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alors, se justifiait par la nécessité du moment, et montrait en lui un homme bon et occupé de l’intérêt du grand nombre. C’est ainsi que Paul se montra. On le calomniait, on disait qu’il n’était pas approuvé comme apôtre, qu’il n’avait aucun pouvoir. Il était donc dans la nécessité de prouver sa dignité. Comprenez-vous la force de son enseignement, pour démontrer qu’on ne doit pas se glorifier sans raison ? D’abord il prouve que lui-même ne l’a fait que par nécessité ; secondement, il s’appelle un insensé, et il s’entoure d’un grand nombre d’excuses ; troisièmement, il ne dit pas tout, il cache ce qu’il y a de plus glorieux pour lui, et cela malgré la nécessité de parler ; quatrièmement, il parle de lui-même comme d’une autre personne et dit : je connais un homme; cinquièmement, il ne parle pas de toute espèce de vertus, il dit partiellement, il publie seulement ce que demandaient et l’intérêt des auditeurs, et les circonstances. Cette mesure, il ne la gardait pas seulement quand il se louait, mais quand il adressait des paroles injurieuses. Il est défendu d’injurier son frère ; Paul savait pourtant adresser des injures si bien justifiées par les circonstances, qu’il mérite encore plus d’être honoré que ceux qui décernent des éloges. C’est ainsi qu’il écrit : O Galates insensés (Gal. 3,1) ! il le répète une fois, deux fois ; il appelle les Crétois des ventres paresseux, de méchantes bêtes (Tit. 1,12), et néanmoins ces paroles font honneur à saint Paul. Son exemple nous a donné la règle et la mesure, pour nous empêcher de traiter avec indulgence ceux qui négligent le Seigneur ; pour nous apprendre aussi à diriger comme il convient le discours qui doit les frapper. On trouve dans Paul des mesures pour toutes choses, et voilà pourquoi toutes ses actions, toutes ses paroles sont justement célèbres, soit qu’il adresse des injures ou des éloges, soit qu’il accuse, soit qu’il caresse, soit qu’il s’exalte, soit qu’il s’abaisse, soit qu’il se glorifie, soit qu’il déplore sa misère. Et qu’y a-t-il d’étonnant qu’on approuve les injures, les vifs reproches qu’il adresse, si l’on accepte et le meurtre, et la tromperie, et la ruse, soit dans l’Ancien, soit dans le Nouveau Testament ? Méditons avec soin toutes ces réflexions, ne les oublions pas, admirons le bienheureux Paul et glorifions le Seigneur, et prenons en main sa cause, afin d’obtenir les biens éternels, par la grâce et par la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui appartient la gloire, avec la puissance, maintenant, et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.