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représente cette Jérusalem céleste.
5. Je sais que tout cela est bien subtil, mais avec de l’attention, nous pourrons tout saisir. Nous avons envisagé le côté mystérieux et dogmatique, mais, si vous le voulez, j’entrerai dans des considérations plus pratiques. Rébecca était stérile, afin de faire éclater la pureté de son mari : il ne la répudia point ; bien qu’alors aucune loi ne s’y opposât, il ne prit pas une autre femme pour remplacer son épouse de race libre. Cependant c’est ce que font bien des gens sous prétexte d’avoir des enfants et en réalité pour satisfaire leur libertinage : ils renvoient les unes, appellent les autres, excitent contre elles les concubines et rem plissent leurs maisons de mille discordes. Mais ce juste n’en agit pas ainsi : content de la femme que Dieu lui avait donnée, il priait le Maître de la nature d’étendre pour lui les bornes de la nature, et il ne reprochait rien à sa femme. Comment prouver qu’il ne lui reprochait rien ? Par l’Écriture elle-même. S’il lui eût fait des reproches, l’Écriture l’aurait aussi raconté et ne l’aurait point passé sous silence. En effet, elle raconte les bonnes et les mauvaises actions des justes afin que nous imitions les unes et que nous évitions les autres. Aussi quand sa bru Rachel se plaignait à son mari, fils d’Isaac, et que celui-ci répondait durement, l’Écriture a tout rapporté et n’a rien caché, quand elle lui dit : Donne-moi des enfants, ou je meurs. Que répond-il ? Je ne suis pas Dieu, c’est lui qui t’a privée du fruit de tes entrailles. (Gen. 30,1-2) Cette demande que fait la femme, donne-moi des enfants, manque de raison. Tu dis à ton mari : donne-moi des enfants, sans tenir compte du Maître de la nature. Aussi le mari, par sa réponse sévère, repoussa sa demande insensée et lui montra à qui elle devait être faite. Mais Isaac ne dit rien de semblable et aussi sa femme ne lui fit ni plainte, ni lamentations.
Ces exemples nous enseignent en même temps la chasteté et la foi. Le mari retrouve sa foi en priant Dieu ; sa pureté éclate en ce qu’il ne répudie point sa femme ; enfin, quand il ne lui reproche rien et qu’il ne désespère point, il met en évidence sa patience et sa modération, ainsi que sa bonté et son amour pour sa femme. Il n’a point agi comme bien des personnes maintenant qui, en pareilles circonstances, ont recours aux philtres et aux sortilèges, toutes choses superflues, inutiles, nuisibles, et qui ne servent qu’à perdre l’âme, il négligea toutes ces ressources, et, dédaignant tous les secours humains, il ne s’adressa qu’au Seigneur de la nature qui peut seul accomplir de tels vœux.
6. Écoutez cela, maris et femmes, étudiez-le, et imitez tous ce juste. Que la femme ne respecte rien plus que son mari ; que le mari n’aime rien plus que sa femme. La sauvegarde de l’existence, c’est l’accord du mari et de la femme, c’est là ce qui conserve l’univers. De même qu’un édifice s’écroule quand les fondements sont ébranlés, de même la discorde entre les époux bouleverse toute la vie. Voyez en effet ! le Monde est fait de villes, les villes de maisons, et chaque maison contient un mari et sa femme. Si donc la concorde n’existe pas dans les ménages, le désordre s’étendra jusqu’aux villes ; si les villes sont troublées,-l’univers entier sera plein de séditions, de guerres et de combats. C’est pour cela que Dieu fait de cette concorde une recommandation toute particulière, c’est pour cela qu’il défend de répudier sa femme, excepté pour cause d’adultère.
Mais, direz-vous, si elle est insolente, prodigue et luxueuse, si elle a une foule d’autres défauts ? Supportez cela avec constance, et ne la renvoyez pas à casse de ses vices, mais corrigez ces vices eux-mêmes. Vous êtes à la tête du ménage, c’est pour en guérir le corps. En effet, notre corps aura beau avoir mille plaies, jamais nous ne le séparerons de la tête. Da nomme ne vous séparez pas de votre femme, car elle est comme votre corps. Aussi saint Paul disait : un mari doit aimer sa femme comme si c’était son propre corps. (Eph. 5,28) La même loi s’étend aussi aux femmes. De même que tu entretiens et que tu cultives ta tête, ô femme, de même tu dois soigner ton mari : et ce n’est pas sans raison que nous insistons sur cette nécessité. Je sais combien d’avantages procure la concorde entre mari et femme, je sais combien la discorde entraîne de maux. Alors la richesse, le bonheur d’avoir des enfants nombreux et vertueux, les magistratures et la puissance, la gloire, les honneurs, les délices, le luxe et toutes les félicités imaginables, ne peuvent réjouir un mari et une femme qui sont en querelle.
7. Voilà donc quelle doit être notre principale étude. Votre femme a un défaut ? faites ce qu’a fait Isaac : priez Dieu. S’il a pu, par la