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épreuves pour dissiper les brebis, et c’est le contraire qui est arrivé ; les épreuves ont fait accourir le pasteur.
Où en sommes-nous ? en possession de notre gloire. Où en sont nos ennemis ? à subir leur honte. Où sont-ils donc ? on ne les voit plus. Je parcours la place publique, je n’aperçois personne. Il y avait des feuilles, le vent a soufflé, elles sont tombées ; il y avait de la paille, et elle s’est dispersée, et le froment a paru dans sa maturité ; il y avait du plomb, qui a fondu, et l’or est resté, l’or pur. Quel est donc celui qui les chasse ? personne, mais ils ont un ennemi secret, la conscience, qu’ils portent dans leur cœur à côté du péché. Ils savent ce qu’ils ont fait. Caïn voulait tuer son frère (Gen. 4) ; tant qu’il voulut le tuer, son mauvais désir ne s’éteignit point dans son cœur ; le péché une fois commis, gémissant, tremblant, le meurtrier ne fut plus qu’un vagabond sur la terre. Ceux-ci, pour n’être pas des meurtriers de fait, n’en sont pas moins des meurtriers, par (intention. Le meurtre a été consommé autant qu’il a dépendu de leur' scélératesse : la vie conservée, ne l’a été que par la bonté de Dieu. Ce que j’en dis, c’est pour donner à vôtre ardeur l’huile fortifiante, c’est pour que les épreuves ne vous causent jamais d’épouvante. Êtes-vous pierre ? regardez sans épouvante les flots. Sur cette pierre j’édifierai mon Église, et les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre elle. (Mt. 16,18) Dieu l’a dit. Tantôt guerres du dehors, tantôt guerres du dedans, mais nul ne peut submerger le navire.
2. Je ne voudrais pourtant pas dépenser tout notre temps à rappeler leurs crimes ; abandonnons-les aux terreurs de leur conscience, laissons leur bourreau torturer ces âmes aux pensées déréglées, aux désirs sans frein, laissons ces fugitifs que personne ne poursuit, ces infâmes que nul ne veut combattre, quant à nous, préparons la table accoutumée. Il n’est pas juste de perdre le temps à parler de leurs crimes, et de négliger nos enfants que la faim tourmente. Hier donc, c’est Paul qui nous a servi notre table ; aujourd’hui, c’est Matthieu qui va la dresser ; hier, le faiseur, de tentes ; aujourd’hui le publicain ; hier le blasphémateur ; aujourd’hui l’homme à la main rapace ; hier le persécuteur ; aujourd’hui l’avare. Mais ce blasphémateur n’est pas resté blasphémateur, il est devenu un apôtre ; et l’homme de rapines n’a pas toujours vécu dans les rapines, il est devenu un Évangéliste. Je constate et la perversité première, et la vertu qui l’a suivie, afin que vous appreniez toute l’efficacité du repentir, afin que vous ne désespériez jamais de votre salut. Nos docteurs furent d’abord illustres dans le péché, mais bientôt ce fut dans la justice que s’illustrèrent, jet le publicain et le blasphémateur, ces deux sommets de la perversité. Cap qu’est-ce que la profession de publicain ? la rapine au nom de la loi, la violence pleine de confiance, l’injustice soutenue parla loi ; les brigands sont moins durs que le publicain. Qu’est-ce que la profession de publicain ? la violence qui se fait un rempart de la loi, qui transforme le médecin en bourreau. Comprenez-vous mes paroles ? Les lois, voilà nos médecins, et il arrive que ces médecins deviennent des bourreaux, car parfois ils ne guérissent pas la blessure, ils l’enveniment. Qu’est-ce que la profession de publicain ? un péché sans pudeur, une rapine sans prétexte, plus détestable que le brigandage. Le brigand, du moins, rougit en commettant le vol, mais l’autre, c’est avec une pleine assurance qu’il pille, Eh bien ! ce publicain tout à coup est devenu un Évangéliste. Comment et de quelle manière ? Chemin faisant, dit-il, Jésus vit Matthieu assis au bureau des impôts, et il lui dit : Suivez-moi. (Mt. 9,9) O puissance de la parole ! l’hameçon est entré, et voilà le soldat captif, la boue est devenue de l’or ; l’hameçon est entré, Et aussitôt se leva et il le suivit. Il était au fond de l’abîme de la perversité, et il s’est élevé sur la cime de la vertu. Que personne donc, mes bien-aimés, ne désespère de son salut. La perversité n’est pas le propre de la nature ; nous avons reçu en privilège le choix volontaire et la liberté. Tu es publicain ? tu peux devenir Évangéliste. Tu es blasphémateur ? tu peux devenir apôtre. Tu es un brigand ? tu peux voler le paradis. Tu es livré à la magie ? tu peux adorer le Seigneur. Il n’est pas de vice de l’âme, qui ne puisse être dissipé par le repentir. Voilà pourquoi le Christ s’est choisi ceux qui habitaient les sommets de l’iniquité, il n’a voulu nous laisser pour le dernier jour aucun subterfuge.
3. Ne me dites pas : Je suis perdu, que me. reste-t-il ? Ne me dites pas, je suis un pécheur, que ferai-je ? Vous avez un médecin plus fort que votre mal, vous avez un médecin qui sait vaincre la nature de votre maladie, vous avez un médecin à qui il suffit d’un signe pour guérir,