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et comment ni les lois de la nature, ni la difficulté des choses, ni aucun autre empêchement ne peut l’entraver, comme il était assuré au contraire qu’elle aime à trouver ses voies et à atteindre ses fins à travers les obstacles mêmes, il accueillit avec foi la parole divine, espéra en son accomplissement, et ne laissa pas entrer dans son âme le trouble qu’auraient voulu y jeter ses raisonnements ; il jugea la puissance de Dieu assez grande, comme elle l’est en effet, pour tenir sa parole et ne recherche pas comment, ni de quelle manière cette paternité pouvait lui être donnée, pourquoi elle avait été refusée à sa jeunesse, pourquoi elle était accordée si tardivement à sa vieillesse. Aussi Paul proclame-t-il ses louanges d’une voix éclatante par ces paroles : Espérant contre toute espérance, il crut qu’il deviendrait le père de beaucoup de nations. (Rom. 4,18) Cela signifie : contre toute espérance humaine, il espéra en cette puissance de Pieu, qui triomphe de tout, qui peut tout, qui est supérieure à tout : Il crut non-seulement qu’il serait père, mais même qu’il serait père de beaucoup de nations, et cela, malgré son âge, malgré la stérilité naturelle et la vieillesse de son épouse, selon ce qui lui avait été dit : Ta postérité sera sans nombre. Il ne s’affaiblit point dans sa foi et il ne considéra point, qu’étant âgé de cent ans, son corps était comme mort, et que le ventre de Sara n’avait plus la vertu de concevoir. Il n’hésita point, et il n’eut pas la moindre défiance de la promesse de Dieu ; mais il se fortifia par la foi, rendant gloire à Dieu pleinement persuadé qu’il est tout-puissant pour, faire tout ce qu’il a promis. (Rom. 4,19-21) Cela veut dire : Ayant rejeté aussitôt loin de lui la faiblesse humaine, s’en remettant à la toute-puissance du Dieu qui lui faisait ces promesses, et croyant que ses voies sont infinies, il crut avec une pleine conviction à l’entier accomplissement de la parole divine ; il glorifia le Seigneur autant qu’il était possible par cela seul qu’il ne montra pas une vaine et inquiète curiosité, mais qu’il s’humilia devant la profondeur incompréhensible de la sagesse et de la puissance de Dieu et qu’il ne douta pas un seul instant que ce qui lui était promis ne s’accomplit. Ne vois-tu pas que c’est rendre gloire à Dieu, autant qu’il est en nous, que de s’humilier toujours devant les conseils impénétrables de la Providence, devant les mystères de sa puissance et de sa sagesse ; de ne pas se laisser aller à une vaine et inutile recherche et de ne pas se demander : Pourquoi ceci ? à quoi bon cela ? comment cela se peut-il faire ? Mais ce qui est digne d’admiration dans Abraham, ce n’est pas seulement qu’il eût cette foi ardente, mais encore qu’ayant, après cette promesse, reçu l’ordre d’immoler son fils unique, sont-ils chéri, il n’ait pas même alors été scandalisé, et pourtant que de causes de scandale pour l’âme faible qui n’aurait pas été attentive et vigilante ! tout d’abord l’ordre même du Seigneur ne prêtait-il pas au scandale ? Quoi donc, Dieu accepterait-il ale tels sacrifices ! ordonnerait-il aux pères d’immoler leurs enfants, de finir leur vie par une mort violente, d’être les meurtriers de ceux qu’ils ont engendrés ! voudrait-il souiller ses autels d’un tel sang ! armerait-il la main d’un père contre son fils unique ? souffrirait-il que le juste fût plus cruel que les assassins ? Ajoutez qu’Abraham était éprouvé dans une affection que nous impose impérieusement la nature, et cela, non-seulement parce qu’il était père, mais encore parce qu’il était bon père, et qu’il s’agissait d’un tel fils, d’un fils chéri, d’un fils unique, d’un fils dont la beauté, si grande au premier aspect, ne paraissait pas moins grande après examen il était en effet dans la fleur de l’âge, dans la force de la vertu, éclatant d’une double splendeur, de la splendeur de l’âme comme de celle du corps. De plus son père avait pour l’aimer un autre motif d’un bien grand poids : c’est qu’il l’avait eu contre toute espérance, et vous savez combien sont chéris ces enfants, qui, comme lui, naissent contre toute espérance et toute attente, qui nous sont accordés, comme l’avait été celui-ci, par une exception aux lois ordinaires de la nature. Mais, outre toutes ces considérations, ce qui était surtout propre à fournir une occasion de scandale, c’était la promesse de Dieu, car cet ordre allait contre elle. En effet, Dieu lui avait dit : Tes enfants seront aussi nombreux que les étoiles du ciel (Gen. 15,5) ; et maintenant, voilà que ce fils unique, qui devait remplir toute la terre de sa postérité, va être ravi à ce monde, livré à la mort, immolé avec là dernière cruauté. Cependant cette contradiction n’a pu scandaliser, ni troubler ce juste, il a évité le coup qui aurait infailliblement atteint tout homme insensé, tout homme qui ne s’élève jamais de terre. Il ne s’est pas dit : Qu’est-ce donc ? suis-je