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n’a pas vu, si l’oreille n’a pas entendu, si l’esprit de l’homme ne peut concevoir ce que Dieu prépare pour ceux qui l’aiment, d’où pouvons-nous, bienheureux Paul, en avoir la connaissance ? Attendez un moment, et vous allez entendre cet apôtre qui s’explique en termes clairs : Mais Dieu, dit-il, nous l’a révélé par son Esprit. Et il ne s’arrête point là ; mais afin de montrer la grande puissance de cet Esprit divin, et qu’il est de même nature que le Père et le Fils, il continue : Parce que l’Esprit pénètre tout, et même les profondeurs de Dieu. Ensuite, voulant nous instruire plus exactement encore par des exemples humains, il ajoute : Car qui des hommes connaît ce qui est en l’homme, sinon l’esprit de l’homme, qui est en lui ? Ainsi nul ne connaît ce qui est en Dieu, sinon l’Esprit de Dieu. Voyez-vous une doctrine parfaite ? Comme il n’est pas possible, dit-il, qu’un autre connaisse ce qui est dans la pensée d’un homme, si ce n’est lui-même ; ainsi personne ne connaît les choses de Dieu, sinon l’Esprit de Dieu ; ce qui est la plus forte preuve, la preuve la plus propre à établir la divinité de l’Esprit-Saint. Dans l’exemple qu’apporte saint Paul, il semble dire : Il n’est pas possible qu’un homme ignore jamais ce qui est dans sa pensée. Eh bien ! dit-il, l’Esprit-Saint connaît aussi parfaitement les choses de Dieu. N’est-il donc pas clair que dans ce passage le bienheureux apôtre confond ceux qui, prévenus eux-mêmes contre leur propre salut, déclarent la guerre à la divinité de l’Esprit-Saint, et, le dépouillant, autant qu’il est en eux, de la dignité de Seigneur et de Maître, le rabaissent à la simple condition des êtres créés et mortels ? Mais si, par un vain esprit de dispute, ces hommes combattent ouvertement les paroles de la divine Écriture, nous, du moins, qui regardons les dogmes sacrés qu’elle renferme comme des oracles venus d’en haut, renvoyons à Dieu la gloire qui lui est due, et montrons en nous, avec la droiture de la foi, l’exactitude de la vérité.
Je n’en dirai pas davantage contre ceux qui ont la hardiesse d’attaquer, dans leurs enseignements, les oracles de l’Esprit divin. Il est nécessaire de vous expliquer pourquoi le Seigneur n’a pas accordé à ses disciples, aussitôt après son ascension, tous les biens qu’il leur avait promis ; pourquoi il ne leur a envoyé la grâce de l’Esprit-Saint qu’après la leur avoir fait attendre quelques jours, et les avoir abandonnés à eux-mêmes. Ce n’est pas au hasard et sans cause qu’il a tenu cette conduite. Il savait, sans doute, que les hommes n’estiment, comme ils le doivent, les biens, qu’en les comparant aux maux ; qu’ils n’apprécient, comme elle le mérite, la position la plus douce et la plus heureuse que quand ils ont éprouvé une situation contraire. Par exemple, car c’est une vérité qu’il faut démontrer clairement, un homme qui jouit de la santé la plus florissante, ne peut en bien connaître tout le prix, à moins qu’une maladie survenue ne lui ait fait éprouver un état contraire. Pour apprécier à sa valeur le bienfait de la lumière du jour, il faut sortir de l’obscurité de la nuit. L’expérience du contraire est donc toujours le meilleur maître pour nous apprendre et nous faire sentir toute l’importance des avantages dont nous jouissons. Voilà pourquoi lorsque les disciples eurent joui d’une infinité de biens, par la présence de leur divin Maître, et trouvé en sa compagnie le bonheur et la gloire (car tous les habitants de la Palestine regardaient comme des astres bienfaisants, des hommes qui ressuscitaient les morts, chassaient les démons, guérissaient la lèpre et toutes les maladies, qui enfin opéraient une infinité de prodiges, ils étaient donc connus et même célèbres). Voilà, dis-je, pourquoi Dieu a permis qu’ils fussent séparés quelque temps de la puissance de Celui qui les soutenait, afin qu’étant laissés à eux seuls, ils sentissent mieux tout l’avantage de la présence d’un Maître plein de bonté, et que le sentiment des biens passés leur fît recevoir, avec plus de reconnaissance, le don dé l’Esprit consolateur. Ils étaient tristes, affligés, découragés, abattus par la séparation de leur Maître ; l’Esprit-Saint les a consolés, il a ranimé leur courage, dissipé le nuage de tristesse qui les enveloppait, il les a éclairés de sa lumière, et les a tirés de leur embarras. Ils avaient entendu cette parole du Sauveur : Allez, enseignez les nations; mais chacun d’eux flottait incertain, et ne savait de quel côté il devait tourner ses pas ; dans quelle partie de la terre il devait aller prêcher la parole : l’Esprit-Saint venant à eux en forme de langues, leur distribue les régions de la terre qu’ils doivent instruire, et par la langue de feu, sous la figure de laquelle il repose sur chaque disciple, il écrit dans l’âme de chacun, comme dans un livre, l’autorité qu’il lui confie ; il lui marque la partie du monde qu’il doit éclairer de ses instructions.