la vie. Je n’ai pas la force de résister par moi-même avec ces membres perclus et agités par un continuel tremblement ; de plus, on saura que vous m’avez privé de votre secours, et ce motif déterminera à me donner la mort ceux qui en auraient le désir.
Que répond le Maître miséricordieux et bon ? Et le Seigneur Dieu lui dit : il n’en sera pas ainsi. Ne crois pas qu’il en advienne ainsi. Il ne sera permis à personne de te tuer, en eût-on la volonté ; mais je prolongerai ta vie pour augmenter ta peine, je te laisserai pour instruire, exemple vivant, les générations futures ; ton aspect rendra sage, et personne, en te voyant, n’aura le désir d’imiter ta conduite. Et le Seigneur dit : non, il n’en sera pas ainsi, quiconque tuera Caïn se rendra responsable de sept vengeances.
Peut-être suis-je long, peut-être vous ai-je fatigués, matériellement du moins ? Mais que voulez-vous ? Votre vive attention, l’espèce d’avidité avec laquelle vous recevez la nourriture de la parole sainte, en sont la cause ; c’est là ce qui m’encourage à poursuivre mon explication jusqu’au bout suivant mes forces. Que veut dire cette parole : se rendra responsable de sept vengeances ? Mais me voici encore retenu par la crainte d’entasser tant de choses dans vos mémoires, que les dernières nées vous fassent oublier les premières ; je ne voudrais cependant pas être fastidieux. Mais, s’il vous reste encore un peu de courage, prenez patience, j’achève l’explication des versets que j’ai récités, et je finis. Et le Seigneur Dieu lui dit : il n’en sera pas ainsi. Quiconque tuera Caïn se rendra responsable de sept vengeances. Et le Seigneur Dieu mit un signe sur Caïn de peur que personne ne le tuât, venant à le rencontrer. Tu crains que l’on ne te tue ? Aie confiance, cela ne sera pas. Et quiconque le fera, attirera sur sa tête sept châtiments. C’est pourquoi je te marque d’un signe, de peur que personne ente tuant sans te connaître n’encoure cette terrible punition.
5. Mais il convient que je vous montre plus clairement comment le meurtrier de Caïn se rendra passible de sept châtiments. Soyez attentifs, je vous prie. Comme je l’ai déjà dit souvent à votre charité ces jours passés, si, maintenant que le temps du jeûne nous procure une si grande tranquillité, et qu’il éloigne de nos esprits les pensées qui seraient de nature à les troubler, nous n’étudions pas avec beaucoup de soin les enseignements compris dans les