Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 5, 1865.djvu/118

Cette page n’a pas encore été corrigée

Mais ce fut pour empêcher en eux les progrès du vice et fermer la voie à une malice qui n’aurait point su s’arrêter, qu’il châtia Adam dans une pensée toute de miséricorde ; et c’est ce qu’il fait encore chaque jour à l’égard des pécheurs.
Il ordonna donc, par bienfaisance et par bonté, que l’homme fût chassé du paradis terrestre. Et le Seigneur Dieu, dit l’Écriture, mit Adam hors du jardin de délices, pour qu’il labourât la terre d’où il avait été tiré. Remarquez ici l’exactitude de l’écrivain sacré. Il nous apprend que le Seigneur Dieu mit Adam hors du jardin de délices, pour qu’il labourât la terre d’où il avait été tiré. L’arrêt divin reçoit dès lors son exécution, et l’homme, chassé du jardin de délices, fut contraint de travailler la terre. Ce n’est pas non plus sans raison que l’Écriture ajoute : d’où il avait été tiré. Car ce travail devait être pour lui une leçon continuelle d’humilité, en lui rappelant que son corps avait été formé du limon de la terre. Aussi est-il dit expressément : Pour qu’il travaillât la terre d’où il avait été tiré. C’est encore comme la conséquence de cette autre parole du Seigneur : Tu mangeras ton pain à la sueur de ton front, qu’Adam reçut alors l’ordre de travailler la terre d’où il avait été tiré.
L’Écriture nous apprend ensuite à quelle distance du paradis terrestre Dieu l’établit, puisqu’elle ajoute que le Seigneur Dieu chassa Adam, et le fit habiter en face du jardin de délices. Mais ici observons comme dans toutes ses couvres Dieu se montre plein de miséricorde, même quand il nous châtie. Ainsi c’est par bonté et par miséricorde qu’il châsse Adam du paradis terrestre ; et s’il l’établit ensuite en face de ce même séjour, c’est afin que chaque jour il conçoive un nouveau regret de son ancien état, et une douleur nouvelle de ses malheurs présents. Sans doute cette vue lui était bien triste et bien amère, et toutefois il y trouvait une utile leçon ; car elle le rendait plus sage et plus vigilant, et l’empêchait de pécher. Il n’est en effet que trop ordinaire à l’homme d’abuser des biens dont il jouit, et de ne se corriger que quand il les a perdus. Car l’expérience lui révèle sa faute, et son infortune lui fait apprécier le bonheur dont il est déchu et ressentir les maux qui l’environnent. Ce fut donc de la part de Dieu un trait de providence et de bonté que d’établir Adam en face du paradis terrestre, puisque la vue de ce lieu devait entretenir en lui de salutaires remords. Enfin pour l’empêcher que par un trop grand attachement à la vie, il n’essayât de rentrer dans le jardin de délices et de manger du fruit de l’arbre de vie, le Seigneur, selon le récit de l’Écriture, récit proportionné à notre faiblesse, le Seigneur plaça un chérubin avec un glaive flamboyant qui s’agitait toujours, pour garder la voie de l’arbre de vie.
La négligence de nos premiers parents à observer le commandement divin, fut cause que le Seigneur fit garder avec tant de précaution l’entrée du paradis. Et il est juste d’observer que si sa bonté et sa miséricorde avaient déjà paru lorsqu’il bannit Adam, elles n’éclatèrent pas moins quand il plaça un chérubin avec un glaive flamboyant qui s’agitait sans cesse pour garder l’entrée du jardin de délices. Ce n’est pas sans raison aussi qu’il est dit de ce glaive qu’il s’agitait sans cesse. Car nous comprenons par là que tous les chemins qui pouvaient conduire à ce jardin étaient fermés, et que ce glaive flamboyant en défendait toutes les approches. Mais quels souvenirs il rappelait, et quelle terreur il inspirait à Adam !
4. Or, Adam connut Eve, son épouse. (Gen. 4,1) Remarquez la date précise de ce fait. Ce ne fut qu’après leur désobéissance et leur exil qu’Adam et Eve eurent commerce ensemble. Auparavant ils vivaient comme des anges, et ils ignoraient les plaisirs de la chair. Ah ! comment les eussent-ils connus, puisqu’ils n’étaient point assujettis aux besoins du corps ! Ainsi, dans l’ordre des temps, la virginité possède la palme de la priorité ; mais lorsque la faiblesse de l’homme eut introduit la désobéissance et le péché, elle se retira, parce que la terre n’était plus digne de la posséder ; et alors s’établit la loi de la concupiscence. Comprenez donc, mon cher frère, quelle est la dignité de la, virginité. Elle est une vertu bien élevée et bien sublime, et sa possession est trop au-dessus des forces humaines pour que nous puissions l’acquérir sans un secours tout spécial de la puissance divine. Et, en effet, Jésus-Christ lui-même nous déclare que les vierges sont dans un corps mortel les émules des anges. Les Sadducéens l’interrogèrent un jour surfa résurrection et lui dirent : Maître, il y avait parmi nous sept frères ; et le premier ayant épousé une femme, est mort, et, n’ayant point eu d’enfants, il laissa sa femme à son frère. Il en fut de même du second, du troisième, et de