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et autres supplices inexprimables ? S’il voulait les effrayer, il aurait dû recourir à ces châtiments d’un ordre supérieur, et non pas à ceux qui furent infligés dans le désert. En effet, les coupables d’alors, s’ils furent punis, le furent avec moins de rigueur et sur le coup, et tout fut terminé dans un jour ; au lieu que les damnés subiront des peines éternelles en même temps que plus rigoureuses. Pourquoi donc a-t-il choisi cet exemple afin d’effrayer, au lieu de rappeler les paroles du Christ ? En effet, rien ne l’empêchait de leur dire : Je ne veux pas que vous ignoriez, mes frères, les lois que le Christ a édictées au sujet de ceux qui, ayant la foi, n’auront pas, une vie sans reproche. Ne voyez-vous pas qu’il a exclu du royaume des cieux des gens qui avaient fait des miracles et se montraient prophètes, lorsqu’il a dit : Beaucoup me diront dans ce, jour : Seigneur, Seigneur, n’est-ce pas en votre nom que nous avons chassé des démons, n’est-ce pas en votre nom que nous avons prophétisé, et que nous avons fait beaucoup de miracles ? Et alors je leur dirai hautement Retirez-vous de moi, je ne vous connais pas, artisans d’iniquité ! (Mat. 7,22-23) Ce qu’il reprochait aux vierges, ce n’était pas de manquer de foi ou d’être infidèles aux dogmes ; c’est à cause de leur vie dissolue, de leur inhumanité, de leur dureté, qu’il leur interdit la chambre nuptiale. (Mat. 25,10-12) S’il a fait lier et mettre à la porte l’homme revêtu d’habits sordides (Mat. 22,11-13), ce n’est point comme manquant d’orthodoxie, mais comme vivant dans la fange de l’impureté. De même, ceux qu’il a condamnés au feu préparé pour le diable et ses anges, ne furent pas envoyés par lui à ce supplice comme ayant abandonné la foi, mais comme n’ayant jamais eu de pitié pour personne. Paul eût pu rappeler ces faits avec ceux qui s’en rapprochent, et dire : Je ne veux pas que vous ignoriez, mes frères, que tous ces gens-là avaient reçu le baptême, participé aux mystères, montré beaucoup de foi et acquis une science profonde ; néanmoins comme leur vie ne répondait pas à leur foi, ils furent exilés du royaume et livrés au feu. Pourquoi donc, au lieu de parler ainsi, au lieu de citer ces exemples, a-t-il mieux aimé dire quelque chose comme ceci : Je ne veux pas que vous ignoriez, mes frères, que nos pères ont tous été sous la nuée, et leur rappeler le récit de Moïse, en passant d’abord sous silence les choses qui se rapportent au règne de la grâce ? Ce n’est pas sans réflexion ni sans motif qu’il a pris ce parti ; car il était plein de sagesse, mais quel a pu donc être son motif ou son but ? Il y en a deux : d’une part, il voulait rendre sa réprimande plus efficace, et, de l’autre, montrer la parenté des deux Testaments.
En effet, on voit beaucoup de gens qui ne croient pas à la géhenne, et n’admettent pas même l’existence du châtiment ; ils croient que Dieu n’a proféré ces menaces que pour nous faire peur et nous corriger ; et de là, selon eux, le ver éternel, le feu inextinguible, les ténèbres extérieures ; mais ils ne peuvent révoquer en doute les faits qui se sont passés. Car, comment prétendre que ce qui est arrivé n’est point arrivé eu effet ? Les choses que personne n’a vues, qui tic se sent point réalisées visiblement, rencontrent beaucoup d’incrédules. Mais les faits, les événements accomplis, il n’y a nos un être, si incapable et si stupide qu’il soit, qui puisse, quand il le voudrait, en nier la réalité. L’Apôtre part donc des faits bien reconnus, des faits accomplis, de ceux dont il reste beaucoup de traces, afin de convaincre les coupables de l’exacte justice de Dieu. C’est à peu près comme s’il dirait : Si tu doutes de la géhenne, du châtiment, du supplice, et que ce soient là, à tes yeux, de simples menaces de Dieu, repasse dans ton esprit les faits passés, et apprends ainsi à croire à ceux qui doivent arriver. En effet, si c’est le même Dieu qui régnait alors et qui règne aujourd’hui, au temps de la grâce, comme au temps de l’ancienne loi ; comment admettre qu’il ait alors puni et livré au supplice Ics pécheurs, et qu’aujourd’hui il nous fasse grâce, à nous qui sommes encore plus criminels ? Réponds-moi : Les Juifs ont forniqué, et ils ont été châtiés ? Ils ont murmuré, et ils ont été punis. Il faut bien que tu m’accordes cela. Eh bien ! comment Celui qui a puni ces téméraires pourrait-il excuser chez toi des fautes analogues ? Cela serait absurde. Mais tu n’as pas été puni ici-bas ? Raison de plus pour que tu croies aux supplices de la géhenne, puisque tu n’as pas été puni dans ce monde. En effet, si quelque châtiment ne t’attendait pas dans l’autre vie, tu ne serais pas demeuré impuni, après avoir commis les mêmes fautes que ces anciens pécheurs.
Par conséquent, s’il t’arrive de rencontrer, un voluptueux, un libertin, un homme adonné sans nulle pudeur à tous les dérèglements, et