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à son mari, le culte qu’elle avait pour lui, elle pourra le convertir aux choses spirituelles. Si vous me dites que le veuvage était un malheur autrefois, voici ce que je vous répondrai : La mort aussi a été une malédiction, et la mort est devenue une dignité pour qui sait noblement la braver. Voilà comment les martyrs conquièrent leur couronne, voilà de même comment la veuve s’élève à un rang si haut.
2. Voulez-vous comprendre la grandeur de la veuve, de quel honneur elle est digne auprès de Dieu, quel amour Dieu a pour elle, de quelle protection puissante elle peut couvrir auprès de Dieu ceux qui sont déjà condamnés ; les désespérés qui n’osent pas murmurer une parole, qui sont détestés de Dieu, privés de tout espoir d’indulgence ; comme elle peut les délivrer, les réconcilier, non seulement obtenir leur pardon, les arracher au supplice, mais leur conquérir la confiance dans l’affection du Seigneur, la gloire ; leur rendre une splendeur plus pure que les rayons du soleil, quand ils seraient les plus souillés parmi tous les hommes ? Entendez Dieu lui-même parlant ainsi aux Juifs : Lorsque vous étendrez vos mains vers moi, je détournerai mes yeux de vous, et lorsque vous multiplierez vos prières, je ne vous écouterai point, parce que vos mains sont pleines de sang. (Is. 1,15) Eh bien ! pourtant, à ces scélérats, à ces homicides, à ces infâmes souillés de toute espèce d’ignominie, il promet de se réconcilier avec eux s’ils portent secours aux veuves à qui l’on fait une injustice. Car après avoir dit : Je détournerai mes yeux de vous, et je ne vous écouterai point, il dit  : faites justice à l’orphelin, défendez la veuve et venez, et soutenez votre cause contre moi. Quand vos péchés seraient comme l’écarlate, je les rendrai blancs comme la neige. (Id. 17,18) Voyez-vous quelle grande puissance possède la veuve, non pas auprès d’un prince ou d’un roi de la terre, mais auprès du Roi même qui règne dans les cieux ? quelle colère elle apaise ! comme il lui est donné de calmer le Seigneur irrité contre ceux que possède un mal incurable ! quel pouvoir elle a pour les arracher à l’insupportable supplice ! ce qu’elle fait d’une âme que le péché a souillée et rendue immonde ! Elle la purifie, elle lui rend tout l’éclat de la plus parfaite pureté. Gardons-nous donc de mépriser la veuve, entourons-la de toute notre sollicitude, de tout notre zèle ; pour nous quelle patronne, celle qui est vraiment une veuve, ? Mais il est utile de considérer ici, avec soin, de quelles veuves parle le texte sacré. On entend par veuves, celles qui, tombées dans la plus grande indigence, et portées sur les registres, sont nourries aux frais de l’Enlise, comme cela se pratiquait au temps des apôtres. Il s’éleva, dit l’Écriture, un murmure parmi les Juifs grecs, parce que leurs veuves étaient méprisées dans la dispensation de ce qui se donnait chaque jour. (Act. 6,1) On appelle aussi de ce nom les femmes qui ne connaissent nullement l’indigence ; qui, au contraire, sont, riches, à la tête de leur maison, et n’ont perdu que, leur mari seulement. Voyons donc, de quelles veuves, le texte parle ici, en disant, que celle qui sera choisie pour être mise au, rang des veuves, n’ait pas moins de soixante ans. Est-ce de celle qui a besoin de secours, qu’il faut nourrir aux frais de l’Église ; ou de celle qui n’est nullement dans l’indigence, qui, au contraire, possède de grandes richesses ? Il est évident qu’il est question de la dernière ; car, lorsqu’il parle de l’autre, qui est tourmentée par la faim, il ne se préoccupe ni d’âge, ni de bonnes mœurs, mais il dit, d’une manière absolue : Si quelqu’un des fidèles ou si quelqu’une des fidèles a des veuves, qu’il leur donne ce qui leur est nécessaire, et que l’Église n’en soit pas chargée. (1Tim. 5,16) Il ne dit pas : Pourvu qu’elle ait soixante ans ; il ne dit pas : Si elle a exercé l’hospitalité, si elle a lavé les pieds des saints (Id. 5,10) ; et c’est avec raison que le texte n’apporte pas ces restrictions. En effet, où il faut remédier : à l’indigence, on ne doit pas s’occuper de l’âge. Qu’importe qu’elle n’ait que cinquante ans, si elle meurt de faim ? qu’importe qu’elle soit jeune, celle dont le corps est mutilé ? Faudra-t-il qu’elle dorme, attendant qu’elle ait soixante ans ? Ce serait le comble de la cruauté. Ainsi, quand il faut calmer la faim, il ne s’inquiète pas curieusement de l’âge ou des bonnes mœurs. Mais, quand il n’y a plus à secourir l’indigence, quand il s’agit d’un honneur, d’une dignité à conférer, il institue, et il a raison, une enquête qui se rapporte aux mœurs.
3. C’est que, comme il y a des chœurs de vierges, il avait aussi des chœurs de veuves ; et il n’était pas permis d’en former les listes indifféremment. Il n’est donc pas question ;