Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 4, 1864.djvu/370

Cette page n’a pas encore été corrigée

C’est-à-dire : de même qu’une femme ne peut oublier ses enfants, ainsi Dieu ne peut oublier le genre humain. Mais tu vas comprendre que le Prophète n’a pas voulu nous montrer, par cette comparaison, que telle est la mesure de l’amour d’une mère pour le fruit de ses entrailles, telle est la mesure de l’amour de Dieu pour les hommes. S’il a choisi cet, exemple, c’est uniquement parce que l’amour maternel, bien que l’amour divin soit de beaucoup plus vif encore, est-ce que nous connaissons de plus grand dans les affections humaines. Aussi a-t-il ajouté Mais quand même la mère oublierait son enfant, moi pourtant je ne t’oublierai pas, dit le Seigneur. Ne vois-tu pas que son amour surpasse celui d’une mère ? Pour te faire Noir que cet amour laisse bien loin derrière lui la tendresse maternelle et l’affection d’un père pour ses fils, le Prophète dit : De même qu’un père a une compassion pleine de tendresse pour ses enfants, ainsi le Seigneur est touché de compassion pour ceux qui le craignent. (Psa. 102, 13) Il reproduit encore une fois sa comparaison, car il sait qu’elle est plus frappante que toutes les autres. Mais écoute le Maître de tous les prophètes et de tous les humains : voulant montrer que la sollicitude de Dieu pour nous dépasse de beaucoup celle d’un père, et qu’autant il y a de différence entre la lumière et les ténèbres ; entre la bonté et là méchanceté, autant il y en a entre l’amour de ce Dieu provident et la tendresse paternelle, il dit : Quel est celui d’entre vous qui donnera une pierre à son fils, s’il lui demande du plein ? et s’il lui demande du poisson, lui donnera-t-il un serpent ? Si donc vous, qui êtes mauvais, savez bien donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père, qui est dans les cieux, donnera-t-il des biens à ceux qui les lui demandent  ? (Mat. 7,7-11) Il montre par là qu’autant il y a de différence entre la bonté et la méchanceté, autant il y en a entre l’amour de Dieu et l’affection d’un père. J’ai rapporté ces exemples, afin que, si par la suite je vous offre de nouvelles comparaisons, vous ne vous terriez pas renfermés dans les limites du sens exprimé par les prophètes, mais que, suivant mon précepte, vous alliez outre par la pensée, et que vous vous fassiez une idée de la grandeur inexprimable d’un tel amour. Car il ne peut être contenu dans les limites d’aucune affection humaine : mais il dépasse, il laisse derrière soi les bornes de la matière, et nous propose encore, pour se faire comprendre de nous, de nouveaux exemples. Ainsi agit en effet celui qui aime : il veut montrer, de mille manières, sa tendresse à l’objet qui l’inspire, C’est ce que Dieu fait ici, en faisant entrer dans ses comparaisons tous les exemples éclatants d’amour, non pas, je le répète, pour que tu puisses mesurer par là toute la grandeur de sa bonté, mais parce que les exemples dont il se sert sont les plus frappants entre tous ceux que connaissent ceux à qui il s’adresse. Il dit par la bouche de David : Autant que le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant a-t-il affermi la grandeur de sa miséricorde sur ceux qui le craignent : et, autant que l’orient est éloigné du couchant, autant il a éloigné de nous nos iniquités. (Ps. 102,11) Il dit par la bouche d’Isaïe : Mes pensées ne sont pas vos pensées, et mes voies ne sont pas vos voies ; mais, autant que les cieux sont élevés par-dessus la terre, autant mes voies sont élevées par-dessus vus voies, et mes pensées par-dessus vos pensées. (Isa. 55,8-9) Il parle ainsi parce qu’auparavant il a dit, touchant la rémission des péchés : Je vous remettrai en abondance vos iniquités. (Id. 7) C’est pour montrer tout le sens qu’il attachait à ce mot : abondamment, qu’il introduisait ensuite la comparaison que nous avons rapportée. Mais tout cela ne lui suffit pas, et voici qu’il se sert d’une image encore plus grossière : car il dit par le prophète Osée : Comment te traiterai-je, ô Ephraïm ? comment te traiterai-je, ô Israël ? Vous abandonnerai-je comme Adama, et vous exterminerai-je comme Seboïm ? Mon cœur s’est retourné sur lui-même, il est agité de trouble et de repentir. (Ose. 11,8) C’est comme s’il disait : Je n’ai pas eu le courage de prononcer même une parole de menace ; non pour que tu te figures qu’il y a en lui quelque chose d’humain, loin de toi cette pensée, mais pour que tu apprennes, par cette comparaison grossière, que l’amour qu’il a pour nous est l’amour qui convient à Dieu, qu’il est sincère, qu’il ne peut avoir de fin. Car de même qu’un homme épris d’amour ne voudrait pas blesser, même en paroles, l’objet de sa tendresse, ainsi, Dieu lui-même nous dit : Par cela que je t’ai blessé en paroles, mon cœur s’est retourné sur lui-même. Ainsi il ne dédaigne, pas d’employer de grossières images pour montrer son amour, et cela