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HOMÉLIE. MON PÈRE, S’IL EST POSSIBLE, QUE CE CALICE PASSE LOIN DE MOI : TOUTEFOIS, NON MA VOLONTÉ, MAIS LA VÔTRE (MATTH. XXVI 39).


Contre les Marcionites et les Manichéens ; – qu’il ne faut pas s’exposer au danger, mais préférer la bonté de Dieu à tout le reste.

AVERTISSEMENT et ANALYSE.


L’homélie suivante ne nous fournit aucun indice d’où l’on puisse connaître en quel lieu et en quel temps elle a été prêchée. Il parait seulement, qu’outre les Marcionites et les Manichéens, saint Chrysostome y combat les Anoméens ; ce qu’il a fait plusieurs fois en leur présence, n’étant que prêtre à Antioche.
1° Puisque les prophètes n’ont pas ignoré les circonstances de la passion de Jésus-Christ, à plus forte raison ne les a-t-il pas ignorées lui-même. – 2° Il n’est pas permis non plus de dire que Jésus-Christ ait refusé de se soumettre à sa passion ; voyez, en effet, la sévère réprimande qu’il fait à saint Pierre qui voulait l’en détourner. Un moment avant d’être crucifié ne disait-il pas à son Père : L’heure est venue, glorifiez votre Fils, comme si de la croix devait sortir toute sa gloire. Merveilles opérées parla croix. – 3° C’est à tort que les Anoméens et les Ariens se servent de ce texte : Mon Père, s’il est possible, etc, pour soutenir leurs erreurs. Les demandes que Jésus-Christ faisait à son Père, il les faisait comme homme et non comme Dieu. Le Père et le Fils n’ont qu’une seule et même volonté. – Enseignement sur l’Incarnation. – Comme ce mystère est au-dessus de la portée de l’esprit humain, Dieu, pour le rendre croyable, l’a fait annoncer par ses prophètes. Il a paru lui-même dans le monde, et afin qu’on ne le prît pas pour un fantôme, il a prouvé qu’il était vraiment homme, en souffrant toutes les vicissitudes et toutes les incommodités attachées à la nature humaine, en subissant enfin le supplice de la croix. – 4° Si tous ces signes n’ont pu empêcher Marcion, Valentin, Manès et tant d’autres hérésiarques, de révoquer en doute le mystère de l’Incarnation, que serait-il arrivé si Jésus-Christ exit été affranchi des infirmités humaines ? N’aurions-nous pas vu de plus grands excès encore ?
1. Si nous avons naguère traité durement ces hommes cupides qui ravissent le bien d’autrui et ne se lassent pas d’entasser vol sur vol, ce n’est pas pour les blesser, mais pour les guérir ; ce ne sont pas les personnes que nous haïssons, mais les vices. Le médecin, lui aussi, ouvre la plaie, non pour nuire au corps malade, mais au contraire, pour le défendre contre le mal, contre le fléau. Aujourd’hui toutefois donnons-leur un peu de repos, afin qu’ils puissent respirer et de peur qu’un traitement trop énergique et trop continu ne les empêche de rechercher nos soins. C’est ce que font aussi les médecins ; sur la plaie qu’ils ont ouverte, ils appliquent des préparations médicales et laissent passer quelques jours pendant lesquels ils s’efforcent d’apaiser la douleur. Pour les imiter, recherchons comment nous pourrons rendre cette instruction utile aux pécheurs dont nous nous occupions, et ne traitant que le dogme, suivons la lecture de ce jour. Car beaucoup, je pense, se demandent avec étonnement comment le Christ a pu parler ainsi. Les hérétiques, ici présents, pourraient aussi s’emparer de ces paroles pour dresser un piège aux plus faibles d’entre nos frères. Pour repousser leurs attaques et délivrer les fidèles de toute agitation, de toute inquiétude, je veux étudier ces paroles, les exposer longuement et descendre au fond des choses. Car de quoi servirait la lecture sans l’intelligence de ce qu’on lit ? L’eunuque de la reine Candace aussi lisait, mais jusqu’à ce qu’il eût trouvé quelqu’un pour lui expliquer ce qu’il avait lu, il n’en avait point retiré grand