Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 4, 1864.djvu/242

Cette page n’a pas encore été corrigée

L’une veut que nos mains soient pures de sang, l’autre ferme aux desseins pervers l’accès de nos âmes. Ces lois sont donc en harmonie, et non en opposition, comme s’efforcent à tout propos de l’établir les ennemis de la vérité, qui ne voient pas qu’ils jettent sur ce Dieu du Nouveau Testament la plus grave accusation de négligence et d’incurie. Car il serait convaincu (que ce blasphème retombe sur la tête de ceux qui me forcent de le proférer), et d’avoir mal réglé ce qui nous touche. Je vais dire comment : L’enseignement élémentaire de l’Ancien Testament est semblable au lait ; la philosophie du Nouveau est une nourriture solide. Donnerait-on à l’enfant, avant le lait, de la nourriture solide ? C’est là ce qu’aurait fait ce Dieu du Nouveau Testament, s’il n’avait commencé par donner l’Ancien. Avant de nous donner le lait, avant d’instruire notre enfance dans la loi, il nous aurait donné une nourriture solide. Et ce n’est point la seule accusation qu’on fasse peser sur lui, il en est une plus grave. Il serait coupable de n’avoir songé à notre génération qu’au bout de cinq mille ans. Si ce n’est point le même Dieu qui par ses prophètes, ses patriarches et ses justes, a pris soin de nous, si c’est un autre Dieu, sa Providence a été bien lente et bien tardive ; on dirait que le repentir l’a porté a se souvenir de nous. Or, il serait indigne non seulement d’un Dieu, mais du dernier des hommes, de laisser tant de temps périr tant d’âmes et de songer au bout des siècles à s’occuper du petit nombre qui survit :
4. Voyez-vous les blasphèmes sans nombre de ces hommes qui assignent à deux dieux différents l’Ancien Testament et le Nouveau ? Tous ces blasphèmes s’évanouissent, si nous accordons que les deux Testaments émanent du même Dieu. On verra alors que sa Providence a toujours disposé selon la sagesse les affaires des hommes, d’abord par la loi, aujourd’hui par la grâce, et que ce n’est pas depuis peu ni tout récemment, mais depuis le premier jour du monde, qu’il a pris soin de nous. Mais pour mieux fermer la bouche aux impies, appelons en témoignage les paroles mêmes des prophètes et des apôtres dont la voix proclame hautement que le législateur du Nouveau Testament est le même que celui de l’Ancien. Appelons Jérémie, le prophète sanctifié dès le sein de sa mère, qu’il nous montre clairement qu’il n’y a qu’un Dieu dans l’Ancien Testament et dans le Nouveau. Que dit-il ? Que proclame-t-il du chef-même du législateur ? Je vous donnerai un Testament Nouveau, autre que celui que je donnai à nos pères. (Jer. 31,31) Ainsi, le Dieu qui donne le Nouveau Testament est le même Dieu qui avait jadis donné l’Ancien. Cela ferme aussi la bouche aux sectateurs de Paul de Samosate, qui nient l’existence du Fils de Dieu avant les siècles. Car s’il n’était pas avant l’enfantement de Marie, s’il n’existait pas avant de se revêtir de la chair et de paraître à nos yeux, comment aurait-il pu porter une loi sans exister ? Comment aurait-il dit : Je vous donnerai un Testament Nouveau, autre que celui que je donnai à vos pères ? Comment avait-il pu donner un Testament à leurs pères, puisqu’il n’existait pas, à ce que prétendent ces hérétiques ? Contre les Juifs et contre les sectateurs de Paul qui sont attaqués du même mal, le témoignage du prophète suffit. Mais pour fermer aussi la bouche aux Manichéens, prenons des témoignages dans le Nouveau Testament, puisque l’Ancien ne compte point à leurs yeux, sans toutefois qu’ils fassent plus d’honneur au Nouveau ; car, tout en paraissant lui rendre hommage, ils l’insultent aussi bien que l’Ancien : Premièrement, quand ils l’en séparent, ils ébranlent par cela seul son autorité. Car la vérité s’éclaire de la lumière des prophéties qui l’ont précédée, et à laquelle ces hommes ferment leurs yeux, sans comprendre qu’ils font plus d’injure aux apôtres qu’aux prophètes eux-mêmes. Voilà donc la première injure qu’ils font au Nouveau Testament. La seconde, c’est, qu’ils en retranchent une grande partie. Mais telle est la force des choses qui y sont contenues, que ce qu’il en reste suffira à mettre au jour leur malice. Car ces membres mutilés crient, redemandent et réclament sans cesse d’être réunis aux membres dont ils ont été violemment séparés et avec lesquels ils composaient un tout harmonique ; un corps vivant.
5. Comment donc montrerons-nous que le législateur est le même dans l’Ancien Testament et dans le Nouveau ? Par les paroles mêmes des apôtres que nos adversaires admettent, et qui paraissent au premier regard accuser l’Ancien Testament, mais qui le défendent au contraire, et prouvent qu’il contient une révélation divine et venue d’en haut. C’est la sagesse du Saint-Esprit qui a voulu que, se trompant aux apparences, ceux qui calomniaient la loi admissent malgré eux et sans s’en douter la défense même de la loi