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terminé et avant d’offrir les hymnes d’actions de grâces après la Cène ? Ce que je vais dire paraîtra dur sans doute, mais il le faut bien à cause de la négligence du plus grand nombre. Quand, à la dernière cène et dans cette dernière nuit, Judas eut communié, il se précipita dehors et se retira, tandis que les autres apôtres étaient encore à table. Ce sont ses imitateurs qui s’en vont avant la dernière action de grâces. S’il ne fût pas sorti, il n’aurait pas trahi ; s’il n’eût pas quitté ses frères, il n’aurait pas péri ; s’il ne se fût pas précipité hors du bercail sacré, le loup ne l’aurait pas trouvé seul pour le dévorer ; s’il ne s’était pas éloigné lui-même du pasteur, il ne serait pas devenu la proie de la bête féroce. Aussi s’en alla-t-il avec les Juifs tandis que les autres disciples sortirent avec le Seigneur après le cantique d’action de grâces. Voyez-vous comment cette dernière prière que nous faisons après le sacrifice rappelle l’hymne que chantèrent les apôtres ? Maintenant donc, mes bien-aimés, pensons à ces choses, réfléchissons-y et redoutons la damnation qui suivit cette faute de Judas. Dieu vous donne sa propre chair et vous ne lui donnez pas même des paroles en échange ? Vous ne lui rendez pas grâces pour ce que vous avez reçu ? Quand vous avez pris votre nourriture corporelle, après le repas, vous priez ; mais quand vous avez participé à la nourriture spirituelle, infiniment au-dessus de toute créature visible et invisible, malgré votre bassesse et votre néant, vous ne prenez pas même le temps de témoigner la moindre reconnaissance soit par des paroles, soit par des actes. N’est-ce pas vous exposer aux derniers supplices ? Ce que je vous dis, non seulement pour vous porter à remercier Dieu, et à éviter le tumulte et les cris, mais afin que dans l’occasion le souvenir de nos exhortations vous rende plus modestes. Il s’agit ici de mystères réels ; et qui dit mystère dit aussi le silence le plus absolu. Donc, que ce soit désormais dans le plus grand silence, avec une modestie parfaite, un respect convenable que nous participions à ce sacrifice saint, afin de mériter une plus grande miséricorde de Dieu, de purifier notre âme et d’obtenir les biens éternels.
Qu’il en soit ainsi par la grâce et la miséricorde de Notre-Seigneur, à qui soient gloire, empire et adoration, avec le Père et le Saint-Esprit maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.
Traduit par M. l’abbé GAGEY, curé de Millery.