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sommes sans trouble, comme le navire au port. Prenons donc garde de nous enorgueillir de notre foi, de succomber aux tentations, ou d’abuser, pour nous relâcher, de la paix de l’Église. Ne cessons point de jeûner et de veiller, car nous avons encore à lutter contre les passions de notre nature. Nous n’avons plus d’ennemis dans les hommes, mais nous en trouvons dans les plaisirs de la chair ! Les tyrans et les rois ne nous font plus la guerre, mais la colère, la vanité, l’envie, la jalousie, et les autres sentiments coupables nous la font encore. À peine délivrés d’une épreuve, il s’en présente de nouvelles où if faut triompher. Si je vous ai rappelé les malheurs de ces temps, c’est afin que ceux d’entre vous qui sont éprouvés aujourd’hui soient efficacement consolés, et que ceux qui vivent dans le calme et ne sont point exposés à ces périls, mettent tout leur zèle à combattre les pensées déraisonnables. C’est pour nous instruire, nous consoler, nous soutenir, que toutes ces choses ont été écrites. Je vais vous les faire connaître, et vous montrer la grandeur des dangers que couraient alors, non seulement les maîtres, mais les disciples ; écoutez ce que Paul écrit aux. Hébreux : rappelez en votre mémoire ce temps auquel, après avoir été illuminés par le baptême, vous avez soutenu de grands combats et de terribles persécutions. (Heb. 10,32) Car il n’y eut pas le plus petit intervalle de temps : dès le premier jour que fut prêchée la doctrine, les fidèles furent éprouvés, et, dès le baptême, tombèrent dans les périls. Et voici comment : D’une part, vous avez servi de spectacle au monde par les outrages et les tribulations que vous avez endurés. (Id. 33) Ils étaient conspués, injuriés, moqués, bafoués ; on les appelait fous, insensés, parce qu’ils avaient renoncé à la religion de leurs pères et adopté de nouveaux dogmes. Ces outrages pourraient certes ébranler une âme où la foi n’aurait pas poussé de profondes racines. Car rien ne blesse une âme aussi cruellement que l’outrage, rien n’anéantit l’esprit et la raison comme la moquerie et la raillerie. Bien des hommes ont succombé au sarcasme. Je vous dis ces choses afin que nous nous attachions avec confiance à notre foi. Car, si dans le temps que le monde entier outrageait les fidèles, ils ne succombèrent point, à plus forte raison devons-nous, avec une entière confiance, nous attacher à la vérité révélée, quand toute la terre a embrassé notre foi. Or, non seulement les fidèles supportèrent alors les accusations, les injures et les outrages, mais ils eurent de la joie à les souffrir ; la suite des paroles de l’Apôtre nous le prouve : Vous avez vu avec joie tous vos biens pillés. (Id. 34) Voyez-vous qu’autrefois on confisquait les biens des fidèles, et qu’on les livrait en proie à quiconque leur voulait nuire ? Voilà donc ce que Paul écrit aux Hébreux,
5. Il rend aux Thessaloniciens le même témoignage : Vous êtes devenus, leur dit-il, nos imitateurs et les imitateurs du Seigneur, ayant reçu la parole de l’Évangile parmi de grandes afflictions. (1Th. 1,6) Vous voyez que ce peuple avait aussi des afflictions, et de grandes afflictions. Les tentations étaient violentes, et continuels les dangers ; ni repos, ni trêve pour ceux qui luttaient alors. Mais parmi ces maux, ils ne s’indignaient point, ils ne perdaient point courage ; au contraire, ils se réjouissaient. Comment le savons-nous ? par les paroles mêmes de Paul. Après avoir dit : Parmi de grandes afflictions, il ajoute : Avec la joie du Saint-Esprit. (Id) De la tentation naissaient les afflictions, mais ils se réjouissaient en songeant à la cause de la tentation. Ce leur était une suffisante consolation de savoir qu’ils souffraient pour le Christ. Aussi, je les admire moins d’avoir en ces temps supporté les afflictions, que de s’être réjouis de souffrir pour Dieu. Car une âme généreuse et pleine de l’amour de Dieu, sait supporter les afflictions et les peines ; mais supporter dignement la tentation et rendre grâces à Celui qui permet qu’on soit éprouvé, c’est là le signe du plus excellent courage, d’une âme zélée et qui s’élève au-dessus de toutes les choses terrestres.
Ce n’est point seulement en ce passage, mais dans d’autres encore que l’Apôtre nous enseigne tout ce que les fidèles de ce temps avaient à souffrir de leurs proches et de leurs parents, et c’étaient les plus terribles maux. Vous êtes devenus, dit-il, les imitateurs des Églises de Dieu qui sont dans la Judée. En quoi sont-ils devenus leurs imitateurs ? En ce que vous avez souffert les mêmes persécutions de la part de vos concitoyens que ces Églises ont souffrances de la part des Juifs. (Id. 2,14) Voilà encore la guerre, mais la guerre civile, surcroît de douleurs. Si un ennemi m’avait outragé, je l’aurais souffert, dit le prophète ; mais c’est toi qui vivais dans un même esprit