Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 4, 1864.djvu/199

Cette page n’a pas encore été corrigée

multipliés. Ce qui prouve que les Juifs étaient homicides, ce sont ces paroles des prophètes eux-mêmes : Édifiant Sion dans le sang, et Jérusalem dans les iniquités (Mic. 3, 10) ; et encore : Ils mêlent le sang au sang (Ose. 6, 2) ; et ailleurs : Vos mains sont pleines de sang. (Isa., 15) Et ce n’est pas seulement contre les étrangers, c’est encore contre leurs poches que se déchaînait leur fureur, comme le montrent ces mots du Prophète : Et ils ont immolé leurs fils et leurs filles aux démons (Psa. 105, 37) ; or ceux qui n’épargnaient pas leurs enfants n’auraient pas davantage épargné leurs femmes. C’est donc afin d’empêcher Cela qu’il accorda cette permission ; aussi le Christ, lorsque les Juifs lui demandèrent : Comment donc Moïse a-t-il permis de donner à sa femme un acte de répudiation ? voulant montrer que la loi de Moïse ne contredisait point la sienne, répondit à peu près en ces termes : Moïse a parlé ainsi à cause de la dureté de vos cœurs ; mais au commencement il n’en fut pas ainsi ; Celui qui fit l’homme au commencement les fit mâle et femelle. (Mat. 19, 8 et 4) Si cela était honnête, veut-il dire, Dieu n’aurait pas fait un homme et une femme seulement ; après avoir fait un seul homme, Adam, il aurait créé deux femmes, pour le cas où celui-ci aurait voulu renvoyer l’une et prendre l’autre ; mais, par le mode même de sa création, il a établi la loi que je promulgue maintenant. Quelle est donc cette loi ? c’est que l’homme conserve jusqu’à la fin la femme qui lui est échue d’abord ; cette loi ? c’est plus ancienne que l’autre, et cela, de toute la distance qui sépare Adam de Moïse. Par conséquent je n’innove point, je n’introduis point de dogmes étrangers, mais des dogmes anciens et antérieurs à Moïse.
Mais il faut entendre la loi même de Moïse sur ce sujet : Si quelqu’un, dit-il, a pris une femme et qu’il ait habité avec elle ; si elle ne trouve pas grâce devant lui, parce qu’il aura trouvé en elle un fait d’ignominie, il lui écrira un acte de répudiation, et le lui donnera entre les mains. (Deu. 24, 1) Voyez ! Il n’a pas dit qu’il écrive, qu’il lui donne : que dit-il donc ? Il lui écrira un acte de répudiation et le lui donnera entre les mains. C’est bien différent. En effet, dire qu’il écrive, qu’il ; donne, c’est un ordre, une injonction. Mais dire : Il écrira un acte de répudiation, et le lui donnera entre les mains, c’est annoncer un fait, et non pas introduire une loi qu’on a imaginée. Si quelqu’un, dit-il encore\it, a congédié sa femme, et l’a renvoyée de sa maison, et qu’après l’avoir quitté elle ait appartenu à un autre homme, et que ce dernier homme aussi l’ait prise en haine, et qu’il lui ait écrit un acte de répudiation, et qu’il le lui ait remis entre les mains, et qu’il l’ait renvoyée de sa maison, ou que l’homme soit mort qui l’avait prise pour femme, l’homme qui l’aura précédemment renvoyée ne pourra la rappeler et la prendre pour épouse. (Id. 5, 2-4) Ensuite, voulant montrer qu’il n’approuve pas cette conduite, que ce n’est pas ainsi qu’il entend le mariage, et qu’il ne fait que condescendre à la faiblesse des Juifs, après ces mots : L’homme qui l’aura précédemment renvoyée ne pourra la prendre pour femme, il ajoute : Après qu’elle aura été souillée (Id. 5, 4) : façon de parler qui indique suffisamment que ce second mariage, contracté du vivant du premier époux, est une souillure plutôt qu’un mariage. Voilà pourquoi il n’a pas dit : Après qu’elle se sera remariée. Voyez-vous comme ses paroles concordent avec celles du Christ ? Après cela, il ajoute la raison : Parce que c’est une abomination devant Dieu. (Id. 5, 4) Voilà pour ce qui regarde Moïse. Mais le prophète Malachie indique la même chose bien plus explicitement, ou plutôt ce n’est point Malachie, c’est Dieu par la bouche de Malachie ; et voici ses paroles : Est-il convenable de jeter les yeux sur votre sacrifice, ou d’agréer quelque chose sortant de vos mains ? (Mal. 2, 13) Puis, après la réponse : Pourquoi as-tu abandonné la femme de ta jeunesse ? (Id. 14) Enfin, faisant voir l’énormité de cette faute, et refusant toute miséricorde à celui qui l’a commise, il renforce encore l’accusation par ce qu’il ajoute : Et celle-ci était ta compagne, et la femme de ton pacte, et le reste de ton esprit, et ce n’est pas une autre qui l’a faite. (Id) Voyez que de titres il allègue ! d’abord l’âge, la femme de ta jeunesse; puis l’intimité : Et celle-ci était ta compagne ; puis le mode de création : Le reste de ton esprit.
3. Mais à la suite de tout cela, vient quelque chose de bien plus considérable, la majesté de celui qui l’a faite. Car c’est là ce que signifie : ce n’est pas un autre qui l’a faite. Tu ne peux objecter, veut-il dire, que tu as été fait par Dieu, tandis qu’elle n’a pas été faite par lui, mais par quelque être inférieur ; c’est un même et unique créateur qui vous a donné l’existence