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HOMÉLIE POUR LE JOUR DE L’ASCENSION.


Prononcée dans le martyre de Romanésie, où les corps des martyrs, d’abord enterrés sous le pavé de l’église à côté des cadavres des hérétiques, furent ensuite levés de terre et déposés séparément dans un lieu plus élevé[1].

ANALYSE.


Cette homélie fut prononcée hors de la ville d’Antioche, dans un lieu consacré aux martyrs, au même endroit que l’homélie sur le mot coemeterium et sur la croix ; mais on ne peut en fixer l’année. – Les martyrs avaient été enterrés sous le pavé de l’église, à côté des hérétiques ; l’évêque Flavien les avait tirés de ce voisinage pour les placer ailleurs et les exposer à la vénération des fidèles.- L’orateur commence par louer le saint évêque de cette attention. – 1° Il montre ensuite quel est l’objet de la fête présente ; 2° c’est la réconciliation de l’homme avec Dieu, réconciliation dont Jésus-Christ a été le médiateur, et qu’il a cimentée en offrant à Dieu son père, dans sa personne, les prémices de la nature humaine, qui ont été placées au plus haut des cieux. 3° Pour faire sentir quel est le bienfait d’avoir élevé si haut notre nature, il fait voir combien elle était avilie et dégradée. – 4° Il prouve que les anges ont été affligés de notre dégradation, par des conjectures, et parce qu’ils se sont réjouis avec nous, lorsque Jésus-Christ est né, lorsqu’il est ressuscité, enfin lorsqu’il est monté aux cieux. – 5° Deux anges se sont présentés pour consoler les disciples de la perte de leur maître qui s’élevait dans l’air et qui disparaissait à leur vue. Les fidèles, riches et pauvres, doivent tourner leurs regards vers le ciel, attendre le retour du Sauveur, et mériter par la pureté de leur vie d’être transportés avec Jésus-Christ quand il viendra juger les vivants et les morts.
1. Lorsque nous honorions la mémoire de la Croix, nous avons célébré cette fête hors de la ville ; et maintenant que nous nous occupons de l’Ascension de Jésus crucifié, jour brillant et glorieux, nous célébrons encore cette fête hors de nos murs. Ce n’est pas que nous voulions faire honte à la ville, mais nous voudrions faire honneur aux martyrs. C’est dans la crainte qu’ils ne nous fassent de vifs reproches et ne nous disent : Est-ce que nous ne sommes pas dignes de voir un seul jour de Notre-Seigneur célébré dans nos tentes ? nous avons répandu notre sang pour lui, nous lui avons fait le sacrifice de nos têtes ; et nous n’aurions pas l’avantage de voir le jour de sa gloire célébré dans le lieu où reposent nos cendres ! C’est dans la crainte d’entendre ces reproches, que nous courons aux pieds des martyrs, pour nous justifier en ce jour auprès d’eux de tout le temps qui a précédé ; car si nous devions courir à ces généreux athlètes de la religion, même lorsque leurs corps étaient cachés sous le pavé des temples, à plus forte raison devons-nous le faire aujourd’hui que ces pierres précieuses sont mises à part, que les brebis ne sont plus auprès des loups, et que les vivants sont séparés des morts. Quant à eux, ils ne recevaient aucun préjudice d’une sépulture commune avec les hérétiques. Non, un pareil voisinage ne pouvait faire tort aux corps de ceux dont les âmes sont dans le ciel ; les restes de ceux dont la plus noble portion est dans la main du Seigneur, ne pouvaient souffrir de telle ou de telle position. Mais s’ils ne recevaient même auparavant aucun préjudice, le peuple qui courait aux restes des martyrs, n’éprouvait pas un léger dommage du lieu où ces corps saints étaient placés. Il ne priait qu’avec embarras et inquiétude, parce qu’il ignorait quels étaient les tombeaux des saints, et où étaient déposés ces trésors véritables. En un mot, il arrivait le même inconvénient que si des troupeaux de brebis, conduits à des eaux pures et salutaires, en étaient repoussés par une odeur infecte qui s’exhalerait d’ailleurs : de même le peuple qui allait aux sources pures des martyrs, en était écarté,

  1. Traduction d’Auger, revue.