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posséder qu’il le loue, mais de les avoir reçues de Dieu. Il arrive ensuite au jeune homme. Et Sara, femme de mon maître, lui a donné un fils alors qu’il était déjà vieux. Ici il veut appeler l’attention sur le miracle de cette naissance, en la représentant comme un bienfait de la faveur divine, en dehors des lois de la nature. Et pareillement, si quelqu’un de vous cherche une femme ou un mari, qu’il examine avant tout si la personne qu’il a en vue est aimée de Dieu, si la bonté céleste lui prodigue ses faveurs. Car si cela se trouve en elle, tout le reste s’ensuit : dans le cas contraire, possédât-elle la plus belle fortune et la mieux assurée, c’est comme si elle n’avait rien. Ensuite le serviteur, afin qu’on ne lui demande pas Pourquoi n’a-t-il pas épousé une femme de son pays ? ajoute aussitôt après : Mon maître m’a fait prêter serment et il m’a dit : Tu ne donneras pas pour femme à mon fils une des filles des Chananéens ; mais tu te rendras dans la maison de mon père, et dans ma tribu, et tu choisiras là une épouse pour mon fils. (Gen. 24, 37-38) Mais je ne veux pas vous rapporter ici toute l’histoire, de peur que vous ne me trouviez importun. Arrivons donc à la fin. Quand il eut raconté comment il s’était arrêté à la fontaine, comment il avait fait une prière à la jeune fille, comment elle lui avait donné plus qu’il ne demandait, comment Dieu avait été son médiateur ; enfin, quand il eut tout narré dans le plus grand détail, il finit alors de parler. Les autres, après avoir entendu ce récit, n’hésitèrent plus un instant, et sans faire attendre leur réponse, comme inspirés par Dieu lui-même, ils accordèrent leur fille sur-le-champ. Ceci est l’ordre de Dieu, répondirent Laban et Balhuel\it, nous ne pouvons donc disputer contre toi. Voici Rébecca, emmène-la et pars ; et qu’elle soit la femme de ton maître, suivant la parole du Seigneur. (Gen. 24, 50-51) Qui ne s’étonnerait ? qui ne resterait frappé de surprise, en songeant au nombre et à la gravité des obstacles levés ainsi dans un instant ? L’envoyé était un étranger, un serviteur ; la distance à parcourir était considérable ; ni le jeune homme, ni son père, ni aucun de ses parents n’était connu. C’était assez d’une de ces difficultés pour empêcher le mariage ; rien ne l’empêcha pourtant, et comme si Isaac était un voisin, une connaissance, un ami du premier jour, ils lui donnent leur fille avec une entière confiance : c’est que le médiateur était Dieu. En effet, essayons-nous de faire quelque chose sans son appui, ce qui semblait tout simple et tout aisé ne nous offre plus que précipices, qu’abîmes, que chances contraires. Au contraire quand il est avec nous et qu’il nous assiste, le projet le plus difficile à exécuter réussit comme de lui-même. En conséquence, n’entreprenons rien, ne disons rien, sans avoir d’abord invoqué Dieu, et l’avoir prié de mettre la main lui-même à ce qui nous occupe, ainsi qu’a fait le serviteur.
9. Voyons maintenant, la demande accordée, comment se firent les noces. Traîna-t-il derrière lui des joueurs de cymbales, de flûte, des danseurs, des tambours, et tout cet appareil que l’on connaît ? Rien de tout cela seule il avait reçu Rébecca, seule il l’emmena, sans autre compagnon que l’ange qui lui faisait escorte, en accomplissement de la prière qu’Abraham avait faite à Dieu, de protéger le voyage de son serviteur, quand il aurait quitté la maison. Et la jeune femme était conduite à son époux, sans qu’elle eût entendu ni flûte, ni lyre, ni autres instruments, mais la tête toute chargée de bénédictions célestes, couronne supérieure en éclat aux plus riches diadèmes. Elle était conduite à son époux, parée non de tissus d’or, mais de chasteté, de piété, de charité, de toutes les vertus enfin. Elle était conduite à son époux, non sur un char couvert, ni sur quelque autre siège d’apparat, mais sur le dos d’un chameau. C’est qu’alors, indépendamment de leurs vertus, les jeunes filles avaient un tempérament robuste. En effet, leurs mères ne les élevaient pas comme c’est la mode aujourd’hui, et ne compromettaient point leur santé à force de bains, de parfums, de fard, de vêtements moelleux, enfin par mille autres superfluités propres seulement à les amollir ; au contraire, elles les soumettaient aux plus rudes épreuves. Aussi avaient-elles une beauté florissante, et de bon aloi, attendu qu’elle devait tout à la nature et rien à l’artifice. Aussi jouissaient-elles d’une santé à l’abri de toute atteinte, et leurs grâces étaient-elles incomparables, parce que leur corps n’était jamais incommodé par la maladie et que la mollesse leur était inconnue. En effet, les peines, les fatigues, l’habitude de faire tout par soi-même, en chassant la mollesse, donnent une force, une santé inébranlable. Par là on les rendait plus capables d’inspirer aux hommes la tendresse et l’amour ; car ils