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Pierre, n’était qu’un avertissement et un enseignement pour les Juifs, écoutez ce qui suit : Nous sommes Juifs de naissance et non pécheurs d’entre les Gentils. (Gal. 2,15) Ici c’est le docteur qui s’adresse à tous pour les instruire, ce n’est plus Paul qui reprend Pierre ; S’il avait commencé à parler en maître dès le commencement, les Juifs ne l’auraient pas toléré. Mais ayant débuté par une réprimande que Pierre semblait avoir justement méritée en attirant les Gentils à l’observation de la loi judaïque, il arrive enfin avec confiance aux avertissements et aux conseils, comme s’il y avait été conduit par la suite du discours. De peur que quelqu’un ayant entendu ces mots : Tu forces les Gentils à judaïser, crût que cela leur était défendu, mais était permis aux Juifs, il s’adresse aux maîtres eux-mêmes. Pourquoi parler, dit-il, des Gentils et des autres Juifs ? Pourquoi ne pas nous nommer, nous qui sommes docteurs et apôtres, je dis plus, nous qui sommes Juifs de race et qui n’en avons pas moins complètement abandonné la loi de nos ancêtres ? Pourra-t-on nous pardonner quand nous engageons les autres à la suivre ? Voyez comme il s’empare doucement des Juifs et comme il établit la parfaite doctrine. Après leur avoir dit : Nous sommes Juifs de naissance et non pécheurs d’entre les Gentils, il donne une cause raisonnable pour expliquer comment lui et bien d’autres avaient quitté le judaïsme. Nous savions que l’homme ne se justifie pas par les œuvres de la loi mais par la foi de Jésus-Christ. Nous aussi, nous avons cru en Jésus-Christ, pour être justifiés par la foi du Christ, et non par les œuvres de la loi, car l’homme ne se justifie pas par les œuvres de la loi, mais par la foi en Jésus-Christ. (Gal. 11, 16)
19. Voyez comme il parle souvent de l’infirmité de la loi et de la justification que l’on trouve dans la foi. Il répète fréquemment ces mots, et ce n’est pas là le langage du blâme, mais celui de l’enseignement et du conseil. Mais, comme je le disais, s’il se fût adressé aux Juifs dans ces termes, tous ses efforts auraient été perdus et inutiles, puisqu’ils ne voulaient pas de lui pour maître ; mais comme il s’adressait à Pierre, ceux-ci profitaient tacitement de cette réprimande infligée à Pierre qui la recevait en silence, car, l’opinion de Pierre était découverte, non par lui, mais par son confrère dans l’apostolat, et son premier changement devenait public. Ensuite afin qu’ils ne puissent se dire entre eux : Pierre et Paul ont peut-être tort, Paul donne des raisons justes et incontestables pour ne pas observer les rites judaïques, en disant que ce n’est pas la loi, mais la foi seule qui peut justifier. Il commence son discours avec modération, il le continue avec énergie et véhémence : Si en cherchant à être justifiés par le Christ, nous nous trouvions pécheurs nous-mêmes, le Christ serait donc le ministre du péché ? (Gal. 2,17) Voici ce qu’il veut dire : La foi justifie et ordonne de quitter les rits judaïques, qui ont cessé d’exister ; mais si, au contraire, cette loi nous gouverne et nous domine encore, si celui qui l’abandonne est jugé coupable, alors le Christ, qui nous a ordonné de l’abandonner, sera l’auteur de notre faute et non seulement il ne nous aura pas délivrés du péché, mais il nous aura même entraînés au péché. C’est à cause de la foi que nous avons abandonné la loi ; si donc l’abandon de la loi est un péché, il s’ensuit que la foi est la cause de notre péché. Après avoir ainsi réduit ses adversaires à l’absurde, il ne s’arrête plus à discuter, il se contente d’ajouter : A Dieu ne plaise ! car l’absurdité est évidente. En effet, dit-il, si je reconstruis ce que j’ai abattit, je me rends moi-même prévaricateur (Gal. 2,18), il attaque à son tour et fait voir que le tort ne consiste pas à transgresser la loi, mais à ne pas l’abandonner ; et quoiqu’il parle à la première personne, c’est encore Pierre qu’il a en vue. Pierre n’avait-il pas rompu les prescriptions sur la nourriture, en préférant vivre comme les Gentils ? Donc en revenant ensuite aux habitudes des Juifs et vivant comme eux, il réédifiait ce qu’il avait abattu.
20. Vous voyez que partout il insiste sur, la conduite de Pierre ; et comme il fait remarquer sa première conversion, il ne semble point que ce soit par le discours de Paul, mais par l’opinion de Pierre, ainsi démontrée par ses actions' que les Juifs se trouvent avertis. C’est pour cela qu’il dit : Craignant ceux qui étaient circoncis ; et : parce qu’il était répréhensible ; et : parce qu’il ne marchait pas droit, suivant la vérité de l’Évangile. Il n’en était pas ainsi, à Dieu ne plaise ! nous l’avons assez fait voir. Mais, de même qu’alors Paul faisait des réprimandes que Pierre écoutait en silence, pour ne pas contrarier les desseins de Paul, acceptant ces reproches comme s’il avait