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C’est là le paiement qu’on exige pour cette médecine ; et le riche et le pauvre sont admis également à en profiter, ou plutôt ils ne sont pas admis également à ce profit : bien souvent le pauvre en retire une utilité plus grande. Pourquoi ? c’est que le riche est préoccupé de mille soucis, l’orgueil le gonfle, son opulence le rend superbe, il passe sa vie dans une majestueuse indolence ; il n’a ni application ni zèle ; il reçoit d’un air indifférent le remède que lui offre l’Écriture ; au contraire, le pauvre, qui ne connaît ni les délices, ni le luxe, ni la vie indolente et relâchée, qui passe tous ses jours dans le travail des mains, dans dés fatigues légitimes, en retire un accroissement considérable de sagesse ; il devient plus attentif, plus fort ; il recueille avec plus de soin la parole. Aussi, comme il paye un plus grand prix, il emporte ; en se retirant, un profit plus considérable.
2. Mon intention n’est pas, en parlant ainsi, de blâmer, quels qu’ils soient, tous les riches, de vanter quels qu’ils soient, tous les pauvres ; car les richesses ne sont pas un mal, ce qui est un mal, c’est l’abus ; la pauvreté n’est pas un bien, ce qui est un bien, c’est le bon usage de la pauvreté. Ce riche du temps de Lazare, n’a pas été tourmenté parce qu’il était riche, mais parce qu’il était cruel et sans entrailles. Ce pauvre, porté dans le sein d’Abraham, n’a pas été célébré parce qu’il était pauvre, mais parce qu’il supportait sa pauvreté, en rendant à Dieu des actions de grâces. En effet, parmi les choses (faites attention, je vous en prie, soyez bien appliqués à suivre ce discours ; vous pourrez y trouver la sagesse dont vous avez besoin ; il pourra chasser loin de vous les pensées mauvaises, vous apprendre à bien juger ce que sont les choses en réalité) ; donc, parmi les choses, les unes sont naturellement bonnes ; les autres, naturellement mauvaises : il en est qui ne sont ni bonnes, ni mauvaises, mais indifférentes par elles-mêmes. C’est une bonne chose en soi que la piété ; une mauvaise chose, que l’impiété ; une bonne chose que la vertu, une mauvaise chose que la perversité. Quant à la richesse, quant à la pauvreté, elles ne sont, en soi, ni bonnes ni mauvaises. C’est la volonté des riches ou des pauvres ; qui les fait ou bonnes ou mauvaises. Si vous vous servez de votre fortune,« pour pratiquer la charité, elle devient, pour vous, la matière d’une chose essentiellement bonne ; si, au contraire, vous l’employez à faire des rapines, à vous agrandir sans mesure, à commettre des injustices, vous en avez corrompu l’usage ; ce n’est pas la faute de la richesse, mais de celui qui l’emploie pour commettre des injustices. Même observation sur la pauvreté. Si vous la supportez noblement, en bénissant le Seigneur, elle devient pour vous une occasion, un moyen d’acquérir des couronnes ; si, au contraire, parce que vous êtes pauvres, vous blasphémez le Créateur, si vous accusez sa providence, vous faites servir à mal la pauvreté. Et ici, ce n’est pas à la pauvreté que nous imputerons le blasphème, mais à celui qui ne la supporte pas sagement ; car, il est toujours vrai que l’éloge et le blâme ne sont dus qu’à notre intention, à notre volonté. Les richesses sont un bien, mais non d’une manière absolue, un bien, seulement pour celui qui est sans péché. Et maintenant, la pauvreté est un mal, mais non d’une manière absolue : un mal, pour l’impie, parce qu’il ne s’y résigne pas, parce qu’il s’indigne, parce qu’il accuse son Créateur.
3. Donc, n’accusons pas la richesse, ne blâmons pas la pauvreté d’une manière absolue ; blâmons seulement ceux qui ne savent pas s’en servir. Quant aux choses, elles sont, d’elles-mêmes, indifférentes. Nous disions donc (il est bon de reprendre notre première pensée), que le riche et le pauvre jouissent avec une égale abondance, avec une égale confiance, de nos remèdes ; nous ajoutions que souvent le pauvre se les applique avec un plus grand zèle. La première vertu de ces remèdes, ce n’est pas de guérir les âmes, ce n’est pas de conserver longtemps leur efficacité, ce n’est pas de triompher des maladies, ce n’est pas, d’être gratuitement utiles, également offerte aux riches et aux pauvres ; ils ont encore une autre vertu qui ne le cède en rien à ces autres, avantages, si précieux. Quelle est donc cette vertu ? C’est que ceux qui viennent chercher leur guérison, nous ne les faisons pas connaître au public ; les malades qui vont trouver les médecins du monde, ont un grand nombre de spectateurs qui voient leur plaie ; il faut que le médecin la découvre, avant d’y appliquer le remède : ici, on ne procède pas de la même manière, nous voyons des malades sans nombre, et notre cure est secrète. Et en effet ; nous ne faisons pas comparaître les pécheurs pour divulguer leurs péchés ; nous proposons, à tous, la doctrine qui leur est commune, et nous laissons à la conscience des auditeurs le