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foi a le pouvoir de justifier. Ce témoignage où le prend-il ? Chez le prophète Habacuc, qui a dit : « Le juste vivra de la foi ». (Hab. 2,4) Ce passage montre non seulement que la foi a le pouvoir de justifier, mais encore que la loi n’a pas le pouvoir de sauver. Nul, dit Paul, n’avait observé la loi, et tous par cela même étaient sous le coup de la malédiction, c’est alors que la foi vint nous offrir un moyen facile d’échapper au sort qui nous menaçait : et c’est là une preuve considérable que la loi était impuissante à nous fournir des moyens de justification. Car le prophète n’a pas dit : Le juste vivra de la loi, mais bien : « Vivra de la foi ».
« Or, la loi ne s’appuie point sur la foi ; au contraire elle dit : Celui qui observera ces préceptes y trouvera la vie (12) ». La loi, dit-il, n’exige pas seulement la foi, mais aussi les œuvres, tandis que la grâce résultant de la foi sauve et justifie. Avez-vous remarqué comme il a prouvé que ceux qui s’attachent à la loi se trouvent, par l’impossibilité où ils sont de l’observer exactement, sous le coup de la malédiction ? Comment se fait-il que la foi ait cette puissance de justifier ? C’est ce qu’il a expliqué auparavant, et en s’appuyant sur des considérations très-fortes. Comme la loi ne pouvait fournir à l’homme les moyens de se justifier, la foi vint nous offrir un remède singulièrement efficace en rendant possible ce qui par l’effet de la loi ne l’était pas. Si donc l’Écriture dit que « Le juste vivra de la foi », dénonçant ainsi l’insuffisance de la loi pour ce qui concerne le salut, et si Abraham a pu se justifier par la foi, il est évident que l’efficacité de la foi est grande. Il est clair aussi que celui qui ne sort pas de la loi est maudit, et que celui qui s’attache à la fui est justifié. Mais, dira-t-on, comment pourras-tu nous prouver que la malédiction ne subsiste plus ? – Abraham vivait avant la loi, mais nous qui avons été ses, esclaves, qui avons vécu sous son joug, nous avons à lui rendre compte de notre conduite et nous méritons d’être frappés de la, malédiction. Quel est donc celui qui nous a soustrait à ce danger ? – Voyez comme il s’empresse de répondre à cette observation ; et sa réponse est décisive. Celui qui a été une fois justifié, qui est mort à la loi, qui s’est fait une vie nouvelle, comment pourrait-il encourir la malédiction ? Cependant il ne se contente pas de cette réponse, et s’y prenant d’une autre manière pour réfuter ses adversaires, il écrit : « Mais Jésus-Christ nous a rachetés de la malédiction de la loi, s’étant rendu lui-même malédiction pour nous, selon qu’il est écrit : Maudit est celui qui est pendu au bois (13) ».
Le peuple pouvait encourir une autre malédiction, celle qui est conçue en ces termes « Maudit soit quiconque ne demeure pas dans les préceptes de cette loi, et qui ne les accomplit pas dans ses œuvres ». (Deut. 27,26) Que prouve cela ? Que le peuple avait encouru la malédiction, car il n’était pas resté dans les préceptes de la loi, et il n’y avait pas un homme qui l’eût observée en entier. A la place de cette malédiction le Christ a substitué l’autre : « Maudit soit celui qui est pendu au bois ». Celui qui était pendu au bois était maudit, celui qui transgressait la loi était aussi maudit ; or Jésus qui se préparait à nous délivrer de la malédiction ne devait pas l’encourir, et à la place de celle-ci, il fallait qu’il en encourût une autre. Ce qu’il fit : il se soumit à la première et par elle détruisit la seconde, celle qui résultait de la non-observation de la loi. Et, de même qu’un homme innocent s’offrant pour mourir à la place d’un homme condamné à mort, le soustrait au châtiment, de, même Jésus s’est dévoué pour nous. Comme il n’avait pas encouru la malédiction de la transgression de la loi, il se soumit à l’autre genre de malédiction pour délivrer les hommes de celte qu’ils avaient encourue : « Car il n’avait pas commis de péché, et la ruse n’avait pas trouvé place sur ses lèvres ». (Is. 53,9)
4. De même que par sa mort il a préservé de la mort ceux qui allaient mourir, de même en attirant sur lui-même la malédiction, il l’a détournée de dessus la tête des hommes. « Afin que la bénédiction donnée à Abraham fût communiquée aux gentils (14). » Comment aux gentils ? « En ta postérité », dit le Seigneur, « toutes les nations seront bénies » (Gen. 22,18), c’est-à-dire en Jésus-Christ. Si cela était dit des Juifs, serait-il rationnel que ceux qui, ont encouru la malédiction pour avoir violé la loi pussent transmettre la bénédiction aux autres hommes ? Car nul parmi ceux qui sont maudits ne peut communiquer la bénédiction dont lui-même est exclu. Il est donc évident que ces paroles se rapportent entièrement à Jésus-Christ : c’est, lui qui est