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ont affligé le temps des apôtres. Car l’empereur qui tenait alors le sceptre était, comme l’appelle saint Paul, un mystère d’iniquité, il avait parcouru toute la carrière du mal, il l’avait emporté sur tous en perversité, mais il n’a pu blesser ni l’Église, ni les hommes généreux, au contraire il ne leur a donné que plus d’éclat. Quant aux prêtres des juifs ils étaient si méprisables et si corrompus, qu’il fallait défendre au peuple d’imiter leur conduite : Les scribes et les pharisiens, dit Jésus, sont assis sur la chaire de Moïse, observez donc et faites tout ce qu’ils vous diront d’observer, mais ne faites pas comme ils font. (Mat. 23,2-3) Que peut-on imaginer de plus corrompu que des prêtres si pervers, qu’on pouvait se perdre en les imitant. Tels étaient à cette époque les puissants ; et toutefois ceux qui brillaient par la foi, ceux que couronnait la vertu, n’ont reçu aucune blessure ; au contraire leur gloire en a été plus grande. Il ne faut pas s’étonner de ce qui arrive aujourd’hui, car ceux qui sont vigilants et attentifs sont toujours éprouvés soit par leurs concitoyens, soit par les étrangers. Aussi Paul, voyant les nuées de dangers qui le menaçaient et craignant que quelques disciples n’en fussent effrayés, écrivait aux Thessaloniciens : Je vous ai envoyé Timothée afin qu’aucun de vous ne soit ébranlé par ces afflictions ; car vous savez vous-mêmes que nous sommes placés pour cela. (1Th. 3,2) C’est comme s’il disait : Telle est notre vie, telle est la condition de l’institution apostolique ; il nous faut souffrir mille maux. Car, dit-il, nous sommes placés pour cela. C’est que comme les denrées sont étalées pour être vendues, ainsi la vie apostolique est faite pour être accablée d’outrages, pour endurer les maux, pour ne jamais respirer, pour ne jamais avoir repos ni trêve. Mais ceux qui sont vigilants et attentifs non-seulement n’y trouvent aucun préjudice, mais même en retirent une grande utilité. Aussi l’Apôtre les admire-t-il, aussitôt qu’il sait qu’ils sont restés inébranlables dans la vertu ; aussi dit-il de plusieurs fidèles, qu’encouragés par ses liens et par ses fers, ils ont osé annoncer la parole de Dieu plus hardiment et sans crainte. Mais, dis-moi, ne parlerons-nous pas du temps de Moïse ? Dieu n’a-t-il pas permis alors que dans un pays barbare des magiciens parussent revêtus du pouvoir de faire des miracles ? Paul rappelle cet événement lorsqu’il dit : Comme Jannès et Mambrès résistèrent à Moïse, de même ceux-ci résisteront à la vérité. (2Ti. 3,8) Ainsi toujours il y a eu des scandales, et toujours à leur occasion des couronnes ont été gagnées. Repasse-les dans ton esprit, mais ce n’est pas assez, pense aussi aux avantages dont ils ont été la source. Considère enfin qu’ils ont été permis pour, plusieurs raisons qui nous échappent. Car il nous est impossible de tout, savoir, et qu’ils doivent être suivis d’événements beaucoup plus heureux et de plus nombreux miracles. C’est ainsi que les commencements de Joseph ont été pénibles, et que pendant longtemps mille obstacles semblaient s’opposer complètement aux promesses ; mais ensuite les faits vinrent dépasser toute espérance. Il en est de même pour l’époque de la passion ; ce n’est pas tout d’abord, ce n’est pas dès le commencement, dès le principe que la croix porta ses fruits ; elle fut alors un scandale, et il ne parut dans le moment même que quelques prodiges pour faire rentrer dans la bonne voie ceux qui s’étaient souillés d’un tel crime ; encore disparurent-ils aussitôt. Car bien que le voile du temple se fût déchiré, que le soleil se fût obscurci, que les rochers se fussent fendus, cependant les miracles s’accomplirent dans l’espace d’un seul jour et furent bientôt oubliés du grand nombre. Ensuite c’est contraints de prendre la fuite, c’est affligés par les persécutions, par la, guerre ouverte, par les embûches secrètes, c’est obligés de se tenir dans l’ombre et de se cacher, c’est tremblants de peur et poursuivis de pierres, que les apôtres prêchèrent la parole de Dieu. En ce temps-là les Juifs étaient très puissants ; or les Juifs les enlevaient, les, poursuivaient, les déchiraient, les torturaient, et, comme les magistrats leur étaient favorables, chaque jour ils s’emparaient des apôtres et les livraient en spectacle par toute la ville. Mais qu’ai-je besoin de parler du peuple juif et des magistrats ? Un simple faiseur de tentes, dont toute l’occupation était de coudre ensemble des peaux d’animaux, Paul enfin (et qu’y a-t-il de plus misérable qu’un faiseur de tentes?), avait tant de fureur et de cruauté qu’il entraînait par la force les hommes et les femmes, et, les faisait mettre en prison. Cependant le crucifié le voyait et le laissait faire ! Mais vois comment le persécuteur a ensuite surpassé tous les autres dans la foi, et comment sa conversion a brillé d’un plus grand éclat que le soleil