Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 3, 1864.djvu/189

Cette page n’a pas encore été corrigée

preuve non de la bassesse des objets que l’on traite, mais de la folie de ceux qui rient. On peut dire des infidèles qu’ils sont plus insensés que des enfants, parce qu’ils décrient et qu’ils rabaissent des objets dignes de notre admiration et propres à nous inspirer une vénération religieuse, tandis ;: qu’ils en relèvent et en célèbrent d’autres qui ne méritent que des mépris. Cependant nos mystères, dont ils font le sujet de leurs sarcasmes amers, conservent toute leur majesté et toute leur dignité, malgré les plaisanteries par lesquelles ils les attaquent, au lieu que les objets de leur culte, quoi qu’ils fassent pour les embellir, se montrent toujours sous les traits d’infamie qui leur sont propres. Quel excès d’égarement ! des hommes qui ne croient rien faire, ni rien dire qui choque la bienséance, lorsqu’ils introduisent leurs dieux dans des pierres et dans des bois fragiles, dans de viles statues, où ils les renferment comme dans une prison ; ces hommes nous reprochent d’avancer que Dieu, pour l’avantage de la terre, s’est construit un temple vivant par l’opération de l’Esprit-Saint ! Et de quel front nous font-ils des reproches ? s’il est peu décent que Dieu habite dans un corps humain, sans doute il l’est beaucoup moins encore qu’il habite dans la pierre et dans le bois ; dans la pierre, dis-je, et dans le bois qui sont bien inférieurs à l’homme ; à moins qu’ils ne pensent que notre nature est au-dessous de ces êtres morts et insensibles. Ils ne craignent pas, eux et plusieurs hérétiques, de renfermer la divine essence dans les animaux les plus vils, dans les chiens, dans les chats, ainsi que dans les matières les plus ignobles ; pour nous, incapables de rien soutenir, de rien admettre de pareil, nous disons seulement que Jésus-Christ a pris dans le sein d’une vierge, une chair pure, sainte, irrépréhensible, inaccessible à tout péché, et qu’il l’a prise, cette chair, pour réparer l’homme qu’il a formé de ses mains. Eux et les manichéens, qui ne leur cèdent pas en impiété, ils n’ont pas de honte de renfermer l’essence divine dans des chiens, dans des singes, dans des animaux de toute espèce, puisqu’ils disent que, l’âme de ces animaux est formée de cette essence ; ils n’ont pas horreur d’une pareille opinion, et ils nous accusent d’avoir des idées indignes de Dieu, parce que, sans nous permettre de rien imaginer de semblable, sans rien dire qui ne convienne à sa divinité, nous prétendons que, par une naissance surnaturelle, il est venu dans le monde pour réparer son propre ouvrage ! Eh quoi ! vous dites que l’âme d’un tourbe, d’un assassin, est une partie de l’essence divine, et vous osez nous accuser, nous qui ne pouvons souffrir une opinion aussi absurde et qui jugeons coupables d’impiété ceux qui la soutiennent, vous nous reprochez de dire que Dieu s’est construit un temple saint, par le moyen duquel il a introduit parmi les hommes une vie toute céleste ! ne mériteriez-vous pas mille morts, et pour les reproches que vous nous faites, et pour les outrages que vous ne cessez de commettre envers la Divinité ? S’il est indigne de Dieu d’habiter un corps pur et irrépréhensible, combien n’est-il pas plus indigne de lui d’habiter le corps d’un imposteur, d’un violateur de tombeaux, d’un brigand, d’un chien, d’un singe, et non ce corps saint et glorieux, qui est maintenant assis à la droite du Père ! Quel tort, je vous prie, quelle tache pourrait faire à la splendeur de Dieu notre chair dont il s’est revêtu ? Ne voyez-vous pas que le soleil, dont l’éclat frappe nos yeux, est corruptible de sa nature, dût toute la secte de Manès se récrier d’indignation avec les Grecs ? Que dis-je, le soleil ! la terre, la mer, et toutes les choses perceptibles à nos sens n’ont rien de solide ni de permanent. C’est ce que nous apprend saint Paul : Les créatures sont assujetties à la vanité, et elles ne le sont pas volontairement, mais à cause de Celui qui les y a assujetties. (Rom. 8,20) Et il exprime ce qu’il entend par le mot vanité : La créature sera délivrée de cet asservissement à la corruption pour participer à la liberté de la gloire des enfants de Dieu. (Id. 21) La créature est donc corruptible, puisque la corruption est une des conditions de sa nature. Que si le soleil, quoique corruptible par sa nature, lance de tous côtés ses rayons, communique avec la boue et la fange, sans que cette communication nuise en rien à sa pureté ; si, retirant ses rayons aussi purs qu’ils l’étaient auparavant, il anime de la vertu qui lui est propre les corps qui les reçoivent sans participer lui-même en aucune manière à l’impureté des plus sales et des plus infects ; à plus forte raison le Soleil de justice, le souverain Maître des puissances incorporelles, en se revêtant de notre chair, loin d’en être souillé, l’a rendue plus pure et plus sainte. Pénétrés de ces idées, et nous rappelant ces