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HOMÉLIE SUR CETTE PAROLE DE L’APÔTRE : PLUT A DIEU QUE VOUS VOULUSSIEZ SUPPORTER MON IMPRUDENCE

ANALYSE.


1° Différence entre l’amour charnel et l’amour spirituel. – 2° Si nous ne voyons pas saint Paul des yeux du corps, ne l’en aimons pas moins ; si nous n’avons pas sa présence, nous avons ses œuvres, nous avons ses écrits dont nous devons chercher à pénétrer le sens. – 3° Que veulent dire ces paroles : Plût à Dieu que vous voulussiez un peu supporter mon imprudence ? Elles s’expliquent d’elles-mêmes si l’on fait attention à la circonstance où elles furent dites. – 4° Précautions multipliées que prend saint Paul avant de faire son propre éloge. – 5° humilité de saint Paul, s’il a été sauvé, dit-il, c’est pour que personne ne désespère de son salut. – 6° Avouer ses fautes et oublier ses mérites. – 7° Les saints savent se taire quand il n’y a point nécessité de parler et rompre le silence quand la nécessité les contraint. Exemple de David. – 8° – 9° Exemple de Samuel. – 10° Conclusion. On ignore le lieu et la date de cette homélie.
1. J’aime tous les saints, mais j’aime entre tous saint Paul, le vase d’élection, la trompette céleste, celui qui fiance les âmes au Christ. Je vous dis ces paroles, je vous fais connaître l’amour que j’ai pour lui, afin de vous le faire partager. Ceux qui aiment d’un amour charnel rougissent de l’avouer, parce qu’ils se couvrent eux-mêmes de honte et nuisent à ceux qui les entendent ; mais ceux qui sont enflammés de l’amour spirituel ne le doivent point taire un moment. Car eux-mêmes et ceux qui les entendent retireront du fruit de ce noble aveu. L’un est une honte, l’autre un honneur ; l’un est une maladie de l’âme, l’autre est sa joie, sa félicité, son plus bel ornement. Le premier porte la guerre dans le cœur où il pénètre, l’autre y apaise les luttes et y établit une paix profonde. L’une ne procure nul avantage ; c’est la perte des richesses, la dépense effrénée, le bouleversement de la vie, la ruine des maisons ; l’autre nous ouvre un trésor de bonnes œuvres, une source féconde de vertus. En outre, ceux qui aiment un beau corps, qui s’éprennent d’un beau visage, s’ils sont eux-mêmes laids et difformes, ne trouvent pas dans leur passion un remède à leur propre difformité ; au contraire, leur laideur semble s’accroître. Dans l’amour spirituel il en est tout autrement. Celui qui aime une âme sainte, belle, glorieuse, parfaite, serait-il laid et difforme, devient par le constant amour des saints, semblable à celui qu’il aime. Car c’est un effet de la bonté de Dieu qu’un corps difforme et mutilé ne puisse point être corrigé, mais qu’une âme dégradée et hideuse puisse devenir belle et glorieuse. Car, de la beauté du corps il ne vous peut revenir aucun avantage, mais la beauté de l’âme vous peut procurer fa jouissance de tous les biens qui sont dus à ceux qui prennent Dieu pour objet de leur amour. C’est de cette beauté que parle David dans sais psaumes : Écoute, ma fille, et vois, et incline l’oreille, et oublie topa peuple et la maison de ton père, et le Roi s’éprendra de ta beauté. (Ps. 10, 54, 11, 12)