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Et non seulement il ne rougissait point de son métier, mais il le gravait pour ainsi dire orgueilleusement dans ses épîtres comme sur un cippe d’airain. Ainsi, ce qu’il avait appris dans le commencement, il l’exerçait encore par la suite, et même alors, qu’il avait été ravi au troisième ciel, qu’il avait été transporté dans le paradis, et qu’il avait reçu de Dieu communication de paroles mystérieuses ; et nous, qui ne sommes pas même dignes de ses sandales, nous rougissons de ceux dont lui était fier ; nous qui prévariquons tous les jours, nous ne nous convertissons pas, et nous ne regardons pas cela comme un opprobre ; mais nous fuyons comme un sujet de honte et de risée une vie qui s’entretient d’un travail légitime. Quel espoir de salut aurons-nous donc, dites-le-moi ? Car si vous avez honte, ce devrait être d’avoir péché, d’avoir offensé Dieu, et fait quelque action contraire à votre devoir ; mais quant aux métiers et aux travaux, vous devriez au contraire en être fiers. Car c’est par là, c’est par l’occupation du travail, que nous pourrons chasser aisément de notre esprit les mauvaises pensées, secourir les malheureux, ne point fatiguer les autres en assiégeant leur porte, et accomplir la loi du Christ qui a dit : C’est une plus grande bénédiction de donner que de recevoir. (Act. 20,35) En effet, si nous avons des mains, c’est pour nous aider nous-mêmes, et pour fournir, de nos propres ressources, tout ce qui est en notre pouvoir, à ceux qui ont des infirmités ; de sorte que l’homme qui passe sa vie dans la paresse, est plus malheureux, même lorsqu’il se porte bien, que les gens qui ont la fièvre ; car ceux-ci ont leur maladie pour excuse, et ils méritent la commisération ; mais les autres, qui déshonorent leur bonne santé, s’attirent à bon droit la haine de tout le monde, comme transgressant les lois de Dieu, comme portant préjudice à la table des malades, et comme avilissant eux-mêmes leur âme. En effet, le mal n’est pas seulement qu’au lieu de tirer leur subsistance, comme ils le devraient, de leur maison et de leur personne, ils assiègent en importuns les maisons d’autrui ; mais c’est encore qu’ils deviennent eux-mêmes ce qu’il y a de pire au monde. Car il n’est rien, non rien absolument, qui ne se perde par la paresse. Voyez l’eau : celle qui séjourne se corrompt ; celle qui courre et erre de tous côtés conserve sa vertu ; le fer : celui qui reste en repos, est miné à force de rouille, il perd de sa solidité et de sa valeur ; celui au contraire qui sert à différents travaux, devient à la fois bien plus utile et bien plus beau : il brille à l’égal de l’argent le plus pur. Chacun peut remarquer encore qu’une terre laissée inactive ne produit rien de bon, mais seulement de mauvaises herbes, des épines, des chardons, et des arbres stériles : celle au contraire qui a le bonheur d’être cultivée, se couvre de fruits savoureux. En un mot, tout ici-bas se perd par la paresse et devient plus utile par son travail propre. Eh bien ! donc, puisque nous savons tout cela, tout le dommage qui résulte de la paresse, et tout le profit que l’on retire du travail, fuyons l’une et recherchons l’autre, afin de passer honorablement notre vie présente, de secourir les malheureux avec ce que nous avons, et après avoir rendu notre âme meilleure, d’avoir en partage les biens éternels : puissions-nous tous obtenir cette faveur, par la grâce et la miséricorde de Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui appartiennent la gloire et la puissance, ainsi qu’au Père et au Saint-Esprit, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il