Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 4, 1864.djvu/342

Cette page n’a pas encore été corrigée

rien de commun avec eux. La loi avait donc pourvu à ce que les Juifs ne fissent aucun pacte avec les Chananéens, à ce qu’ils ne leur livrassent point d’or, ni rien autre chose, de peur que l’amitié ne devînt une occasion d’impiété. La loi était comme une haie autour d’eux. J’ai planté une vigne, dit-il, et je l’ai environnée d’une haie, c’est-à-dire, je l’ai environnée avec la loi, qui n’a pas d’épines, mais des prescriptions, pour protéger, pour séparer. Donc les Chananéens étaient abominables ; dignes d’exécration, des impies, des criminels, des infâmes, des êtres immondes, et, pour cette raison les Juifs ne voulaient même pas les entendre, jaloux d’ailleurs d’observer la loi. Or cette femme était chananéenne. Et voici qu’une femme, qui était sortie de ce pays-là, dit l’Évangéliste. C’est parce que cette femme était chananéenne, et s’était approchée du Christ, que le Christ dit : Qui de vous me convaincra de péché ? Est-ce que j’ai transgressé la loi ? Car s’étant fait homme, il remplissait les devoirs de l’homme.
8. Attention, maintenant. Donc, cette femme était chananéenne ; elle sortait d’un pays où les fureurs, la rage, l’impiété, la tyrannie de Satan, tous les transports des démons foulaient aux pieds la nature, où l’on ne voyait que l’aveugle brutalité des brutes, les fureurs infernales ; de plus, la loi avait dit : Entre toi et les Chananéens, rien de commun, ne leur donne rien, ne reçois rien d’eux, ni femme, ni gendre ; ni pactes, ni contrats ; car c’est pour cela que j’ai planté la haie tout autour de mon peuple ; maintenant le Christ est venu, s’est fait homme, et tout d’abord a subi la circoncision légale, a offert les sacrifices, a présenté les offrandes d’usage, s’est en tout conformé à la loi, lui qui venait pour abroger la loi. On aurait pu lui dire que c’était, parce qu’il ne pouvait pas satisfaire à la loi, qu’il l’abrogeait : il commence par y satisfaire, et ensuite, il l’abroge, parce qu’il ne veut pas que vous pensiez qu’il ne pouvait pas y satisfaire ; tout au contraire, il y satisfait en tout, selon l’usage. Voilà pourquoi il s’écrie : Qui de vous me convaincra de péché ? Donc, la loi interdisant tout rapport avec les Chananéens, les Juifs pouvant accuser le Christ et lui dire : Voilà pourquoi nous ne croyons pas en vous, c’est que vous transgressez la loi, vous avez violé la loi, vous êtes allé dans le pays des Chananéens, vous avez eu commerce avec les Chanéens, malgré la loi qui dit, tu n’auras aucun commerce ; pour cette raison, au premier moment, le Christ n’adresse aucune parole à cette femme. Attention, voyez comme il satisfait à la loi, en différant d’accorder à cette femme la guérison, comme il ferme la bouche aux Juifs, et ranime cette femme : Mais il ne lui répondit pas un seul, mot, dit l’Évangéliste. Ne vous saisissez pas de prétextes ; voyez, je ne dis rien ; voyez, je ne lui parle pas ; voyez, le malheur est là, et je ne me montre pas ; voyez le naufrage, et moi, le pilote, je ne lutte pas contré la tempête, parce que vous êtes là, méchants, et que je ne veux pas vous fournir de prétextes. Voyez, cette femme a rassemblé autour de moi le peuple qui me regarde, et elle n’a pas encore une réponse ; je ne veux pas que vous me disiez, vous vous êtes livré aux Chananéens, vous avez transgressé la loi, nous nous emparons de ce prétexte pour ne pas croire en vous. Ainsi vous le noyez, s’il n’a pas répondu à la femme, c’est pour mieux répondre aux Juifs ; son silence envers la femme, était une parole qui accusait la méchanceté des Juifs.
9.: Or, en cela il ne consultait pas sa dignité, il trouvait un tempérament pour condescendre à leur infirmité. Quand il purifia le lépreux, il lui dit : Allez, offrez le don prescrit par Moïse. (Mt. 8,4) Tu l’as purifié, et tu le congédies en lui recommandant la loi de Moïse. Oui. Pourquoi ? Pour les Juifs, pour qu’ils ne commencent pas à m’accuser d’avoir transgressé la loi. Aussi, quand il guérit le lépreux, il le fit d’une manière inaccoutumée ; apprenez comment : Et, en même temps, un lépreux vint à lui, et lui dit : Seigneur, si vous voulez, vous pouvez me guérir. Jésus, étendant la main, le toucha, et lui dit : Je le veux, soyez guéri. (Mt. 8,2, 3) La loi ; défendait de toucher un lépreux. Quand Naaman, un général, couvert de la lèpre, vint trouver le prophète Élisée (2R. 5,9, 10), son disciple lui dit : Il y a, à la porte, un général, couvert de la lèpre. Le prophète envoie son disciple au-dehors pour lui dire : Allez vous laver dans le Jourdain. Il n’osa pas sortir lui-même, voir, toucher le lépreux. Élisée donc purifia le lépreux ; pour que les Juifs ne pussent pas dire que le Christ avait opéré la purification de la même manière qu’Élisée, celui-ci n’ose pas toucher le malade ; le Christ, au contraire, le touche et dit : Je le veux,