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qu’ils sont dignes d’envie, ce n’est pas parce qu’ils, ont foulé les flammes sous leurs pieds, parce qu’ils ont vaincu le feu dévorant ; mais parce que c’est pour rendre hommage à la vérité, à la vraie doctrine, qu’ils se sont laissés enchaîner, jeter dans la fournaise et livrer aux fers. Voilà uniquement ce qui leur constitue un glorieux trophée. Du moment qu’ils furent jetés dans la fournaise, la couronne fut mise sur leur front. Cette couronne, on commença à la tresser, sans attendre l’issue de l’événement, aussitôt qu’ils firent entendre ces paroles prononcées avec une entière confiance, librement, devant tout le peuple, à la face du roi : Il n’est pas besoin, ô roi, que nous vous répondions sur ce sujet, car notre Dieu, le Dieu que nous adorons peut certainement nous retirer du milieu des flammes de la fournaise et nous délivrer, ô roi, d’entre vos mains ; s’il ne veut pas le faire, nous vous déclarons néanmoins, ô roi, que nous n’honorons point vos dieux, et que nous n’adorons point la statue d’or que vous avez fait élever. (Dan. 3,16-18) À partir de ces paroles, je constate et proclame leur gloire ; à partir de ces paroles, vainqueurs, triomphants, ils coururent pour saisir l’éclatante couronne du martyre ; confesseurs par les paroles, ils voulurent encore être confesseurs par les effets. Quand ils furent livrés aux flammes, si les flammes respectèrent leur personne, détruisirent leurs liens, leur permirent de demeurer intacts dans le foyer brûlant ; si le feu oublia sa nature ; si la fournaise embrasée devint une source d’eau fraîche, cette œuvre surnaturelle, étonnante, fut le propre de la divine grâce ; ce fut le miracle – de Dieu. Pour ces athlètes, même avant ces prodiges, aussitôt qu’ils furent entrés dans la flamme, ils avaient érigé leur trophée, remporté leur victoire ; ils portaient au front leur couronne ; et le ciel et la terre les célébraient ; et rien ne manquait plus à leur gloire. Que pourrez-vous donc alléguer ? Vous êtes un exilé banni de votre patrie ? eux aussi. Vous avez enduré la captivité, sous des maîtres étrangers ? eux aussi ; lisez leur histoire. Mais vous n’avez personne pour vous assister, pour vous diriger, pour vous avertir, pour vous éclairer ? Eux aussi n’avaient personne pour s’occuper d’eux. Mais on vous livrait aux flammes, mais la mort était sur vous ? je crois que vous ne pourriez rien nous objecter de plus sinistre ; eh bien ! eux aussi. Voyez, ils ont persisté à travers toutes ces épreuves. Chaque difficulté ajoutait à leur gloire, à leur gloire de plus en plus éclatante, et grossissait leur récompense dans le ciel. Les Juifs avaient leur temple, avaient l’autel, l’arche, les chérubins, le propitiatoire, le voile, l’infinie multitude des prêtres : chaque jour, le culte de Dieu, les sacrifices du matin, les sacrifices du soir, le continuel enseignement des prophètes ; les vivants et les morts parlaient à leurs oreilles, leur rappelant les miracles de l’Égypte, les miracles du désert, tous les autres prodiges. Cette histoire, les Juifs l’avaient dans leurs mains ; la trouvaient inscrite sur leurs murailles, c’était pour eux que tant de faits surprenants s’étaient manifestés, au-dessus de l’ordre de la nature. Et, que dirai-je de toutes les autres marques de la sollicitude, de la providence de Dieu ? Eh bien ! non-seulement, ils n’en ont retiré aucun profit ; au contraire, ils y ont trouvé ce qui leur a été nuisible ; élevant dans le temple même, élevant des idoles ; massacrant leurs fils et leurs filles, au pied des arbres ; pratiquant tout ce qui est défendu par la loi ; souillant, de leurs exécrables sacrifices, presque toute la terre de la Palestine ; commettant toutes les abominations imaginables. Au contraire ; ces jeunes hommes, en pleine barbarie, sur une terre ennemie, dans la demeure d’an tyran, privés de tous les soins, entraînés au supplice, brûlés, non-seulement ne souffrirent par là aucun mal, ni petit, ni grand ; mais dé plus, leur gloire a grandi. Instruits par ces exemples, par les exemples semblables que réunit l’Écriture inspirée de Dieu (en effet, beaucoup d’exemples de ce genre nous sont fournis par divers personnages), cessons de croire que la difficulté des temps ou des choses, que la nécessité, la violence, la tyrannie des grands de ce monde, puisse nous servir d’excuse quand nous avons péché. Ce que j’ai dit, en commençant mon discours, je veux le redire maintenant encore en le terminant. Celui qui reçoit un dommage, un préjudice, le reçoit de lui-même et non des autres, y eût-il un nombre infini de personnes conspirant à lui faire injustice ; à lui causer préjudice et dommage. Voilà la vérité : Quand un homme ne se nuit pas à, lui-même, c’est en vain que tout ce qui peuple et les terres et les mers, conspirerait contre toi, ferait irruption sur lui, rien ne peut même effleurer celui gui pratique la vigilance, la tempérance dans le Seigneur. Soyons donc,